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La religion peut-elle servir de fondement à l'Etat ?

Publié le 11/10/2005

Extrait du document

religion
● Le politique doit au contraire être purement politique, c'est-à-dire ne rendre en compte aucun autre domaine que lui-même. C'est ce qu'explique Machiavel dans Le Prince. En effet selon lui, celui qui est appelé à gouverner doit connaître quelques principes de base, et parmi eux, celui selon lequel aucune considération extérieure ne doit venir entraver l'action du prince. L'action politique ne doit être que politique, et surtout pas teintée de morale ou de religion ; le politique est conçu pour lui-même. « Il [le prince] est souvent obligé, pour maintenir l'Etat, d'agir contre l'humanité, contre la charité, contre la religion même. » XVIII ● Les qualités du rince doivent donc être en décalage par rapport aux qualités ordinaires de l'humanité. La politique requiert la loi et la force, ce sont deux manières de combattre qui doivent correspondre à une double nature du prince, mi-homme mi-bête. Le prince est amoral, mais il doit donner de lui une image à coloration morale : le registre du politique est celui du paraître. L'apparence importe beaucoup, et il faut donc qu'on croit le prince bon, doux, sincère, et surtout religieux, peu importe si c'est vrai, ce qui compte c'est le résultat auquel il parviendra : conserver la vie de l'Etat. è La religion ne peut donc absolument pas servir de fondement à l'Etat, puisque le politique ne doit se mêler avec rien d'autre que lui-même.

Bien définir les termes du sujet :

- « La religion « : se caractérise par une croyance en un dieu liée ou non à un culte. Le sujet pose vis-à-vis la religion et l’Etat, et de ce fait, la religion dont il est question n’est pas une religion individuelle  qui implique un rapport direct du croyant à Dieu. Il s’agit plutôt de la religion vue comme institution sociale, ayant pour but de rendre à Dieu un hommage réglé par une liturgie, des cérémonies et des rites définis. Cette institution comporte une hiérarchie qui assure la constance d’un ensemble de dogmes reconnus par les « fidèles «.

- « Etat « : c’est un ensemble organisé d’institutions, sous un gouvernement autonome et sur un territoire indépendant. Il est artificiel, c’est-à-dire qu’il a été créé par l’homme (=on n’en trouve pas d’exemple dans la nature) pour permettre le rassemblement des individus. Il garantit une coexistence pacifique, en légiférant les rapports entre les individus. 

- « Fondement « : C’est ce qui donne à quelque chose sa raison d’être ou son existence. C’est aussi ce qui est à son origine, ce qui justifie son existence.  

Construction de la problématique :

            Il semble possible de répondre à la question en observant simplement le cours de l’Histoire. En effet, depuis 1905 une loi sépare les Eglises de l’Etat, ce qui auparavant n’était pas le cas, puisque la vie politique des Grecs par exemple était rythmée par le religieux. Si ce n’est plus le cas aujourd’hui c’est parce que la manière dont est perçu l’Etat est différente, et que ce dernier ne s’y prête plus. 

            Se pose donc la question de savoir dans quel cas et pour quelles raisons la religion peut servir de fondement à l’Etat, si cela est réellement possible, et légitime.

 

religion

« En 1513, Machiavel , diplomate originaire de Florence, achève la rédaction du « Prince ». Suite à un bouleversement politique à Florence, il avait été contraint d'abandonner ses fonctionset de se retirer.

Il profita de cet exil pour rédiger une sorte de traité expliquant à un chef politique lafaçon de sauvegarder son pouvoir et même d'accéder à la gloire. L'idée d'un tel ouvrage, constitué par des conseils adressés à un prince, n'était pas neuve en elle-même.

Il existait déjà de nombreux « miroirs des princes » et Machiavel s'insère donc dans une tradition.

Mais il rompit avec l'usage et provoqua le scandale par la manière dont il aborda leproblème.

On vit en lui une nouvelle incarnation de Satan et, aujourd'hui encore, quelquescommentateurs continuent de le considérer comme un « apôtre du mal ». Le discours humaniste du temps, que récuse Machiavel , s'inspirait des moralistes latins et notamment de Cicéron .

Pour ce dernier et ceux qui se rattachaient à sa pensée au XV ième, la gloire du chef reposait sur une bonne gestion allant de pair avec une conduite vertueuse, cadconforme aux exigences de la morale. Machiavel s'inscrit en faux contre cette thèse.

Le souci premier du Prince doit être de conserver son pouvoir et même de l'accroître à l'occasion.

Si les hommes étaient bons, il pourraitle faire sans jamais s'écarter des grands principes moraux universellement admis.

Mais les hommessont pour la plupart méchants quand on ne les force pas à être bons.

