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L'artiste imitateur de PLATON

Publié le 05/01/2020

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platon
S'entretenant avec Glaucon, Socrate oppose l’homme sage et modéré qui sait faire appel à sa raison devant l'adversité et, en général, devant ce qui l'affecte à celui qui reste soumis à la passion et en est victime. L'art, ou du moins certains types d'art, nuisent, pour lui, à l'exercice de la raison.
 
Socrate : Or, c’est, dirons-nous, le meilleur élément de nous-mêmes qui veut suivre la raison.
 
Glaucon : Évidemment.
S.: Et celui qui nous porte à la ressouvenance du malheur et aux plaintes, dont il ne peut se rassasier, ne dirons-nous pas que c’est un élément déraisonnable, paresseux, et ami de la lâcheté ?
 
G.: Nous le dirons, assurément.
 
S.: Or, le caractère irritable se prête à des imitations nombreuses et variées, tandis que le caractère sage et tranquille, toujours égal à lui-même, n’est pas facile à imiter, ni, une fois rendu, facile à comprendre, surtout dans une assemblée en fête, et pour les hommes de toute sorte qui se trouvent réunis dans les théâtres ; car l’imitation qu’on leur offrirait ainsi serait celle de sentiments qui leur sont étrangers.
 
G.: Certainement.
 
S.: Dès lors, il est évident que le poète imitateur n’est point porté par nature vers un pareil caractère de l’âme, et que son talent ne s’attache point à lui plaire, puisqu’il veut s’illustrer parmi la multitude ; au contraire, il est porté vers le caractère irritable et divers, parce que celui-ci est facile à imiter.
 
G.: C’est évident.
 
S.: Nous pouvons donc à bon droit le censurer et le regarder comme le pendant du peintre ; il lui ressemble en ce qu’il ne produit que des ouvrages sans valeur, au point de vue de la vérité, et il lui ressemble encore du fait qu’il a commerce avec l’élément inférieur de l’âme, et non avec le meilleur. Ainsi, nous voilà bien fondés à ne pas le recevoir dans un Etat qui soit régi par des lois sages, puisqu’il réveille, nourrit et fortifie le mauvais élément de l’âme, et ruine de la sorte l’élément raisonnable, comme cela a lieu dans une cité qu’on livre aux méchants en les laissant devenir forts, et en faisant périr les hommes les plus estimables ; de même, du poète imitateur nous dirons qu’il introduit un mauvais gouvernement dans l’âme de chaque individu, en flattant ce qu’il y a en elle de déraisonnable, ce qui est incapable de distinguer le plus grand du plus petit, qui, au contraire, regarde les mêmes objets comme tantôt grands, tantôt comme petits, qui ne produit que des fantômes et se trouve à une distance infinie du vrai.
 
Platon, République, livre X, 604d-605d, trad. R. Baccou, Garnier-Flammarion, 1966, p. 370.

platon

« S.: Et celui qui nous porte à la ressouvenance du malheur et aux plaintes, dont il ne peut se rassasier, ne dirons-nous pas que c'est un élément déraisonnable, paresseux, et ami de la lâcheté ? G.: Nous le dirons, assurément.

S.: Or, le caractère irritable se prête à des imitations nombreuses et variées, tandis que le caractère sage et tranquille, toujours égal à lui-même, n'est pas facile à imiter, ni, une fois rendu, facile à comprendre, surtout dans une assemblée en fête, et pour les hommes de toute sorte qui se trouvent réunis dans les théâtres; car l'imita­ tion qu'on leur offrirait ainsi serait celle de sentiments qui leur sont étrangers.

G.: Certainement.

S.: Dès lors, il est évident que le poète imitateur n'est point porté par nature vers un pareil caractère de l'âme, et que son talent ne s'attache point à lui plaire, puisqu'il veut s'illustrer parmi la mul­ titude; au contraire, il est porté vers le caractère irritable et divers, parce que celui-ci est facile à imiter.

G.: C'est évident.

S.: Nous pouvons donc à bon droit le censurer et le regarder comme le pendant du peintre; il lui ressemble en ce qu'il ne pro­ duit que des ouvrages sans valeur, au point de vue de la vérité, et il lui ressemble encore du fait qu'il a commerce avec l'élément inférieur de l'âme, et non avec le meilleur.

Ainsi, nous voilà bien fondés à ne pas le recevoir dans un État qui soit régi par des lois sages, puisqu'il réveille, nourrit et fortifie le mauvais élément de l'âme, et ruine de la sorte l'élément raisonnable, comme cela a lieu dàns une cité qu'on livre aux méchants en les laissant devenir forts, et en faisant périr les hommes les plus estimables ; de même, du poète imitateur nous dirons qu'il introduit un mauvais gouvernement dans l'âme de chaque individu, en flattant ce qu'il y a en elle de déraisonnable, ce qui est incapable de distinguer le plus grand du plus petit, qui, au contraire, regarde les mêmes objets comme tan­ tôt grands, tantôt comme petits, qui ne produit que des fantômes et se trouve à une distance infinie du vrai.

PLATON, République, livre X, 604d-605d, trad.

R.

Baccou, Garnier-Flammarion, 1966, p.

370.. »

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