Devoir de Philosophie

Les mots ne sont-ils que des mots ?

Publié le 06/04/2005

Extrait du document

        Proposition de plan :   I - Est-ce le mot qui permet de produire du sens ?   Wittgenstein, dans les Recherches philosophiques, adopte une position critique à l'égard du nominalisme, et notamment ce qu'il appelle la conception augustinienne du langage : la signification d'un mot n'est pas nécessairement ce que le mot semble de prime abord désigner, parce que le mot ne désigne justement à lui seul rien de déterminé. Lorsque je dis : « ceci est un marteau », je désigne quelque chose de différent si je suis en train de bricoler ou si je suis accordeur de piano. La thèse de Wittgenstein est double : premièrement, aucun mot ne possède en-soi sa signification, mais prend sa signification dans un contexte particulier. Deuxièmement, le contexte en question n'est pas uniquement un contexte lexical (comme la proposition, régit par les règles de grammaire) mais une situation bien réelle (par exemple, la pratique d'une activité). En effet, la proposition « ceci est un marteau » que nous avons pris pour exemple constitue le contexte lexical dans lequel le mot « marteau » est utilisé mais ne suffit pas à déterminer ce que « marteau » signifie, malgré le fait qu'elle soit grammaticalement correcte. La conclusion de Wittgenstein est tautologique : la signification, dit-il, c'est l'explication de la signification, c'est-à-dire l'explication de l'usage concret (en situation réelle) du mot. Par conséquent, le mot ne permet pas en lui-même de produire une signification, puisqu'il ne signifie rien en lui-même : c'est bien plutôt l'usage du mot qui produit la signification. Le mot pourrait très bien être remplacé par un autre de manière arbitraire, pour autant que nous nous mettions d'accord sur son usage. Alors nous nous comprenons et savons ce que ce mot signifie.

Analyse du sujet :

·         Le sujet prend la forme d'une question fermée, à laquelle il s'agira de répondre par « oui « ou « non « en conclusion, au terme d'une argumentation documentée.

·         La difficulté majeure du sujet tient au fait que le concept de « mot « n'est pas d'emblée une notion philosophique.

·         Le mot est l'élément de base à partir duquel on peut, lorsqu'il est écrit, composer des textes (romans, slogans, liste de courses, etc.), lorsqu'il est prononcé, tenir des conversations, produire des discours, etc. On dira donc qu'il est le constituant ultime du discours au sens large.

·         Un discours, pour mériter ce nom, ne doit pas être absurde : il doit posséder une signification. Aussi ne se réduit-il pas à un ensemble anarchique de mots. Si, au sein du discours, certains mots peuvent être isolés, comme des interjections (« aie ! «), des ordres (« debout ! «) ou des approbations (« oui «, « miam «), la plupart d'entre eux sont organisés en propositions en dehors desquelles on ne peut pas déterminer leur signification. L'ensemble des règles qui régissent l'organisation des mots est la grammaire.

·         On peut distinguer plusieurs types de mots, en particulier : les noms, les adjectifs et les verbes. Les noms peuvent renvoyer à des choses, des personnes, des idées, concepts, etc. Les adjectifs désignent des propriétés de ce à quoi renvoient les noms. Les verbes désignent entre autres des actions.

·         D'une manière générale, le mot possède cette capacité de renvoyer à quelque chose parce qu'il est un signe linguistique, c'est-à-dire l'union d'un signifiant (forme graphique ou phonique du mot) et d'un signifié (la signification à laquelle il renvoie).

·         Il s'agit de déterminer si le mot est plus que ce qu'il est ou paraît être, autrement dit s'il se réduit à un simple composant. Lorsqu'on dit de quelque chose : « ce ne sont que des mots ! «, on suggère justement que le mot en lui-même n'est rien, qu'il ne possède aucune effectivité, aucun pouvoir.

Problématisation :

Si le mot n'est rien, c'est pourtant par son biais que nous désignons toute choses, que nous communiquons, etc. Est-ce à dire que le mot n'a aucun rôle dans ces deux exemples de situation ? La première question pourrait être formulée ainsi :

I – Est-ce le mot qui permet de produire du sens ?