En conséquence, le Princesera vertueux, au sens courant du terme, si le contexte le permet, et il ne le sera pas si la situationle lui impose.

En cas de nécessité, il pourra faire des entorses aux grands principes.

Il lui seraloisible d'agir contre la parole donnée, contre la charité, contre l'humanité (le respect de l'homme)et même contre la religion.

La fin justifie les moyens. Cette idée est exprimée en plusieurs endroits du « Prince » et de « Discours sur la première décade de Tite-Live », et, en particulier, dans le chapitre XV du « Prince » : « Car qui veut entièrement faire profession d'homme de bien, il ne peut éviter sa perte parmi tant d'autres qui ne sont pas bons.

Aussi est-il nécessaire au Prince qui se veut conserver qu'il apprenne à pouvoir n'être pas bon, et d'en user ou n'user pas selon lanécessité. ». Après avoir, dans les premières pages du « Prince », envisagé les différentes formes de gouvernement, Machiavel décide de centrer son propos sur la situation qui peut paraître la plus précaire, celle d'un prince nouveau et qui a été mis en place par une armée étrangère.

Quelsprincipes doit mettre en œuvre ce prince pour se conserver et pour conserver son pouvoir ? Le « Prince » tout entier se propose de répondre à cette question. Machiavel pense que l'on peut tirer des leçons de l'histoire.

En étudiant le comportement des grands hommes, en analysant les causes de leurs échecs ou de leurs succès, il est possible de dégager les principes sur lesquels pourra se fonder une action politique.

Sa conclusion estclaire : on ne fait pas de bonne politique avec de bons sentiments. Il n'est pas important pour le « Prince » d'être bon ou de ne pas l'être.

Celui-ci doit avoir la ruse du renard « pour connaître les filets » et la force du lion « pour faire peur aux loups ».

L'exemple à suivre est celui de l'empereur Sévère qui « fut un très féroce lion et un très astucieux renard ». « Il faut donc savoir qu'il y a deux manières de combattre, l'une par des lois, l'autre par la force ; la première forme est propre aux hommes, la seconde propre aux bêtes ; comme la première bien souvent ne suffit pas, il faut recourir à la seconde.

Ce pourquoi est nécessaire au Prince desavoir bien pratiquer la bête et l'homme. » La même idée que la fin justifie les moyens est exprimée dans les « Discours » : « Un esprit sage ne condamnera jamais quelqu'un pour avoir usé d'un moyen hors des règles ordinaires pour régler une monarchie ou pour fonder une république.

Ce qui est à désirer, c'est que si le faitl'accuse, le résultat l'excuse. » Ce réalisme, bien loin de la morale humaniste ou de la morale chrétienne, apparaît, à première vue, tout à fait dénué de machiavélisme. Dans son acception courante, ce terme évoque, en effet, des manœuvres tortueuses, le recours au secret.

Rien de tout cela ici, mais seulement unexposé lucide dans lequel il n'est pas toujours facile de percevoir la marge d'ironie.

Ce « machiavélisme » apparaît cependant dans les conseils complémentaires.

Le prince doit « savoir entrer dans le mal s'il y a nécessité », mais il veillera cependant à sauver sa réputation.

Il fera prendre les mesures impopulaires par quelqu'un d'autre, se réservant celles qui ont la faveur du peuple.

Il sera renard : « Mais il est besoin de savoir bien colorer cette nature, bien feindre et bien déguiser. » Machiavel ajoute que les hommes sont si simples et tant soumis aux nécessités du présent que celui qui trompe trouvera toujours quelqu'un prêt à se laisser tromper.

Il importe donc avant tout de préserver ce que l'on n ‘appelait pasencore son « image de marque » : « il n'est donc pas nécessaire à un Prince d'avoir toutes les qualités dessus nommées, mais bien il faut qu'il paraisse les avoir. » Un exemple parmi d'autres de ces pratiques, qui laissa Machiavel frappé de stupeur, mais sans doute aussi admiratif : César Borgia , pour faire régner l'ordre en Romagne , donna toute puissance à l'un de ses hommes de confiance connu pour être cruel & expéditif.

La paix établie, pour éviter que l'opprobre ne s'attache à sa propre personne, il fit exécuter l'officier, exposant son corps coupé en deux morceaux sur une placepublique.

Bel exemple de duplicité et de détermination.

Borgia possédait la « virtù ». Le Prince ne se souciera donc pas de ce qu'exige la morale, mais il veillera à manipuler l'opinion pour asseoir sa réputation.

La chose est aisée du fait de la crédulité du peuple.

« Les hommes, en général, jugent plutôt aux mains qu'aux yeux. » « Qu'un Prince donc se propose pour but de vaincre, et de maintenir l'Etat ; les moyens seront toujours estimés honorables et loués de. »

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