« La nature des choses »
Publié le 05/02/2012
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Spontanément on ne doute pas, du moins en philosophie, ou dans la perspective scientifique, qu’il puisse exister une « nature des choses «. Ce que cherche le métaphysicien, ainsi que le scientifique (si bien sûr il n’est pas instrumentaliste mais réaliste, et, s’il considère que les théories scientifiques visent, non pas à être des fictions utiles pour le calcul, et la pratique humaine, mais des miroirs de ce à quoi ressemble réellement le monde), c’est l’essence des choses, leur constitution intrinsèque. Par exemple, nous savons que Leibniz recherchait quelle est la nature ultime, radicale, des choses. Le terme d’ « ultime « nous indique que cette nature des choses ne nous est pas immédiatement donnée dans le réel : elle est au-delà des phénomènes. Pour lui, donc, les choses, qui nous apparaissent étendues dans l’espace, ne le sont pas véritablement : ce n’est là qu’une apparence, un effet dû à notre constitution finie. En vérité, elles sont constituées de « monades «, atomes formels, ou êtres spirituels doués de force active (et passive) ; bref, leur véritable nature est spirituelle, et ne nous est pas accessible (à « l’oeil nu «, et plus encore, pour tout observateur humain).
«
La nature des choses se définit au premier abord comme étant l’essence des
choses, et, l’ensemble des caractères qui constituent réellement les choses autour de
nous (plus précisément, l’essence est ce qui fait d’une chose la chose qu’elle est).
Afin
de pouvoir comprendre ce qu’elle implique de problématique, il nous faut nous
demander à quoi elle s’oppose.
Ce qui permettra de voir pourquoi on a besoin de la
notion de nature des choses.
Que signifie de dire qu’il y a une nature des choses, une
façon réelle, pour les choses, d’être ? Y a-t-il alors une autre façon pour elles d’être
mais qui soit moins vraie, bref, qui ne soit pas son essence, sa nature ? Par exemple, ces
choses que je vois autour de moi, cet arbre, cette chaise, ce bureau, quelle est leur nature
? Spontanément, ils m’apparaissent comme étant constitués de telle couleur, de telle
forme, etc.
Pourtant, le scientifique, ou le métaphysicien, m’enseignent que ces choses
que je vois, que je sens, etc., ne sont pas réellement colorées, chaudes, etc., mais
qu’elles sont composées de certaines propriétés invisibles à l’ œil nu, inaccessibles à nos
sens, qui causent les propriétés sensibles. Locke les nomme, dans son Essai
philosophique concernant l’entendement humain (livre II chapitre 8), les qualités
premières des choses, qualités qui sont à l’origine des qualités secondes, et qui sont
réellement dans les corps, qu’on les aperçoive ou non.
Les qualités secondes sont
seulement dans l’esprit, et n’ont aucune existence réelle, quand on ne les sent pas : c’est
l’effet que produisent sur moi ces qualités réelles, « originales », des corps.
On voit
donc avec cette distinction lockéenne, un des présupposés à l’ œuvre (le présupposé
majeur d’ailleurs) quand on recherche quelle est la nature des choses : c’est que les
propriétés ou qualités sensibles des objets, n’en sont que les apparences ; elles sont ce
qu’on a désigné par la « surface du réel », le « monde des phénomènes ».
On doit donc admettre, pour que cette notion de « nature des choses » ait un
sens, que les choses ne sont pas réellement, « en vrai », telles qu’elles m’apparaissent.
Comment l’a-t-on su ? Comment a-t-on pu se mettre à dire que le monde accessible
immédiatement n’était pas le monde tel qu’il est vraiment ? Le sens commun, souvent
qualifié de réalisme naïf, croit quant à lui spontanément que les choses sont réellement
colorées, savoureuses, agréables, etc.
Il est facilement compréhensible même au
réalisme naïf, que les choses ne peuvent être en soi, et, indépendamment de nous,
agréables, savoureuses, amères, etc.
Ces qualités (dites secondes) ne peuvent se trouver
que dans un sujet sentant.
Ce sujet sentant ayant, comme dit Hume, une tendance
naturelle à se répandre dans les choses, croit, à tort, que les choses mêmes sont telles
que nous les sentons subjectivement.
Pourtant, comme le dit le dicton populaire, « des
goûts et des couleurs, on ne discute pas » : c’est donc bien que cela ne correspond à rien
d’objectif et d’indépendant de nous, qui existerait réellement dans les choses.
Mais doit-
on pour autant dire la même chose des qualités sensibles en général, telles que le son, la
forme des objets, etc.
? Cela ne correspond-il pas, comme Locke le dit lui-même, à
quelque chose de réel dans les corps, à des « puissances » capables de créer des effets
dans le monde (sensible) ? Mais même de celles-là, on est amené à douter, non qu’à
proprement parler elles ne soient représentatives de rien dans les choses, mais parce que
rien ne nous dit qu’elles y ressemblent.
En tout cas, elles ne sont certainement pas dans
les choses elles-mêmes : en effet, les choses ne changent-elles pas d’aspect selon le
point de vue de l’observateur ? Par exemple, dans des circonstances normales, je vois le
monde de telle couleur, de telle figure, etc., mais en état de maladie, ou d’ivresse, je les
vois différemment ; ou encore, selon que je m’approche ou que je me recule de cette.
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