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L'imagination est-elle la plus personnelle de toutes nos facultés intellectuelles ?

Publié le 21/02/2004

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A. Les autres facultés intellectuelles. - Nous considérons ici comme intellectuelles toutes les fonctions psychiques qui collaborent à la connaissance.Si nous réfléchissons au mode d'activité des fonctions perceptives par lesquelles débute la connaissance, il nous sera facile de reconnaître qu'elles sont dans une grande mesure esclaves de l'objet : je ne puis pas voir ce que je veux. Aussi la perception n'est guère personnelle : devant un objet donné, nous voyons tous à peu près la même chose.A peu près seulement, car percevoir n'est pas simplement objectiver la sensation : celle-ci est complétée par des souvenirs grâce auxquels nous interprétons les données sensorielles et pouvons ainsi leur donner une signification personnelle. Mais ces souvenirs ne sont que des images entre lesquelles nous pouvons choisir. Par suite, si la perception n'est pas complètement impersonnelle, c'est que l'imagination intervient.Nous pouvons en dire autant des fonctions mémorielles. Sans doute l'objet n'est pas présent à la mémoire, mais l'esprit qui cherche à se rappeler s'efforce de se rendre présent à l'objet antérieurement perçu : comme la perception, le souvenir reste dépendant de l'objet ; aussi, à moins que l'imagination n'intervienne, une perception également enregistrée dans leur leur mémoire évoquera chez des individus différents des souvenirs à peu près identiques.

« nos désirs.

Elle nous représente le plus souvent une vie dans laquelle serait satisfaite quelqu'une de nos aspirationsles plus profondes.

Même lorsque le pessimiste ne songe que malheurs et insuccès, ce sont ses désirs qui oriententle déroulement de sa pensée, et ii suffira que ses désirs se modifient pour qu'il redoute d'autres malheurs.Or, si la personnalité se forge dans les actes, elle se révèle surtout dans les désirs et dans les rêves.

En effet,beaucoup de tendances profondes de notre nature sont comprimées par les conditions extérieures de notreexistence : ainsi un malingre ne peut guère exercer de cruauté à l'égard de ses semblables, et il est difficile à celuiqui vit seul de se montrer autoritaire.

Les insatisfaits n'en continuent pas moins à tendre vers ce que demande leurnature : ce sont ces tendances qui constituent leur personnalité profonde.

Aussi l'imagination, qui est aux ordres deces impulsions cachées, est-elle plus personnelle que d'autres facultés dont l'exercice dépend de facteurs identiqueschez tous. III.

- POURQUOI L'IMAGINATION EST PLUS PERSONNELLE Mais peut-être pénétrerons-nous plus profondément dans l'intelligence de cette prérogative de l'imagination enobservant ses rapports avec les deux éléments constitutifs de la personne humaine : le corps et l'esprit. A.

Le corps et l'esprit. — Il n'est rien, dans notre vie psychique, qui nous soit aussi personnel que l'affectivité.

Or l'affectivité est conditionnée par l'état organique et c'est le corps qui nous individualise.La thèse de l'individualisation par la matière est assez commune parmi les philosophes ; pour ceux qui la tiennent,nos esprits ne se différencieraient que par le corps qu'ils informent.

N'admettrait-on pas cette théorie, il n'enresterait pas moins vrai que l'activité spirituelle dépend de l'organisme, en sorte que le corps joue au moins un rôleimportant dans notre comportement psychique.On ne peut pas davantage nier que l'organisme conditionne l'affectivité.

Sans admettre la théorie périphérique del'émotion d'après laquelle celle-ci résulterait de la prise de conscience de troubles organiques, il faut bienreconnaître qu'un pur esprit ne sentirait pas comme nous et même que, au sens affectif du terme, il ne sentirait pasdu tout : il verrait, jugerait, approuverait ou condamnerait, mais sans cette chaleur et cette passion dont nous nepouvons jamais nous départir totalement.Or, rien ne nous est plus personnel que notre vie affective.

C'est la douleur qui nous fait éprouver, de la façon laplus irrécusable, la réalité de notre existence.

Rien de plus nôtre que nos peines et que nos joies.

Sans doute, nousaffichons parfois nos idées comme nous caractérisant davantage ; mais nos idées ne s'intègrent le plus souvent quedans un moi superficiel, le moi social, celui que nous voulons paraître.

Aussi il ne suffit pas, pour réaliser ce « nous »de l'amitié qui résulte de la fusion de deux personnes, d'avoir les mêmes opinions ; il faut un unisson affectif.Tandis que le corps nous donne le sentiment de notre personnalité et nous fait sentir ce que les choses sont pournous, l'esprit, au contraire, dans la mesure où il se rend indépendant du corps, désindividualise ou dépersonnalise ence sens qu'il tend à nous donner des représentations universelles et valables pour tous.

Rien de plus impersonnelqu'une observation rigoureusement objective ou qu'un calcul arithmétique, qui peut d'ailleurs être exécuté par unemachine.

Dans la mesure où nous parvenons à penser comme une intelligence pure, notre pensée est valable pourtous les esprits et, par suite, ne nous renseigne pas sur les traits caractéristiques de notre personnalité. B.

Rapports de l'imagination avec l'esprit et avec le corps. — Tandis que l'activité proprement intellectuelle tend à ne mettre en jeu que le seul esprit, l'imagination est le fait du composé humain tout entier, esprit et corps.L'image — qu'on prenne ce mot au sens strict de reproduction mentale d'une sensation ou au sens large de substitutmental de l'objet — est une réalité spirituelle, et l'imagination se classe parmi les fonctions intellectuelles.

Lesreprésentations dont sont tissés nos rêves sont de même nature que celles qui interviennent dans nos recherchesréfléchies ou dans nos raisonnements ; elles n'en diffèrent que par la liberté dont elles jouissent, n'étant pasassujetties aux exigences de la logique.Mais, à vrai dire, si elle échappe aux lois de la logique qui s'imposent à l'esprit, l'imagination ne jouit que d'une fausseliberté, car elle est étroitement soumise à l'affectivité et par là même au corps.

Comme un nuage que rien ne fixe etse laisse porter par le vent, elle suit les impulsions du désir, les variations de l'état organique : une mauvaisedigestion, et on voit tout en noir. Conclusion. — C'est donc tout l'homme qui, dans l'activité imaginative, intervient, plus que dans l'exercice des autres facultés intellectuelles.

Ainsi l'imagination met en jeu notre personne tout entière, et en particulier ce qui, ennous, est le plus nôtre, l'affectivité ; dans ce sens elle est plus personnelle.Mais si nous avions adopté l'autre signification de l'adjectif personnel », nous aurions abouti à une conclusion toutautre, car, lorsque l'activité imaginative est laissée à elle-même, ce n'est pas ce qu'il y a de plus humain dansl'homme, ce qui en fait une personne, qui dirige la vie de l'esprit.

Aussi pour pouvoir sans réserve reconnaître dansl'imagination la plus personnelle de nos facultés, il faudrait qu'une longue pratique de la pensée rationnelle l'ait dansune certaine mesure soumise aux exigences de la raison et pénétrée en quelque sorte de rationalité.. »

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