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Peut-on échapper à la culture ?

Publié le 10/12/2023

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« Peut-on échapper à la culture ? ANALYSE DES TERMES DU SUJET Peut-on : L’interrogation ouverte par l’expression « peut-on » est double : elle désigne, au sens large, une possibilité (est-ce pensable, réalisable ?), et au sens restreint, une légitimité (en ai-je le droit ?). Précisons donc : (sens 1) Le projet d’échapper à la culture est-il réalisable ? (sens 2) Est-il moral, est-il permis de se libérer de sa culture ? Est-ce seulement désirable ? Échapper : Le terme sous-entend que la culture serait analogue à une prison qu’il faudrait fuir pour gagner sa liberté.

Cependant, on peut aussi échapper à quelque chose par hasard, sans que cet acte relève de sa volonté propre. « Athènes, à l’âge de Périclès, Rome sous Auguste, les cités italiennes indépendantes à la fin du Moyen Âge, Londres au temps d’Elizabeth, Paris au cours des trois derniers siècles, sont des exemples de ces groupes restreints, culturellement autonomes.

On parle souvent de ces groupes et de leurs cultures comme s’ils représentaient des groupes et des cultures vastes et étendues.

Cette étrange assimilation est un paralogisme du type pars pro toto.

Il est par exemple surprenant que ce qu’on appelle l’histoire de la littérature française soit en fait l’histoire de l’activité littéraire parisienne » Edward Sapir, Anthropologie, p.

13 Culture : on oppose habituellement culture et nature.

La nature désigne au sens large l’ensemble de la réalité extérieure indépendante de l’action humaine.

On distingue habituellement trois facultés naturelles de l’homme : Homo Faber, Homo Loquax, Homo Sapiens. Quant au terme de culture, il a longtemps été associé aux productions intellectuelles et bonnes manières d’une élite, les plus riches et les mieux éduqués.

Mais pour comprendre la culture, on ne peut pas se contenter d’étudier les idées et les comportements de certains hommes.

C’est ici l’erreur courante que Sapir dénonce.

La science moderne de la culture, qu’on appelle anthropologie (science qui étudie l’homme en tant qu’être social) s’intéresse aux phénomènes humains les plus banals et les plus éloignés (la façon de manger du paysan au XVIIe siècle, la mode vestimentaire, la plus ou moins grande sensibilité aux odeurs, etc.).

Si, auparavant, ces faits de la vie quotidienne apparaissaient comme naturels, leur diversité spatiale et leur évolution dans le temps nous montre qu’ils ne le sont pas.

Au sens large, on peut donc définir la culture comme l’ensemble des productions, idées et des comportements acquis par l’homme en tant qu’être social.

Cette définition, qui tient en une phrase, a mis des siècles à se former.

C’est aujourd’hui une définition sur laquelle s’entendent tous les anthropologues. Présupposés : 1) Culture et nature sont incompatibles. Entrer dans la culture, dans le monde humain, c’est sortir du monde naturel.

Un être humain inculte serait plus proche de la nature. 2) Quitter la culture, ce serait donc se tourner vers la nature, régresser vers un stade antérieur, qui ne doive rien à l’action de l’homme. C’est donc poser la question du bien-fondé de l’existence même d’une culture.

Est-elle une dénaturation qui nous rend monstrueux ? Il est vrai que certaines pratiques humaines semblent devoir être remises en doute.

La guerre, la misère, les mutilations rituelles, la destruction de l’écosystème qui rend possible la vie humaine, tout cela n’est-il pas causé par l’homme comme être culturel ? Dans cette perspective, on peut être séduit par la promesse d’une vie naturelle, c’est-à-dire enfin libérée de l’horreur et du superflu. Problématique : Si nature et culture s’excluent mutuellement, comment est-il possible d’envisager le passage de l’une à l’autre ? I – La naturalisation de la culture Nous allons examiner, avec Aristote, la thèse selon laquelle il n’y a pas réellement de passage de nature à culture.

La culture, c’est la nature déguisée : elle n’est que l’accomplissement d’un mouvement naturel. ARISTOTE (-384 ; -322) Aristote est un philosophe de l’Antiquité grecque qui a vécu à Stagire, en Macédoine.

Élève puis critique de Platon, il fonde sa propre école appelée le Lycée.

Il est aussi le précepteur d’Alexandre le Grand, le plus grand conquérant de l’Antiquité.

Aristote s’intéresse à tous les domaines du savoir (physique, biologie, métaphysique, politique, linguistique…). L’économie de la Grèce antique repose sur un système agricole et esclavagiste.

Le rythme de la vie sociale y est calqué sur celui de la nature, il semble immobile et cyclique, à la manière de l’éternel cycle des saisons.

