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Le langage sert-il à exprimer le réel ?

Publié le 01/11/2005

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langage
Par exemple, un enfant dira sans doute que la table est haute. Dans ce cas, il dit bien la vérité puisque sa représentation de la table correspond bien au fait qu'elle soit haute pour lui. On a donc deux vérités opposées pour le même état de chose. On peut également imaginer un modèle géant de table basse, par exemple dans un musée. La table est en un sens basse, en un autre haute, et la proposition « la table est basse » ne permet pas en elle-même de dire de quel sens il s'agit, en quel sens on parle. Dans cette perspective, le langage perd sa fonction d'expression de la réalité, dans la mesure où plusieurs expressions prédicatives peuvent se contredire.    III - Le langage comme producteur de la réalité Nous pourrions aller jusqu'à inverser le rapport entre langage et réalité : le journaliste et dramaturge Karl Kraus menait au début du 20ème siècle à Vienne une critique sévère de l'institution que constitue le Journal. Le journal sélectionne les événements qu'il évoque pour les critiquer, les encenser ou seulement en communiquer l'existence au lecteur. La thèse de Kraus consiste à dire qu'aucun événement n'en est un en lui-même. Au contraire, c'est le journal qui a le pouvoir de transformer un fait complètement anodin en événement mondial.
Analyse du sujet :
  • Le sujet pose une question à laquelle nous sommes invités à répondre par « oui «, « non «, ou de manière nuancée, ceci à chaque fois avec les références qui s'imposent et de manière argumentée.
  • La question porte sur ce à quoi « sert « le langage, c'est-à-dire son utilité. Plus précisément, elle demande si la fonction du langage est une fonction d'expression, autre notion capitale de notre sujet.
  • La notion de langage doit être distinguée de celle de parole, qui désigne dans son acception courante une faculté de l'homme ou, lorsque nous parlons d'une parole en particulier, ce qui est prononcé dans le langage parlé. Le langage ne se réduit pas à un ensemble de paroles prononcées : il peut être écrit, il peut être gestuel (langage des signes), il peut être informatique (langage de programmation), etc.
  • Le langage n'est pas non plus la langue : celle-ci résulte d'un ensemble de conventions de prime abord lexicales qui régissent l'utilisation correcte des mots qui la composent, alors qu'un langage, on l'a dit, n'est pas nécessairement lié à des mots.
  • Parole et langue demeurent cependant toutes deux liées au langage dans la mesure où un sens, une signification, y est chaque fois exprimé. Le simple cri est dénué de sens et n'est de ce fait pas une parole. Une juxtaposition de mots qui contrevient aux règles de syntaxe n'a pas non plus de sens et n'appartient alors pas à une langue en particulier même si elle lui emprunte ses constituants (les mots). De même, un langage, pour mériter ce nom, doit permettre par l'utilisation des règles qui le régissent de signifier quelque chose.
  • La réalité désigne ce qui existe réellement, ce qui est de manière effective et non seulement idéale ou possible.
 
 
Problématisation :
La question directrice est la suivante : le langage a-t-il pour fonction d'exprimer ce qui est de manière effective, c'est-à-dire la réalité ? Nous distinguons les problèmes suivants :
Premièrement, si le langage permet l'expression d'une signification, est-ce bien la signification de ce qu'est la réalité qui est alors exprimée ? Le langage ne sert-il pas également par exemple à l'expression des sentiments ? La question est donc celle de l'identification de ce à quoi peut servir le langage.
Le second problème que nous rencontrons concerne la possibilité d'un rapport entre langage et réalité. Comment être certain que c'est bien de la réalité que nous rendons compte par l'expression dans un langage ?
 

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« Plus précisément, la proposition « cette table est basse » exprime dans le langage la relation entre le concept detable (sujet) et celui de sa hauteur (prédicat), relation qui au plan du réel correspond si la propriété est vraie à larelation entre la table réelle et le fait qu'elle soit basse.Un présupposé majeur soutient cette conception : il faudrait que l'état de chose correspondant à la hauteur de latable, c'est-à-dire le fait qu'elle soit basse, puisse contenir en lui-même ses propres conditions de vérification : latable réelle doit contenir la propriété réelle d'être basse.

Le problème est alors la multiplicité des emplois possiblesdes adjectifs comme « basse » dans le langage.

Par exemple, un enfant dira sans doute que la table est haute.Dans ce cas, il dit bien la vérité puisque sa représentation de la table correspond bien au fait qu'elle soit haute pourlui.

On a donc deux vérités opposées pour le même état de chose.

On peut également imaginer un modèle géant detable basse, par exemple dans un musée.

La table est en un sens basse, en un autre haute, et la proposition « latable est basse » ne permet pas en elle-même de dire de quel sens il s'agit, en quel sens on parle.Dans cette perspective, le langage perd sa fonction d'expression de la réalité, dans la mesure où plusieursexpressions prédicatives peuvent se contredire.

III – Le langage comme producteur de la réalité Nous pourrions aller jusqu'à inverser le rapport entre langage et réalité : le journaliste et dramaturge Karl Krausmenait au début du 20 ème siècle à Vienne une critique sévère de l'institution que constitue le Journal.

Le journal sélectionne les événements qu'il évoque pour les critiquer, les encenser ou seulement en communiquer l'existence aulecteur.

La thèse de Kraus consiste à dire qu'aucun événement n'en est un en lui-même.

Au contraire, c'est lejournal qui a le pouvoir de transformer un fait complètement anodin en événement mondial.

En ce sens, la pressedécide de ce qui doit avoir de l'importance et de ce qui n'en a pas, elle produit donc la réalité en sélectionnant ceque nous devons savoir et ce qui, selon elle, ne mérite pas d'être su.

Pour reprendre les mots de André Hirt quicomment Kraus, le pouvoir du journal relève de la magie noire.Le langage, par conséquent, pour autant qu'il est véhiculé par une institution telle que le journal, est producteur deréalité mais n'exprime en aucune manière une réalité qui lui préexisterait.

Pour le dire autrement et en s'intéressant àune échelle plus restreinte : imaginons un fait bien réel, par exemple, l'envol d'une nuée d'oiseaux à 4h12 sur le lacde Constance.

Celui-ci n'aura d'existence réel que s'il est identifié et si on en rend compte dans une expression dulangage.

Envisageons l'exemple inverse : un journaliste relate en première page un fait qui n'a pas eu lieu mais iln'est jamais démasqué.

Le scandale ainsi provoqué aura pourtant des conséquences bien réelles.

Dans ce derniercas, et dans tout cas d'imprécision du langage au regard des faits qu'il est censé exprimer, le langage estproducteur d'une réalité, ou du moins de ce que tout le monde pensera être la réalité.

Le faux ou l'inexistant peutdevenir vrai et réel.

Conclusion : Nous avons montré premièrement que l'expression n'était pas l'unique fonction du langage ; deuxièmement, qu'aucunétat de fait ne contenait en lui-même les conditions de vérification de sa vérité, et par conséquent de sa réalité.

Sion ajoute à cela les conclusions de notre troisième partie, alors nous sommes obligés d'admettre que le langage estnon plus parfois mais toujours producteur de la réalité : il est en effet d'une part incapable de dire ce qui est, c'est-à-dire de rendre compte d'un état de fait qui serait réel, et il possède d'autre part le pouvoir de faire être ce quin'est pas.

Le langage, dans cette perspective, s'apparente fortement au verbe divin, à qui traditionnellement nousaccordons le pouvoir de poser les choses dans l'existence.. »

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