L'intellection

« la matirn', en tant.

qu'elles représentent des objets matériels déterminés.

C'est ce qu'on exprime en disant qu'elles ne sont pas ùllelligiblPs en actP, c'est-à -dire connaissables comme telles par l'intelligence.

Pour devenir intelligibles en acte, il faut que les images soient élevées au niveau d'immatérialité de l'intelligence, et par conséquent dépouillées de lenrs conditions sensibles, singu­ lières et concrètes.

Cette opération se réalise par une sorte d'illumination des images, qui est la fonction propre de l'intellect agent et constitue l'abstraction intellectuelle.

~L'opération de l'intellect agent produit ce que les Scolas­ tiques appellent une espèce impresse intellectuelle ( species im­ pressa intelligibilis).

Nous avons déjà rencontré et expliqué cette notion d'espèce impresse ( species impressa sensibili8) dans l'étude de la connaissance sensible (132).

Les raisons qui en imposent la réalité dans la connaissance sensible valent a fortiori dans la connaissance intellectuelle.

Toute connaissance implique en effet que la ressemblance de l'objet à connaître soit présente dans la faculté connaissante (condition qui ne fait que définir l'essence même du connaître).

Or, dans la connaissance intellectuelle, l'objet, qur: est originellement de nature sensible, n'est assimilable par l'intelligence que s'il est en quelque sorte immatérialisé 1 • C'est la fonction de l'intellect agent de réaliser cette immatérialisation et de former ainsi la similitude qui, informant l'intellect, le rend capable de connaître en acte.

435 2.

Intellect patient et espèce expresse.

a) L'intellect patient.

L'intellect agent est donc une faculté active qui agit à titre de condition radicale de l'intellection.

L'intelligence proprement dite (faculté passive) est appelée intellect patient, en tant qu'elle reçoit les espèces intelligibles formées par le jeu de l'intellect agent.

Ces espèces intelligibles fécondent, pour ainsi dire, l'intelligence, qui peut dès lors produire l'acte d'intellection ou acte de connaissance intellectuelle, lequel s'achève dans la formation de l'idée proprement dite, appelée aussi par les Scolastiques espèce expresse ( species ex pressa), ou encore verbe mental ( verbum), c'est-à-dire parole intérieure, par laquelle le connaissant se dit à lui-même ce qu'est la chose connue par le moyen de l'espèce impresse.

b) Nécessité de l'espèce expresse.

L'espèce expresse ( verbum, similitudo intellecta, intentio intellecta, concept, idée) est évidem- (1) Cf.

G.

RAREAU, Spec;""· Verbum.

L'aG!ÙJÏ(é intellectuelle élérnentair~ selon saint Thoma> d'Aquin, Paris, 19:!8, J•.

56-61.. »