Envisagé comme signe linguistique, le mot apparaît être ce par quoi on peut désigner telle ou telle chose, action, qualité : il est donc avec la perception un biais par lequel nous entrons pour ainsi dire en contact avec le réel. La question est alors de savoir :

II – Quel rapport le mot entretient-il avec la réalité ?

 

« de mots que sont construites toutes nos connaissances théoriques, par exemple physiques, dont la pertinence n'estplus à démontrer ? Si nous acceptons que c'est l'usage d'un mot qui détermine sa signification, ne faut-il pasadmettre que certains usages comme les usages scientifiques sont plus pertinents que d'autres ? C'est la puissancemême des sciences qui le montre.

Mais cela signifie qu'il y a des bons usages et des mauvais usages, autrement dit,qu'il y a de bonnes et de mauvaises significations.

Il y a donc des situations qui requièrent que tel usage soit faitd'un mot plutôt qu'un autre.

Mais alors ce n'est pas l'usage lui-même mais la situation bien réelle et indépendante detout langage qui prime dans la détermination de la signification.

Si l'usage du mot est déterminé par la réalité, lasignification est donc bien déterminée par la réalité.

Cela revient à dire que finalement, il y a des usages (i.e.

dessignifications) qui décrivent plus ou moins bien la réalité.

Les mots ont donc bien le pouvoir de décrire la réalité pourautant que leur usage soit adéquat.On peut en conclure que les mots dans leur usage adéquat ne sont pas de simples mots.

Ils permettent d'établir desconnaissances.

III – Le pouvoir créateur du mot Nous pourrions aller jusqu'à inverser le rapport entre langage et réalité : le journaliste et dramaturge Karl Krausmenait au début du 20 ème siècle à Vienne une critique sévère de l'institution que constitue le Journal.

Le journal sélectionne les événements qu'il évoque pour les critiquer, les encenser ou seulement en communiquer l'existence aulecteur.

La thèse de Kraus consiste à dire qu'aucun événement n'en est un en lui-même.

Au contraire, c'est lejournal qui a le pouvoir de transformer un fait complètement anodin en événement mondial.

En ce sens, la pressedécide de ce qui doit avoir de l'importance et de ce qui n'en a pas, elle produit donc la réalité en sélectionnant ceque nous devons savoir et ce qui, selon elle, ne mérite pas d'être su.

Pour reprendre les mots de André Hirt quicommente Kraus, le pouvoir du journal relève de la magie noire.Le langage, par conséquent, pour autant qu'il est véhiculé par une institution telle que le journal, est producteur deréalité mais n'exprime en aucune manière une réalité qui lui préexisterait.

Pour le dire autrement et en s'intéressant àune échelle plus restreinte : imaginons un fait bien réel, par exemple, l'envol d'une nuée d'oiseaux à 4h12 sur le lacde Constance.

Celui-ci n'aura d'existence réel que s'il est identifié et si on en rend compte dans une expression dulangage.

Envisageons l'exemple inverse : un journaliste relate en première page un fait qui n'a pas eu lieu mais iln'est jamais démasqué.

Le scandale ainsi provoqué aura pourtant des conséquences bien réelles.

Dans ce derniercas, et dans tout cas d'imprécision du langage au regard des faits qu'il est censé exprimer, le langage estproducteur d'une réalité, ou du moins de ce que tout le monde pensera être la réalité.

Le faux ou l'inexistant peutdevenir vrai et réel.Les mots peuvent donc précéder et produire la réalité.

Ils ne sont pas de simples mots mais le principe deproduction de ce qui est.

Conclusion : Les mots, dans cette perspective, s'apparentent fortement au verbe divin, à qui nous accordons traditionnellementle pouvoir de poser les choses dans l'existence.

Un exemple classique est celui du baptême : l'ensemble de mots « jete baptise » a le pouvoir effectif de baptiser, pour autant qu'ils soient prononcés dans la situation adéquate.

Cetteproposition est performative.

Cela montre l'excès possible du mot par rapport à sa propre nature.

Il influe, construit,produit et organise toute la réalité.

Le mot est donc tout sauf un simple mot.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles