Devoir de Philosophie

Le Moi N'est Pas Maître Dans Sa Propre Maison

Publié le 05/12/2010

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Introduction:

 

La philosophie, en tant que discipline, existe depuis l'Antiquité grecque, c'est à dire depuis déjà trois mille ans. Elle est née grâce à un désir profond de l'être humain de comprendre le monde où il vit, la raison de son existence, les buts de la vie… Les "amoureux  de la sagesse" (sens étymologique du terme philosophe) se sont, à cette époque lointaine déjà,  penchés sur les questions du rôle du conscient et de l'inconscient, de leur influence sur les actions et la vie de l'Homme. Ces questions sont devenues particulièrement actuelles au lendemain de la première guerre mondiale. À cette époque, certains philosophes, Sigmund Freud notamment, ont tenté d'expliquer les raisons qui ont poussé l'être humain à se montrer aussi cruel et sanguinaire pendant la guerre. C'est dans ce contexte que Freud a affirmé que "Le moi n'[était] pas maître dans sa propre maison". Par cette phrase, le père de la psychanalyse voulait montrer que la partie consciente de l'Homme, n'est pas la seule à gouverner ses actions et  pensées, qu'elle n'est pas maîtresse de son âme. La raison régit-elle complètement notre vie?   Nous verrons que, si au premier abord, l'être humain semble être seul maître de soi même, sa raison peut parfois être dépassée par son propre inconscient, voire par des agents extérieurs.

 

I/  La raison, la conscience régit dans la plupart des cas la vie de l'Homme 

 

1/ Tout d'abord, l'être humain est le seul apte à maîtriser sa pensée,  Personne ne peut savoir  ce que l'autre pense, personne ne peut empêcher de penser. L'être humain prévoit la grande majorité de ses actions: il est capable de planifier, d'analyser ce qu'il a fait, de tirer des conclusions pour le futur. On peut donc dire que la majorité de ce qu'il fait est dicté par la raison même. 

 

2/ La décision finale appartient à l'individu même. La majeure partie des actions accomplies par l'être humain sont pensées, planifiées. Même si ce n'est pas le cas, ou si quelqu'un l'oblige à accomplir quelque chose, le dernier choix (obéir ou non, fuir ou rester…) appartient toujours à l'individus en question. 

 

ex: L'Histoire connaît grand nombre d'exemples de gens qui ont su résister aux tentatives des régimes totalitaires de forcer l'ensemble de la population à adhérer à l'idéologie officielle, qui ont combattu contre ce qu'ils voyaient comme mal grâce à leur raison, à leur conscient. Ainsi dans le Journal d'Anne Frank il est question de familles hollandaises ayant caché une famille juive  pendant l'occupation nazie. La propagande officielle les incitait à rendre cette famille aux nazis, ce qu'ils n'ont pas fait, malgré la menace d'être exécuté  pour aide aux juifs... Dans ce cas la décision finale n'appartenait qu'aux familles hollandaises en question. La raison a triomphé: elles ont aidé Anne Frank et sa famille, malgré la propagande et les interdits. 

 

Si la raison est bien souvent maîtresse de nos actes, certaines choses, cependant, lui échappent.

 

II/ Certaines choses échappent néanmoins à la conscience humaine

 

1/  En premier lieu, les maladies psychiques empêchent la partie consciente de l'être humain de fonctionner correctement. Le malade ne peut plus raisonner correctement, il est emporté par celles-ci : ses pensées (et donc ses actions) sont alors indépendantes de sa raison, qui ne peut plus rien contrôler.

 

ex: Ainsi, lors d'une maladie telle que la schizophrénie, la perception de la réalité est altérée ce qui entraîne des dysfonctionnements sociaux et comportementaux. La raison n'y peut plus rien, son activité normale est déstabilisée. Le "moi" n'est plus maître de l'Homme. Il en est de même dans le cas des dépressions: celui qui en souffre n'a plus la possibilité de voir les aspects positifs, il ne peut pas apprécier la vie, car sa maladie l'en empêche.

 

2/  En outre, l'instinct et l'intuition, qui sont régis par notre inconscient,  échappent totalement au contrôle de la raison. L'Homme étant avant tout un mammifère, il possède en commun avec tous les animaux bon nombre comportements innés qu'il ne peut maîtriser grâce à la raison. 

 

ex 1: L'instinct de survie est bien souvent plus fort que tout facteur dicté par le conscient.  (C'est bien pour cela qu'il est impossible de se suicider en s'empêchant de respirer….).

ex 2: L'intuition nous permet de prendre des décisions sans consulter notre conscient, notre raison.  André Suarès a d'ailleurs affirmé que "L'intuition [était] une vue du coeur dans les ténèbres" L'auteur dit par cette phrase que l'intuition est ce qui permet de sentir sans comprendre, donc sans utiliser la raison.

