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On parle beaucoup aujourd'hui de « littérature engagée », dans laquelle l'écrivain oeuvre pour expliquer et ensuite améliorer la condition humaine. Pensez-vous que ce soit l'unique vocation de la littérature ?

Publié le 13/04/2009

Extrait du document

1. Il s'agit d'un sujet facile parce que posant le problème avec netteté et se rapportant à un domaine connu des élèves.    2. Le sujet explique déjà en partie ce qu'est la littérature engagée.  Il est cependant nécessaire de préciser la définition de l'engagement pour éviter que les expressions « expliquer « et « améliorer la condition humaine « ne recouvrent un contenu trop vague.  L'engagement consiste pour l'écrivain à prendre parti dans les luttes politiques de son temps en vue d'une amélioration de l'ordre social.  Cette attitude s'oppose au non-engagement qui consiste pour l'écrivain à s'enfermer dans une tour d'ivoire, à se désintéresser du sort de ses contemporains, pour se consacrer uniquement à l'œuvre d'art.  Nous voyons donc que la définition contenue dans le sujet est incomplète, dans la mesure où elle ne précise pas que l'écrivain engagé recherche une action immédiate — avec les risques que cela comporte — sur la société dans laquelle il vit.  Un écrivain dont l'œuvre expliquerait la condition humaine, qui serait animé par le désir d'une amélioration de cette condition, mais qui écrirait pour une postérité lointaine, ne répondrait pas à la définition de l'écrivain engagé. L'engagement se caractérise par le désir d'une action politique immédiate.    3. Les expressions expliquer et améliorer devront retenir l'attention.  Il est essentiel de montrer le lien qu'il y a entre ces deux actions. Dans la mesure où il tend à démystifier, à ouvrir les yeux de ses contemporains, l'écrivain est déjà un agent de transformation de la société.    4. L'expression condition humaine peut désigner la condition métaphysique de l'homme (sa situation dans le monde face aux autres hommes et à la nécessité de la mort) ou sa condition socio-économique (sa place dans une société et la place de cette société dans l'ensemble des entreprises humaines). Le titre d'un roman de Malraux, ha condition humaine, joue sur ces deux sens. Il est évident que c'est au second de ces sens que se rapporte le sujet.    5. Les trois remarques précédentes montrent qu'il était nécessaire, avant d'aborder toute discussion, d'apporter un certain nombre de précisions à la définition proposée par le sujet.  Cet effort pour mieux cerner la notion de littérature engagée pouvait constituer la première partie du devoir.    6. Même si vous pensez que la fonction essentielle de la littérature est l'engagement, il est bon d'évoquer, puisque le sujet vous le demande pratiquement, d'autres vocations possibles de la littérature.  Même lorsqu'on a l'intention de rejeter une thèse, il est bon de montrer qu'on la connaît.    7. Les exemples littéraires pour traiter ce sujet seront choisis de préférence en relation avec un contexte historique précis : Voltaire et l'affaire Calas, Zola et l'affaire Dreyfus, Sartre et la guerre d'Algérie, Dos Passos et la naissance du capitalisme américain, Soljenitsyne et le stalinisme, Césaire et le colonialisme.

« — Nécessité de ne pas confondre littérature et propagande.Après avoir distingué les deux genres, on s'efforcera de montrer qu'une œuvre peut être une œuvre d'actualité et enmême temps une œuvre de qualité.

(Les exemples les plus classiques sont Les Provinciales de Pascal et les Contesde Voltaire.) Il est donc possible de concilier engagement et valeur littéraire. Troisième partie : autres vocations possibles de la littérature — La littérature comme divertissement :L'auteur ne cherche pas à transformer le monde, mais veut donner au lecteur le moyen de s'en évader.— La littérature comme échec à la mort :Écrire peut correspondre à une volonté de ne pas mourir tout à fait; de laisser une trace qui survivra à la mortphysique.

C'est le « dur désir de durer » dont parlait Éluard.— La littérature, instrument de communication : Correspond à un sentiment tout naturel qui nous incite à partagernos joies et nos peines, nos inquiétudes et nos interrogations.« ]'ai perdu bien des illusions littéraires...

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Mais il me reste une conviction dont je ne démordrai pas : écrire estun besoin pour chacun.

C'est la forme la plus haute du besoin de communication.

» Sartre, Situations IX.— La littérature source de joie esthétique :Satisfaction de l'auteur devant sa création; du lecteur devant une belle œuvre. — La création littéraire comme pratique exploratoire : C'est la fonction qu'assigne l'école du Nouveau roman à lalittérature.

Nous donnerons à titre de documentation ce texte de Robbe-Grillet qui fait bien le point sur la question.« LE SEUL ENGAGEMENT POSSIBLE POUR L'ÉCRIVAIN, C'EST LA LITTÉRATURE.Il n'est pas raisonnable, dès lors, de prétendre dans nos romans servir me cause politique, même une cause qui nousparaît juste, même si dans notre vie politique nous militons pour son triomphe, ha vie politique nous oblige sanscesse à supposer des significations connues : significations sociales, significations historiques, significationsmorales.

L'art est plus modeste — ou plus ambitieux — pour lui, rien n'est jamais connu d'avance.Avant l'œuvre, il n'y a rien, pas de certitude, pas de thèse, pas de message.

Croire que le romancier a « quelquechose à dire », et qu'il cherche ensuite comment le dire, représente le plus grave des contresens.

Car c'estprécisément ce « comment », cette manière de dire, qui constitue son projet d'écrivain, projet obscur entre tous, etqui sera plus tard le contenu douteux de son livre.

C'est peut-être, en fin de compte, ce contenu douteux d'unobscur projet de forme qui servira le mieux la cause de la liberté.

» Conclusion La littérature peut donc avoir d'autres vocations que l'engagement dans la lutte politique; cet engagement peut, parailleurs, être conçu autrement : une subversion des formes traditionnelles qui finira par modifier les mentalités etindirectement les institutions en place.

Mais beaucoup d'écrivains — et Sartre le premier — émettent des doutes surla possibilité pour la littérature de jouer un rôle politique important, et accordent plus de crédit à un engagementpersonnel au niveau de l'action.

A l'image de René Char qui pendant la Résistance remplaça son stylo par un revolveret dirigea un maquis.. »

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