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NIETZSCHE: Dans l'ensemble, les méthodes scientifiques sont une conquête…

Publié le 27/02/2008

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nietzsche
Dans l'ensemble, les méthodes scientifiques sont une conquête de la recherche pour le moins aussi considérable que n'importe quel autre résultat : c'est en effet sur l'entente de la méthode que repose l'esprit scientifique, et tous les résultats des sciences ne pourraient, si ces méthodes venaient à se perdre, empêcher un nouveau triomphe de la superstition et de l'absurdité. Les gens d'esprit ont beau apprendre autant qu'ils veulent des résultats de la science ; on s'aperçoit toujours à leur conversation, et particulièrement aux hypothèses qu'ils y proposent, que l'esprit scientifique leur fait défaut : ils n'ont pas cette défiance instinctive contre les écarts de la pensée- défiance qui, à la suite d'un long exercice, a pris racine dans l'âme de tout homme de science. Il leur suffit de trouver sur un sujet une hypothèse quelconque, ils sont alors tout feu tout flamme pour elle et croient que tout est dit (...) C'est pourquoi chacun devrait de nos jours avoir appris à connaître au moins une science à fond : alors il saura toujours ce que c'est qu'une méthode et combien est nécessaire la plus grande prudenceNIETZSCHE

Ce texte de Nietzsche a une teneur épistémologique, et pose la question de l’importance de l’acquisition de la méthode en sciences, pour opposer cette acquisition à celle des résultats et relativiser cette seconde acquisition. C’est ainsi qu’il définit ce qu’est l’ « esprit scientifique «.

 

On peut distinguer trois moments dans le texte. Dans le premier, qui va du début à « empêcher un nouveau triomphe de la superstition et de l'absurdité «, Nietzsche définit l’objet du texte – l’importance, en sciences, des questionnements sur la méthode – et la raison pour laquelle il s’intéresse à cet objet – il entend en effet prémunir le monde contre un nouvel âge de superstition.

 

nietzsche

« complète.

L'observateur doit être le photographe des phénomènes, son observation doit représenter exactement lanature.

Il faut observer sans idée préconçue ; l'esprit de l'observateur doit être passif, c'est-à-dire se taire ; ilécoute la nature et écrit sous sa dictée. Mais une fois le fait constaté et le phénomène bien observé, l'idée arrive, le raisonnement intervient etl'expérimentateur apparaît pour interpréter le phénomène.L'expérimentateur (...) est celui qui, en vertu d'une interprétation plus ou moins probable, mais anticipée desphénomènes observés, institue l'expérience de manière que, dans l'ordre logique de ses prévisions, elle fournisse unrésultat qui serve de contrôle à l'hypothèse ou à l'idée préconçue.

Pour cela l'expérimentateur réfléchit, essaye,tâtonne, compare et combine pour trouver les conditions expérimentales les plus propres à atteindre le but qu'il sepropose.

Il faut nécessairement expérimenter avec une idée préconçue.

L'esprit de l'expérimentateur doit être actif,c'est-à-dire qu'il doit interroger la nature et lui poser les questions dans tous les sens, suivant les diverseshypothèses qui lui sont suggérées. Mais, une fois les conditions de l'expérience instituées et mises en uvre d'après l'idée préconçue ou la vue anticipéede l'esprit, il va (...) en résulter une observation provoquée ou préméditée.

Il s'ensuit l'apparition de phénomènesque l'expérimentateur a déterminés, mais qu'il s'agira de constater d'abord, afin de savoir ensuite quel contrôle onpourra en tirer relativement à l'idée expérimentale qui les a fait naître. Or, dès le moment où le résultat de l'expérience se manifeste, l'expérimentateur se trouve en face d'une véritableobservation qu'il a provoquée, et qu'il faut constater, comme toute observation, sans aucune idée préconçue.L'expérimentateur doit alors disparaître ou plutôt se transformer instantanément en observateur ; et ce n'estqu'après qu'il aura constaté les résultats de l'expérience absolument comme ceux d'une observation ordinaire, queson esprit reviendra pour raisonner, comparer et juger si l'hypothèse expérimentale est vérifiée ou infirmée par cesmême résultats.

Pour continuer la comparaison énoncée plus haut, je dirai que l'expérimentateur pose des questionsà la nature ; mais que, dès qu'elle parle, il doit se taire ; il doit constater ce qu'elle répond, l'écouter jusqu'au bout,et, dans tous les cas, se soumettre à ses décisions.

L'expérimentateur doit forcer la nature à se dévoiler, a-t-ondit.

Oui, sans doute, l'expérimentateur force la nature à se dévoiler, en l'attaquant et en lui posant des questionsdans tous les sens ; mais il ne doit jamais répondre pour elle ni écouter incomplètement ses réponses en ne prenantdans l'expérience que la partie des résultats qui favorisent ou confirment l'hypothèse.

(...) L'expérimentateur qui continue à garder son idée préconçue, et qui ne constate les résultats de l'expérience qu'à cepoint de vue, tombe nécessairement dans l'erreur, parce qu'il néglige de constater ce qu'il n'avait pas prévu et faitalors une observation incomplète.

L'expérimentateur ne doit pas tenir à son idée autrement que comme à un moyende solliciter une réponse de la nature.

Mais il doit soumettre son idée à la nature et être prêt à l'abandonner, à lamodifier ou à la changer, suivant ce que l'observation des phénomènes qu'il a provoqués lui enseignera (...).Le savant complet est celui qui embrasse à la fois la théorie et la pratique expérimentale.

1° Il constate un fait, 2° àpropos de ce fait, une idée naît dans son esprit ; 3° en vue de cette idée, il raisonne, institue une expérience, enimagine et en réalise les conditions matérielles.

4° De cette expérience résultent de nouveaux phénomènes qu'il fautobserver, et ainsi de suite.

L'esprit du savant se trouve en quelque sorte toujours placé entre deux observations :l'une qui sert de point de départ au raisonnement, et l'autre qui lui sert de conclusion. Pour être plus clair, je me suis efforcé de séparer les diverses opérations du raisonnement expérimental.

Mais quandtout cela se passe à la fois dans la tête d'un savant qui se livre à l'investigation dans une science aussi confuse quel'est encore la médecine, alors il y a un enchevêtrement tel, entre ce qui résulte de l'observation et ce quiappartient à l'expérience, qu'il serait impossible et d'ailleurs inutile de vouloir analyser dans leur mélange inextricablechacun de ces termes.

Il suffira de retenir en principe que l'idée a priori ou mieux l'hypothèse est le stimulus del'expérience, et qu'on doit s'y laisser aller librement, pourvu qu'on observe les résultats de l'expérience d'une manièrerigoureuse et complète.

Si l'hypothèse ne se vérifie pas et disparaît, les faits qu'elle aura servi à trouver resterontnéanmoins acquis comme des matériaux inébranlables de la science.

» Une telle perspective critique permettra de mieux mettre en évidence, rétrospectivement, la valeur épistémologiquedu propos de Nietzsche, propos qui n'est pourtant pas proprement scientifique. NIETZSCHE (Friedrich-Wilhelm). Né à Rocken en 1844, mort à Weimar en 1900. Il fit ses études à l'école de Pforta, puis, renonçant à la carrière ecclésiastique, il les termina aux Universités deBonn et de Leipzig.

La lecture de Schopenhauer et la rencontre avec Wagner sont les événements capitaux de. »

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