 

3/ De plus, on ne peut pas contrôler les sentiments. Ceux-ci appartiennent en effet à la sphère de l'inconscient et ne dépendent pas de nous.

 

ex: Il est impossible de contrôler l'amour, la peur, la colère, l'angoisse. On peut certes les atténuer ou, au contraire les accroître, mais on ne peut pas les faire apparaître ou disparaître chez soi-même. Jean Paul Sartre, a par ailleurs très justement dit que : "Nous appellerons émotion une chute brusque de la conscience dans le magique." Par le mot "magique" on peut ici comprendre l'inconscient, l'incontrôlable…

 

Après s'être penché sur les limites de la conscience humaine , il conviendrait de s'intéresser également aux agents extérieurs qui influencent  le conscient de l'Homme, contestant son rôle de maître…

 

III/  La conscience d'un être humain, son "moi",  peut être modelée par des facteurs extérieurs

 

1/ En premier lieu, l'éducation, qu'elle soit scolaire ou familiale, influence fortement la conscience de l'être humain. Dès sa naissance l'être humain se voit inculquer des principes moraux, des valeurs qu'il va, bien souvent garder toute sa vie. Il va alors agir, penser, juger en accord avec ceux-ci…

 

ex: John Locke, célèbre philosophe anglais des Lumières a affirmé: "Je crois pouvoir dire que les neuf dixièmes des hommes que nous connaissons, sont ce qu'ils sont, bons ou mauvais, utiles ou nuisibles, par l'effet de leur éducation." On voit facilement, à travers cette phrase, que l'être humain est ce qu'il est parce que l'on l'a poussé à être comme cela. Son "moi" n'est donc pas "maître dans sa propre maison", vu qu'il a été influencé par des règles qui lui ont été imposées dès son plus jeune âge.

 

2/  De plus, l'entourage, la société conditionnent la conscience humaine. L'être humain n'est pas un animal solitaire, il vit en communautés. Les règles établies par celles-ci, les actions entreprises par d'autres membres de ce groupe influencent grandement son mode de pensée, sa conscience. L'être humain agira alors très souvent soit en fonction des règles définies par la société, soit en accord avec ce que ses congénères font ou ne font pas. 

 

ex: L'effet de foule illustre l'impact que la société peut avoir sur l'être humain. Lorsqu'un Homme est entraîné par la foule, il n'a plus aucune maîtrise de soi même: il imite les autres et devient, tout simplement, le maillon d'une chaîne. L'idée véhiculée par la foule prend le dessus sur sa propre raison. Bon nombre d'hommes politiques s'en sont servis en galvanisant la foule par des discours accessibles et très théâtraux ce qui leur permettait de s'assurer du support de celle-ci. C'est notamment le cas de Mussolini ou d'Hitler.

 

3/ Enfin, le conscient, le raisonnement de l'individu peut, bien souvent, être, altéré par des doctrines, des idéologies, qu'elles soient religieuses ou politiques. L'individu est alors endoctriné, soumis à une pensée qui lui était étrangère à l'origine. Il adopte alors bien souvent cette pensée malgré lui, abandonnant tout esprit critique; il peut alors même devenir fanatique. 

 

ex: George Orwell, dans sa célèbre dystopie 1984   développe l'idée de l'influence que peuvent avoir les idéologies sur l'Homme à l'extrême, décrivant un régime qui empêche l'être humain de penser, d'être maître de soi même, en utilisant la propagande, la pression psychologique et en réduisant même le langage au minimum. Si, dans ce cas, il s'agit d'un régime inventé par l'auteur, le roman a été inspiré par des régimes totalitaires qui ont, eux, bel et bien existé (nazisme, stalinisme, maoïsme…). D'autres romans tels que L'Archipel Goulag de Soljenitsyne ou Fahrenheit 451   de Ray Bradbury évoquent également les effets de ce type de  régimes sur la conscience humaine.

 

Conclusion:

 

Nous avons vu que si l'Homme semble pouvoir contrôler sa pensée et si sa raison est la principale responsable de ses actes, sa propre conscience ne peut pas être tenue pour son maître absolu, vu qu'elle n'a aucun contrôle sur ce qui est régi par l'inconscient (les sentiments, l'instinct…) et qu'elle peut être fortement influencée par des facteurs indépendants tels que l'éducation, la société ou encore l'idéologie.

 

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