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Pourquoi désirer l'impossible ?

Publié le 12/03/2004

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Celui qui pourrait tout sans être Dieu, serait une misérable créature ; il serait privé du plaisir de désirer ; toute autre privation serait plus supportable." Le plan de votre devoir devra consister en une variation sur le terme d'impossible.

I . On désire l'impossible pour le rendre possible.

Premier sens de l'impossible : ce qui n'a jamais été réalisé semble impossible. Par exemple : le sport (les records du monde), l'aventure (l'extrême, les expéditions), la technique (la conquête de l'espace, etc.). C'est la régression à l'infini du désir. Le désir repousse toujours plus les limites de sa satisfaction.Mais : au-delà des limites psychologiques de l'impossible apparent, il y a un impossible réel (se fonder sur l'idée de loi de nature).

Le mythe de Prométhée, qui dérobe aux dieux le feu sacré de la connaissance, témoigne d'un certain désir de l'homme de dépasser sa condition et de porter son désir justement sur ce qu'il ne pourra jamais obtenir : le désir étant justement ce qui ne se satisfait pas de l'obtention de son objet. En effet, le désir meurt et renaît sans cesse. Ainsi, le désir est insatiable (on pourra se référer ici à Dom Juan.   Il est donc presque logique que l'impossible fasse l'objet d'un désir, comme si l'impossible était par essence l'objet, l'horizon de tout désir. Comment rendre raison de ce paradoxe d'un désir voulant et ne voulant pas sa propre réalisation ? On le sait sitôt prise, la proie prise est méprisée. Le défi que représente une impossibilité technique pour toute intelligence, et l'attrait de l'interdit auquel renvoie l'interdit moral suffisent-ils à en rendre compte ? En premier lieu, on désire l'impossible pour le rendre actuel, réalisé; dans le second on le désire sans pouvoir ou même vouloir le rendre possible : l'homme ne serait-il pas un Dieu si tout lui devenait possible ? Aussi l'attrait qui régit ce désir semble profondément paradoxal : désire-t-on l'impossible pour le rendre possible, ou au contraire pour manifester une impossibilité presque salvatrice ? Rousseau dira: "Malheur à qui n'a plus rien à désirer ! il perd pour ainsi dire tout ce qu'il possède. On jouit moins de ce qu'on obtient que de ce qu'on espère, et l'on n'est heureux qu'avant d'être heureux. En effet, l'homme avide et borné, fait pour tout vouloir et peu obtenir, a reçu du ciel une force consolante qui rapproche de lui tout ce qu'il désire, qui le soumet à son imagination, qui le lui rend présent et sensible, qui le lui livre en quelque sorte, et pour lui rendre cette imaginaire propriété plus douce, le modifie au gré de sa passion. Mais tout ce prestige disparaît devant l'objet même; rien n'embellit plus cet objet aux yeux du possesseur ; on ne se figure point ce qu'on voit; l'imagination ne pare plus rien de ce qu'on possède, l'illusion cesse où commence la jouissance. Le pays des chimères est en ce monde le seul digne d'être habité et tel est le néant des choses humaines, qu'hors l'Être existant par lui-même, il n'y a rien de beau que ce qui n'est pas. Si cet effet n'a pas toujours lieu sur les objets particuliers de nos passions, il est infaillible dans le sentiment commun qui les comprend toutes. Vivre sans peine n'est pas un état d'homme; vivre ainsi c'est être mort. Celui qui pourrait tout sans être Dieu, serait une misérable créature ; il serait privé du plaisir de désirer ; toute autre privation serait plus supportable."

  • I . On désire l'impossible pour le rendre possible.
  •  2. L'impossible est par excellence l'objet de la surenchère du désir.
  •  3. L'impossible est l'objet du désir parce qu'il est avant tout l'objet d'un besoin qui n'est pas satisfait.

« Les Grands hommes, qui ont changé le cours de l'histoire, ou l'ont façonné sur le modèle de leur volonté, sont ceuxqui ont rendu possible ce qui paraissait inconcevable, ou inaccessible.

Les Grands hommes ont désiré ce à quoi toutle monde avait renoncé, ou n'avait même pas osé penser, étant donné son caractère a priori irréalisable.

Maisprécisément, on peut se demander ce qui a pu faire que ces hommes, contrairement aux autres, ne se soient pasrefusé leurs rêves, aient pu céder à la tentation d'accomplir l'impossible.

Plus étrange encore, commentpsychologiquement expliquer que ces hommes aient même eu le désir conscient de réaliser quelque chose que le bonsens leur indiquait irréalisable.

Comment comprendre qu'un individu veuille délibérément l'inaccessible, qu'ilentreprenne des travaux pharaoniques, des conquêtes apparemment sans fin ou perdues d'avance, des voyagespérilleux dont il sait décemment ne pouvoir revenir vivant, qu'il passe sa vie à chercher la pierre philosophale, ou qu'ilaspire à la sainteté ? Ce que l'on se demande ici, c'est pourquoi désirer l'impossible ?La formulation de la question met d'emblée en opposition le désir de l'homme, qui peut se définir comme un élan, uneaspiration, une tension vers quelque chose, cette aspiration étant la plupart du temps consciente.

Et l'impossible,qui désigne ce qui ne peut être, ce qui ne peut être réel, ni réalisable, parce cela est contradictoire, par exemple.

Ildésigne donc ce qui est inacessible.

Or tout désir vise la réalisation d'un événement.

Je désire qu'autrui m'aime, queje puisse manger à ma faim, que je devienne médecin.

Autrement dit, je désire que l'événement « manger à sa fin »se réalise, qu'il prenne la consistance du réel.

Même quand on dit que l'on désire une voiture, on désire quel'événement « avoir une voiture » se réalise.

Comment, par conséquent, le désir peut-il porter sur ce qui pardéfinition ne peut pas « être » ? Le sujet nous interroge bien entendu sur les causes de notre désir d'impossible,mais plus que sur les causes, également sur les fins.

Car l'enjeu du sujet est éthique.

Si nous désirons l'impossible,et que ce désir est la manifestation d'une liberté, alors il faut se demander s'il a un sens, c'est-à-dire, au fond, s'ilnous conduit à une vie heureuse.La question nous invite dans un premier temps à nous étonner de la contradiction logique dont témoigne notre désird'impossible.

Le « Pourquoi » nous questionne sur : Comment l'impossible peut-il être l'objet d'un désir ? Nousverrons que si le désir d'impossible semble être une contradiction insurmontable, il trouve une résolution dans lesfondements irrationnels de notre comportement.

Nous serons alors amenés à nous interroger psychologiquement surce désir d'impossible, pour mettre en évidence les impasses dans lesquelles il conduit l'homme.

Le « Pourquoi désirerl'imposible », devra en effet être lu comme un « A quoi bon désirer l'impossible ? » Si ce désir d'impossible ne nousconduit nullepart, et que nos désirs sont bien « conscients », alors nous devrons questionner les fins de ce désir.

Ilnous faudra peut-être critiquer l'apparente stérilité du seul désir des choses possibles, pour voir quelles nobles finspeut servir notre désir de l'irréalisable. ILe sujet nous invite dans un premier temps à réfléchir sur la contradiction manifeste entre notre désir, et l'objet deson aspiration.

Le désir, c'est tout d'abord un élan qui nous porte vers un objet, dont la possession, mêmesymbolique, nous procurerait une satisfaction, voire du plaisir.

Désirer l'impossible, c'est donc espérer avoir lajouissance d'un objet, tout en sachant que la jouissance de cet objet nous est inaccessible car cet objet est toutsimplement irréalisable.

Il y donc bien une contradiction, à maintenir de front, d'un côté le désir de voir unévénement se réaliser, et de l'autre la connaissance que sa réalisation entrerait en contradiction avec les lois duréel et de la logique.

Désirer l'impossible, c'est désirer un miracle.

Le miracle est ce qui se produit contre touteattente, et qui va à l'encontre des lois du réel.

C'est d'ailleurs de ce caractère exceptionnel, extraordinaire, contreles lois de la nature, qu'il tire sa légitimité, et sa crédibilité.

Or lorsqu'on prie pour qu'un miracle se produise, onformule le désir que l'impossible arrive, précisément parce qu'il est impossible.

On ne peut prier pour qu'unévénement peu probable arrive, mais l'intervention d'une force transcendante (comme Dieu par exemple) ou magique(ainsi d'un esprit de la forêt) est d'autant plus légitime que ce que l'on réclame est impossible.

C'est lorsque l'on saitque l'on ne peut plus compter sur le hasard, ou sur une bonne configuration des événements, et que l'événement leplus souhaitable n'est de toute façon pas réalisable, que l'on se donne le droit de désirer l'impossible, alors mêmeque l'on ne se fût pas prêté à désirer un événement pourtant même seulement très peu probable.

Je ne désire pastoucher, si je suis écrivain, la totalité de mes potentiels lecteurs, car je sais qu'un au moins de mes lecteurs ne serapas satisfait de ma production ; mais je désirerai, si je suis jeté dans une fosse aux lions, que ceux-ci me laissenttranquille comme, rapporte-t-on, ils laissèrent Ste Blandine.

Dans le désir du miracle, on s'en remet à une instancequi a la possibilité d'aller contre l'ordre causal (ou en tous cas considéré comme tel) de la nature.

Le désird'impossible est alors justifié par la croyance en une puissance qui soit au-delà des catégories du possible et del'impossible.

Ou plutôt, ce désir s'explique par la croyance que l'on peut s'adresser à une instance dont l'action n'estpas dépendante de la causalité, et qui peut intervenir pour bouleverser les sphères du possible et de l'impossible.

Sile désir d'impossible est concevable, c'est donc parce que l'on croit que cet impossible a une faille, ou qu'il peut êtrecontrebalancé par un autre possible, qui échappe à la négation du possible, que suppose l'impossible désiré.Autrement dit, s'il est vrai que nous désirons parfois l'impossible, c'est que c'est impossible nous paraît contournable.. »

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