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La réalité scientifique.

Publié le 04/10/2009

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scientifique

INTRODUCTION :    - S'il appartient à la réalité d'être ce qui existe effectivement (par opposition à l'idéalité), si, par conséquent, elle ne pourrait être multiple sans cesser d'être réelle, alors aucune réalité ne saurait être spécifiquement scientifique, la science s'y rapportant ainsi comme à ce que nous aurions tous en partage. Parler de réalité scientifique ne consisterait donc qu'à parler de la réalité la plus commune, dont la science aurait seulement pour tâche d'expliciter le lois.- Toutefois, un tel travail d'explicitation, pour réaliste qu'il prétende être, réclame tout un effort de construction de la réalité elle-même, afin que celle-ci puisse se laisser non seulement conceptualiser et quantifier, mais aussi soumettre à des expériences rationnellement élaborées. On pourrait alors parler d'une réalité proprement scientifique, ne tenant son effectivité elle-même que du discours censé pourtant s'y rapporter en vérité.- Mais, à moins d'envisager, par impossible, une pluralité de réalités, doit-on considérer la réalité scientifique comme la réalité enfin dévoilée dans son être même, ou bien ne faudrait-il pas, au contraire, renvoyer l'objet de la science à son peu de réalité ?    PB : De quelle réalité la science est-elle l'étude, si elle ne s'y rapporte jamais qu'au travers de ce qui semble sans cesse l'en éloigner ? Mais, loin de nous en éloigner, ne doit-on pas plutôt penser qu'elle nous la fait atteindre dans sa réalité même, que l'expérience la plus commune serait incapable de saisir en vérité ? Autrement dit, faut-il parler d'une réalité proprement scientifique ou bien d'une réalité révélée par la science ?    Enjeu : A l'horizon d'un tel problème se joue la nature même de notre rapport à la réalité : s'il n'est de réalité véritable que scientifique, la science ne se donne-t-elle pas alors comme l'horizon indépassable de notre existence ? Un tel horizon est-il à la mesure de notre être sensible ? La réalité scientifique, à être entièrement maîtrisable, ouvre-t-elle seulement un monde à habiter ?

scientifique

« simples hypothèses qui sont comme des degrés et des points d'appui pour s'élever jusqu'au principe de tout, quin'admet plus d'hypothèse.

Ce principe atteint, elle descend, en s'attachant à toutes les conséquences qui endépendent, jusqu'à la conclusion dernière, sans faire aucun usage d'aucune donnée sensible, mais en passant d'uneidée à une idée, pour aboutir à une idée " (PLATON, République, VI, 511b).Cl.

: Loin de nous éloigner de la réalité, ladialectique platonicienne serait donc la science propre à la déployer dans sa réalité même, au-delà de l'oppositionentre sensation et mathématique, la dialectique ascendante consistant à saisir le principe de tout ce qui est, ladialectique descendante, à s'orienter dans la réalité une fois muni d'un tel principe. II.

D'UNE RÉALITÉ L'AUTRE : Tr.

: La conséquence d'un tel platonisme sur le travail de la science expérimentale serait que l'expérience elle-mêmerelèverait de cette dialectique descendante qui, partant des premiers principes ne rejoindrait le sensible que pour yretrouver l'intelligible, à même les phénomènes, fût-ce au prix du sensible lui-même et de sa matérialité pourtantirréductible.

Mais un tel prix n'est-il pas exorbitant, quand la science prétend rejoindre le réel dans sa réalité mêmeet, partant, dans son épaisseur matérielle ? Ne rejoindre le sensible qu'en en niant la matérialité, n'est-ce pascondamner la science à n'avoir affaire qu'à des idéalités ?- A moins que la démarche expérimentale ne consiste précisément, non pas à attendre du sensible une vérificationqu'il serait incapable d'apporter, mais à réaliser dans le sensible cela même que la raison aurait déjà atteint elle-même dialectiquement, si bien qu' " une expérience bien faite est toujours positive.

Mais cette conclusion neréhabilite pas la positivité absolue de l'expérience tout court, car une expérience ne peut être une expérience bienfaite que si elle est complète, ce qui n'arrive que pour l'expérience précédée d'un projet bien étudié à partir d'unethéorie achevée.

Finalement les conditions expérimentales sont des conditions d'expérimentation […].

