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La Parole

Publié le 10/12/2013

Extrait du document

Le langage est un système de signes arbitraires sans attaches naturelles avec la réalité, il existe en effet plusieurs mots pour décrire un seul et même objet et plusieurs langues. Si un langage était plus apte à décrire le monde, cela ferait longtemps qu'il aurait été privilégié. C'est cette idée que développe Nietzsche dans Le livre du philosophe «Comparées entre elles, les différentes langues montrent qu'on ne parvient jamais par les mots à la vérité, ni à une expression adéquate: sans cela il n'y aurait pas de si nombreuses langues.» Nietzsche pose le problème du lien entre le langage et la réalité. De manière plus abrupte, Valère Novarina dans Devant la parole déclare d'un ton péremptoire: «Le monde est par nous troué, mis à l'envers, changé en parlant». La tournure de la citation illustre déjà très bien les propos de l'auteur: les mots «mettent à l'envers» le monde, la citation ne respecte pas les règles en changeant la place des mots et du verbe. L'auteur insiste, par ce biais-là, sur la puissance des mots, certes outils de communication mais bien plus encore. Selon l'auteur, la parole est en nous, c'est par elle que notre esprit s'exprime, que notre pensée se dévoile. Mais elle existe aussi hors de nous, indépendamment de nous, c'est là que se révèle toute sa puissance. Si elle permet d'exprimer notre pensée, elle ne se contente pas de décrire le monde qui nous entoure, mais elle déplace, transforme, s'attelle à transformer l'ordre établi du monde. La parole ne met pas seulement des mots sur les choses. Le réel que nous croyons indépendant de nous est transformé par notre parole. Notre langage ne cherche pas seulement à décrire. Pour Valère Novarina, la parole est action. Lorsqu'elle est confrontée au monde, elle le transforme et ne se contente pas d'en donner un compte rendu objectif. Plus encore, elle l'agresse, le maltraite, l'attaque dès lors qu'elle émise. Le monde n'est pas insensible aux mots. La parole conditionne notre rapport au réel. En cela se pose le problème du lien entre la parole et le réel, ne court-on pas le risque de l'incompréhension du monde et d'un éloignement de la vérité recherchée par l'homme? Ne faut-il pas que les mots correspondent aux essences des choses? Dès lors, comment accéder à la connaissance du monde? Le monde est-il seulement exprimable? Il sera intéressant d'appuyer dans un premier temps la thèse de l'auteur selon laquelle le monde est, dans certains cas, transformé par la parole, pour ensuite insister sur le fait que le monde est finalement assez bien décrit par la parole. La parole est bien plus que cela, elle peut percer le réel et l'atteindre en plein coeur. I) Comme l'affirme Valère Novarina, la parole n'est pas fidèle au réel, nous éloigne de la vérité quand elle est instrument de mensonges. La puissance des mots est telle que le monde en devient «changé». A) La parole a un pouvoir d'illusion et de manipulation. Le pouvoir des mots est immense. L'homme ,qui utilise le langage pour s'exprimer, est le premier à se rendre compte que les mots ne sont jamais neutres et que parler laisse des trace...

« conscient du pouvoir des mots dans la tromperie et la manipulation, il croit à l'image qui lui est proposée et n'y est pas indifférent.

Finalement, ce qui touche dans le mot, c'est l'intention qu'il porte.

B) La parole déforme le monde car elle passe par notre pensée.

C'est parce qu'il y a une intention de son auteur que le mot est important et c'est dans un contexte de compréhension mutuelle entre les locuteurs que les mots se dévoilent totalement.

La parole déforme le monde dans son objectivité car elle passe par le filtre de notre conscience, de notre subjectivité.

Rien ni personne n'a jamais prouvé que tous les hommes percevaient le monde de la même manière.

Dès lors, comment décrire objectivement le monde? Dans le même ordre d'idée, on peut donner l'exemple de Verlaine qui utilise la poésie pour décrire ses affects et le monde qui l'entoure.

Pourtant, le vocabulaire qu'il utilise n'est jamais complètement neutre car il décrit ses ressentis.

Le monde n'est pas décrit naïvement mais est soumis à l'âme vagabonde du poète qui ne se contente pas de raconter ce qu'il voit: «Dans l'herbe noire Les kobolds vont.

Le vent profond Pleure, on veut croire» Charleroi, Paysages Belges Comme le dit si bien G.GUSDORF «L'expression est l'action de l'homme qui s'ajoute au monde» C) De plus, la parole change le monde car elle ne sait pas toujours le décrire.

En effet on ne peut pas dire l'ineffable.

Certaines de nos pensées ou de nos idées ne seront jamais claires si elles sont parlées, dites.

C'est ainsi que Philippe Jaccottet s'est interrogé sur la manière de dire l'indicible.

Son œuvre cherche ,entre autres, à cerner ce qui échappe aux discours ou à notre raison.

Il s'agit de l'inconnu, celui auquel on ne peut pas avoir accès.

Certains de ses écrits traitent de la mort, «l'innommable» comme il le dit lui-même car dire la mort dépasse les limites de ce que peut supporter l'homme.

Verlaine, lui, recourt à la parole pour décrire l'ineffable dans Romances sans Paroles .

C'est ainsi que le chiasme sémantique de Ariette I rend manifeste l'indicible.

De la même manière, la parole que nous utilisons n'est pas naturelle, confrontée au réel se pose le problème de la dénotation.

C'est le sujet dont traite Platon dans Le Cratyle, les mots ne ressemblent pas aux objets qu'ils désignent.

Malheureusement, la voix ne peut pas rendre compte de tous les sens.

S'opposent les naturalistes comme Cratyle et les conventionnalistes comme Hermogène.

Les conventionnalistes supposent deux ordres, l'un pour le langage et l'autre pour la réalité puisque le langage, abstrait, général semble s'opposer à la réalité, concrète, intuitive et particulière.

Le monde sera alors forcément «transformé» puisque la description orale ne correspondra pas totalement à la réalité. La parole change ainsi le monde qui nous entoure, pourtant elle est le seul outil à notre disposition pour le décrire: «Le monde s'offre à chacun de nous comme un ensemble de significations dont nous n'obtenons la signification qu'au niveau de la parole» La parole , G.Gusdorf. II) Néanmoins, le monde n'est jamais aussi bien mis en relief que par notre parole.

Il s'agit de l'outil par excellence pour décrire le monde et pour communiquer.

A) De la même manière que les besoins motivent les gestes, ce sont les passions qui ont motivé la prise de parole.

Les êtres humains ont accès à la parole car ce sont des êtres passionnés.

La langage naturel devait imiter nos ressentis, ce devait sûrement être un chant. B) Le langage permet de transmettre des informations sur le monde tout autant qu'il permet l'expression de soi.

La parole peut servir la vérité qui se fait jour en elle, sans pour autant être un effet. »

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