L'imagination comme remède au malheur ?
Publié le 08/02/2004
Extrait du document
«
l'imagination apparaît comme la condition d'un bonheur possible, c'est-à-dire d'un bonheur que l'on conçoit et quel'on s'efforce de réaliser.En ce sens, si l'homme n'imaginait pas, il serait incapable de dépasser la réalité présente : il ne pourrait faire aucunusage de sa liberté ; il ne pourrait se construire un avenir conformément à un projet.
Sartre affirme ainsi : « S'il était possible de concevoir un instant une conscience qui n'imaginerait pas, ilfaudrait la concevoir comme totalement engluée dans l'existence et sanspossibilité de saisir autre chose que de l'existant.
»
L'image est généralement pauvre, car elle est un monde en miniature, coupédu vrai monde.
Les éléments qui la constituent tissent entre eux un nombrede rapports finis, à la différence du symbole qui aspire et tend vers leconcept.
De plus, l'image est irréelle, car "les objets n'existent quepour autant qu'on les pense".
Il s'ensuit que la perception d'une choseconcrète et la visée par laquelle notre conscience s'y rapporte sont infinimentplus féconds que la conscience d'une simple image.
L'image se réduitstrictement à la conscience qu'on en a, alors que l'objet perçu débordeconstamment la conscience.
Tout est donné dans l'image, il n'y a rien à enapprendre.
Dans sa transparence, elle est la certitude même.
Un objetimaginaire peut être pensé de trois manières : il est soit inexistant ; soitabsent ; soit existant ailleurs.
C'est à chaque fois une négation qui leconstitue, et une négation de la réalité.
"Poser une image, c'est constituer unobjet en marge de la totalité du réel, c'est donc tenir le réel à distance, s'enaffranchir, en un mot : le nier." Cette mise à distance nécessaire à laconstitution de l'image implique que la conscience soit libre par rapport au réelmême.
La conscience reste inéluctablement dans le monde, mais elle estcapable de le transcender par sa liberté ; cette transcendance et cedépassement ne peuvent se faire que par la négation.
Le néant ne peut être une image, mais l'acte de négation enest sa condition.
B.
L'imagination créatriceCe rôle fondamental de l'imagination dans la construction du projet fait apparaître la dimension créatrice del'imagination : dans l'accomplissement d'un projet, l'imagination construit la réalité et ne s'oppose plus à elle.À cet égard, le – supposé – malheur de l'homme dû à l'imagination n'est plus une donnée éternelle de la conditionhumaine.
Bien au contraire, l'imagination est ce qui permet de dépasser la réalité pour la reconstruire, en faveur d'unbonheur à venir.
Bergson, dans l'Énergie spirituelle, souligne bien cette dimension créatrice de l'imagination : tous lesinventeurs (mécaniciens, écrivains, peintres, musiciens...) construisent leurs inventions à partir d'un schéma del'imagination déterminé à l'avance.
« Rien n'est plus libre que l'imagination humaine; bien qu'elle ne puisse déborder le stock primitif des idées fourniespar les sens externes et internes, elle a un pouvoir illimité de mêler, composer, séparer et diviser ces idées danstoutes les variétés de la fiction et de la rêverie.
» Hume, Enquête sur l'entendement humain, 1748.
« Par l'imagination nous abandonnons le cours ordinaire des choses.
[...] Imaginer c'est s'absenter, c'est s'élancervers une vie nouvelle.
» Bachelard, L'Air et les Songes, 1943.
« Grâce à l'imaginaire, l'imagination est essentiellementouverte, évasive.
Elle est dans le psychisme humain l'expérience même de l'ouverture, l'expérience même de lanouveauté.
» Bachelard, L'Air et les Songes, 1943.
« L'imagination [...], c'est la conscience tout entière en tant qu'elle réalise sa liberté.
» Sartre, L'Imaginaire, 1940.
« L'imagination est la folle du logis.
» Malebranche, De la Recherche de la vérité, 1674-1675.
« Imagination — C'est cette partie dominante dans l'homme, cette maîtresse d'erreur et de fausseté, et d'autantplus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours.
» Pascal, Pensées, 1670 (posth.)
« Les hommes jugent des choses selon la disposition de leur cerveau et les imaginent plutôt qu'ils ne lesconnaissent.
» Spinoza, Éthique, 1677 (posth.).
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