Lesenseignements de la réalité ne valent qu'autant qu'ils suggèrent des réalisations rationnelles " (BACHELARD, Lenouvel esprit scientifique, intro.).- C'est pourquoi, " dès qu'on médite l'action scientifique, on s'aperçoit que leréalisme et le rationalisme échangent sans fin leurs conseils " (ibid.), à tel point que la réalité scientifique ne tientfinalement sa propre effectivité que de la science qui l'élabore rationnellement et la réalise expérimentalement.-Précisons toutefois, qu'à être construite théoriquement, la réalité produite dans et par l'expérience doit avoir lieucomme un événement pour la raison elle-même, événement susceptible de renvoyer la raison qui l'a pourtant rendupossible, à la question de la légitimité de ses propres principes, événement sans lequel l'expérience elle-mêmen'aurait aucun caractère décisif pour la théorie : " il faut aller du côté où l'on pense le plus, où l'on expérimente leplus artificiellement, où les idées sont les moins visqueuses, où la raison aime être en danger.

Si, dans uneexpérience, on ne joue pas sa raison, cette expérience ne vaut pas la peine d'être tentée.

/ Le risque de la raisondoit d'ailleurs être total.

C'est son caractère spécifique d'être total.

Tout ou rien.

Si l'expérience réussit, je saisqu'elle changera de fond en comble mon esprit.

Je fais une expérience de physique pour changer mon esprit.

Queferais-je, en effet, d'une expérience de plus qui viendrait confirmer ce que je sais et, par conséquent, ce que jesuis.

Toute découverte réelle détermine une méthode nouvelle, elle doit ruiner une méthode préalable.

Autrementdit, dans le règne de la pensée, l'imprudence est une méthode.

Il n'y a que l'imprudence qui peut avoir un succès.

Ilfaut aller le plus vite possible dans les régions de l'imprudence intellectuelle " (BACHELARD, L'engagementrationaliste, " Le surrationalisme ").- Il s'agirait donc pour la science expérimentale de produire la réalité elle-mêmecomme une extériorité radicale, comme un dehors qu'elle se donnerait pour tâche de réaliser pourtant conformémentà ses propres théories, de telle sorte qu'en se mettant à l'épreuve de la réalité, la raison se mette à l'épreuve d'elle-même, de ce qui, en elle, ne serait pas encore rationalisé et reste en attente de signification : " Si l'on veut bienadmettre que, dans son essence, la pensée scientifique est une objectivation, on doit conclure que les rectificationset les extensions en sont les véritables ressorts.

C'est là qu'est écrite l'histoire dynamique de la pensée.

C'est aumoment où un concept change de sens qu'il a le plus de sens, c'est alors qu'il est, en toute vérité, un événementde la conceptualisation " (BACHELARD, Le nouvel esprit scientifique, II, 4).- Loin d'affirmer que " ce qui nous garantitl'objectivité du monde dans lequel nous vivons, c'est que ce monde nous est commun avec d'autres être pensants "(POINCARÉ, La valeur de la science, III, 11, § 6), il faut donc accorder à la réalité d'être ce qui n'est constituée parla pensée scientifique qu'afin de mettre en crise cette pensée elle-même, au plus loin de tout accord non seulementavec autrui mais avec soi-même, comme être pensants.

Cl.

: La réalité scientifique n'est autre que la science elle-même réalisée, en vertu d'une objectivation expérimentale qui se produit au risque même des principes rationnels quil'auront pourtant rendue possible.

Il y aurait donc bien une réalité proprement scientifique, réalité dynamique commela science elle-même et que la science ne cesserait de construire comme cela même qui doit la remettreperpétuellement en question. III.

L'HORIZON DU MONDE : Tr.

: Une telle réalité ne tient finalement son effectivité que de sa rationalisation par la science et l'expérience n'estréalisée que pour révéler à la raison elle-même son inquiétude immanente et sa liberté créatrice.

" Nous sommesalors devant une ambiguïté redoublée.

Les dialectiques initiales des notions a priori sont en face des dialectiquesfinales des notions expérimentales.

Le réel délié fait écho à notre liberté d'esprit " (BACHELARD, op.

cit., " Lesurrationalisme ").

La dialectique externe de l'expérience scientifique n'est donc que la mise en scène expérimentalede la dialectique interne de la raison elle-même, et la réalité scientifique, à se donner pour l'événement del'extériorité, n'est autre que la matérialisation artificielle du libre jeu de la raison.

Une telle réalité, à existereffectivement, est donc moins le réel tel qu'il est, qu'un " ensemble de phénomènes qui portent de toutes parts lamarque théorique " (BACHELARD, Le nouvel esprit scientifique, intro.), réalité propre à la science qui épuise d'autantmoins le sens du réel qu'elle n'a de cesse d'en contester l'évidence.

Or, avant que d'être ce qui n'existerait quecomme pur phénomène de laboratoire, serait-elle dynamique, dialectique, étonnante, la réalité se donne d'abord ànous comme le monde dans lequel nous vivons en première personne, fût-ce illusoirement (en vertu d'illusions que. »

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