Le regard aristotélicien sur la société est influencé par la société dans laquelle il vit.

Ainsi, on dira que son anthropologie comme sa biologie sont fixistes. De manière générale, la pensée antique valorise la nature (« Phusis » en grec) comme la réalité suprême de laquelle tous les êtres existants tirent leur réalité, même les dieux.

Pour les monothéismes qui succéderont aux conceptions gréco-romaines, la nature a un statut second : elle n’est qu’une création de Dieu (cela autorise qu’on agisse sur elle, qu’on la modifie, et qu’on se considère comme séparée d’elle). Texte 1 : Se suffire à soi-même, est un but auquel tend toute production de la nature et cet état est aussi le plus parfait.

Il est donc évident que la Cité est au nombre des choses qui existent naturellement, et que l'homme est naturellement fait pour la société politique.

Celui qui par son naturel, et non par l'effet du hasard, existerait sans aucune patrie, serait un individu détestable, très au-dessus ou très au-dessous de l'homme, selon Homère : "Un être sans foyer, sans famille et sans lois". Celui qui serait tel par sa nature ne respirerait que la guerre, n'étant retenu par aucun frein, - et, comme un oiseau de proie, serait toujours prêt à fondre sur les autres.

Aussi l'homme est-il un animal politique, plus social que les abeilles et autres animaux qui vivent ensemble.

Et la nature, qui ne fait rien en vain, n'a départi qu'à lui seul le don de la parole, qu'il ne faut pas confondre avec les sons de la voix.

Ceux-ci ne sont que l'expression de sensations agréables ou désagréables dont les autres animaux sont, comme nous, susceptibles.

La nature leur a donné un organe borné à ce seul effet ; mais nous avons de plus, sinon la connaissance développée, au moins tout le sentiment obscur du bien et du mal, de l'utile et du nuisible, du juste et de l'injuste, objets pour la manifestation desquels nous a été principalement accordé l'organe de la parole.

C'est ce commerce de la parole qui est le lien de toute société domestique et civile. ARISTOTE Politique, I, 2 Explication de texte : Introduction (non rédigée) : Thème (ce dont le texte parle) : L’homme et la nature Problématique (problème auquel le texte répond) : Si l’homme est issu de la nature, comment expliquer qu’il soit formé par la société (donc la culture) ? Thèse (la réponse apportée par l’auteur) : La nature a fait l’homme dans le but qu’il forme des sociétés. 1) La société est l’expression de la naturalité de l’homme Pour Aristote, la culture n’est pas un ordre de réalité séparé de la nature.

Elle n’est pas un pur artifice, une simple production de l’homme.

Au contraire, elle est l’expression de la naturalité de l’homme.

L’homme est un animal politique comme la vache est un animal herbivore, comme la poule est un animal ovipare : il est dans sa nature de l’être.

« Politique », ici, signifie qui existe dans la polis, (la cité, en grec) : l’homme est un animal social, un animal civique.

La culture est la conséquence de la nature, elle est ce que la nature a voulu pour l’homme.

Nous rencontrons ici le finalisme aristotélicien.

Le finalisme consiste à expliquer les choses par le but qu’elles poursuivent (ex : les dents sont faites pour manger).

Aristote assigne donc à la nature un but bien précis.

Ce but : rendre chaque être le plus auto-suffisant possible, que chaque être puisse être lui-même en se débrouillant seul.

La cité, et donc la culture, ne sont pas contre-nature.

La société ne se forme pas contre l’homme comme animal naturel, mais avec lui. L’ « évidence » de cette idée est contestée par les tenants des thèses dites « artificialistes » : Freud, dans Malaise dans la civilisation (1929) : l’homme a des pulsions irrationnelles, irréfléchies (=instincts primitifs) qui le poussent à être naturellement agressif, violent envers autrui. Sa nature est anti-sociale.

La fonction de la société, fondée par l’action humaine consciente, consiste à contenir ces pulsions, voire à les utiliser pour accomplir quelque chose d’utile à la société dans son ensemble, et subordonner l’intérêt égoïste immédiat à l’intérêt rationnel à long terme. A partir du XVIIe siècle, les penseurs européens, en constatant l’instabilité de leurs sociétés, se demandent sur quoi repose le pouvoir.

On cherche donc les fondements d’un pouvoir légitime. Pour ce faire, on essaie d’imaginer ce que l’homme pourrait être sans société.

On appelle cette hypothèse l’état de nature.

Cette fiction n’existe que dans l’esprit des philosophes, c’est un outil pour penser, pas un compte-rendu historique d’événements réels.

L’état de nature s’oppose à l’état civil..... »

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