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Le beau est aussi une propriété des œuvres de G.-W. F. HEGEL

Publié le 05/01/2020

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La reconnaissance du caractère spécifique du sentiment esthétique, ainsi que nous venons de le voir, est indispensable. Toutefois, la réflexion sur l'art ne saurait s'épuiser dans l'analyse des sentiments provoqués par les œuvres, comme la mauvaise critique nous en donne trop souvent l'illustration. Le sentiment du beau peut aussi avoir un fondement objectif.

 

En s’engageant à propos de l’art dans l’étude des sentiments, on se heurte à des généralités dépourvues de contenu. Le contenu propre de l’œuvre d’art doit rester en dehors de ces considérations, sous peine de ne pas être ce qu’il doit être.

 

En disant que chaque forme de sentiment a son contenu, on n’énonce rien sur la nature essentielle et précise du sentiment, lequel reste un état purement subjectif, un milieu des plus abstraits dans lequel la chose concrète disparaît. Le point principal est celui-ci : le sentiment est subjectif, mais l’œuvre d’art doit avoir un caractère d’universalité, d’objectivité. En la contemplant, je dois pouvoir m’y plonger, jusqu’à m’oublier moi-même ; mais le sentiment a toujours un côté particulier, et c’est pourquoi les hommes ressentent si facilement. L’œuvre d’art doit, comme la religion, nous faire oublier le particulier pendant que nous sommes en train de l’examiner; en l’examinant à la lumière du sentiment, nous ne considérons pas la chose en elle même, mais nous-mêmes avec nos particularités subjectives. Du fait que l’attention se trouve concentrée sur les petites particularités du sujet, un pareil examen devient une occupation fastidieuse, désagréable.

Une réflexion qui se rattache à ce que nous venons de dire est celle-ci : l’art a un but qui lui est commun avec beaucoup d’autres manifestations de l’esprit et qui consiste à s’adresser aux sens et à éveiller, susciter des sentiments. Et pour être plus précis, on ajoute que l’art est fait pour éveiller en nous le sentiment du beau. Ce sens ne serait pas inhérent à l’homme, en tant qu’instinct, ou comme quelque chose qui lui serait imparti par la nature et qu’il posséderait dès sa naissance, comme il possède ses organes, l’œil par exemple. Non, il s’agirait d’un sens qui a besoin d’être formé et qui, une fois formé, deviendrait ce qu’on appelle le goût.

 

G.-W. Friedrich Hegel, Introduction à VEsthétique (1835), coll. «Champs», Aubier-Montaigne, 1964, p. 83-84, © Hegel G. W. F., trad. S. Jankélévitch.

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« Une réflexion qui se rattache à ce que nous venons de dire est celle-ci: l'art a un but qui lui est commun avec beaucoup d'autres manifestations de l'esprit et qui consiste à s'adresser aux sens et à éveiller, susciter des sentiments.

Et pour être plus précis, on ajoute que l'art est fait pour éveiller en nous le sentiment du beau.

Ce sens ne serait pas inhérent à l'homme, en tant qu'instinct, ou comme quelque chose qui lui serait imparti par la nature et qu'il posséde­ rait dès sa naissance, comme il possède ses organes, l'œil par exemple.

Non, il s'agirait d'un sens qui a besoin d'être formé et qui, une fois formé, deviendrait ce qu'on appelle le goût.

G.-W.

Friedrich HEGEL, Introduction à l' Esthétique (1835), coll.

«Champs», Aubier-Montaigne, 1964, p.

83-84, ©Hegel G.

W.

R, trad.

S.

Jankélévitch.

POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXi E Il convient de distinguer dans cet extrait deux aspects : la mise en garde contre une pseudo-réflexion sur l'art qui consiste à étudier les sentiments subjectifs en oubliant la chose elle-même; une théorie du goût qui fait ressortir son insuffisance et annonce un dépassement de l'esthétique (voir texte précédent) vers une philosophie de l'art.

Le rôle de l'esthétique ne peut être seulement de rendre compte du sentiment subjectif.

Quel intérêt cela peut-il avoir, de détailler le pourquoi de telle préférence? La raison d'être peut s'en trouver dans les hasards d'une existence, il est pos­ sible d'exprimer les mille facettes du sentiment éprouvé, mais cela n'apprendra rien sur ce qui, dans l'œuvre, du côté objectif, et non subjectif, au sens de particulier, justifie ce sentiment, et qui est, pour Hegel, l'essentiel.

Pour cette rai­ son, l'artiste commet une erreur fatale en se réglant sur le désir supposé d'un public pour réaliser son œuvre: « Le contenu propre de l'œuvre d'art doit rester en dehors de ces considérations.)) Loin d'être exaltée, la particularité du senti­ ment individuel disparaît dans la contemplation de l'œuvre.

Celle-ci abolit la limite que représentent pour chacun son his­ toire personnelle et l'étroite sphère de ses préoccupations pour le faire accéder à un sentiment d'une valeur universelle : c'est ce qui justifie la comparaison entre l'art et la religion.

Accéder à cette valeur universelle de l'œuvre d'art sup­ pose d'ailleurs autre chose que la simple capacité d'éprou- 20. »

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