« PROMÉTHÉE ET HERCULE »
Publié le 21/02/2012
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La science moderne et la technique qui en dérive ont placé l'homme devant une situation radicalement nouvelle. Celle-ci ne résulte pas seulement de l'accélération vertigineuse du progrès technique qui permet d'envisager la domination totale de l'univers. La volonté de puissance qui inspire cette attitude conquérante ne date pas de l'époque moderne; elle est au principe même de l'aventure humaine. Depuis toujours, l'homme a cherché à dompter la nature. L'ampleur des moyens mis en oeuvre par l'époque moderne pour y parvenir, si elle intensifie la lutte millénaire contre la nature, n'en change pas fondamentalement le caractère.

«
ner une transgression de l'ordre divin et qu'a ce titre elle peut etre sacrilege
et source de maux nouveaux.
C'est de cette ambiguite fonciere du mythe de Promethee que Hegel6
tire argument pour nous prevenir contre une conception tronquee de Pacti-
vite humaine.
Distinguant dans l'effort multiforme de Pepoque moderne une double solicitation dont Lune consiste a soulever la matiere a la hau-
teur de I'esprit humain, alors que l'autre aboutit a eeraser l'esprit humain
sous le poids d'une matiere inerte, il met en parade les exploits de Prome-
thee et ceux d'Hercule6.
Victime des dieux pour avoir voulu etre le bienfaiteur de Phumanite,
Promethee devrait au moins pouvoir compter sur la reconnaissance eternelle
des hommes.
Or, les Grecs le rangent parmi les Titans7, forces aveugles et
le plus souvent nefastes.
Platons justifie cette apparente ingratitude en
preeisant que la decouverte du feu, quelque utile qu'elle soit au genre hu-
main, est du seul ressort de la vie materielle.
L'entreprise de Promethee
pour liberer l'humanite de la servitude ou les dieux cherehaient a la maintenir
se solde par un echec, puisque la loi morale, seul garant d'une liberte veri-
table, continue a rester entre les mains de Zeus9.
Et Hegel d'ajouter que le
martyre de Promethee met en pleine lumiere les consequences douloureuses
d'une liberation manquee.
Offrant au bec du vautour un foie perpetuelle-
ment renouvele, Promethee prefigure l'homme moderne en butte a des
tourments incessants du fait qu'insatisfait des conditions materielles de sa
vie, il ne cease de se creer des besoins nouveaux.
Il en est tout autrement des travaux d'Hercule qui consistent non pas
a s'emparer des forces de la nature afin de s'en servir, mais a les dompter,
a delivrer les hommes de leur pression brutale et malfaisante.
Aussi les Grecs ont-ils eleve Hercule au rang de hems.
Il est meme superieur aux dieux.
Vainqueur de la nature grace a une activite qui puise son unique raison
d'être dans les exigences de la loi morale, il atteint a une « individualite
purement spirituelle », alors que les dieux, issus des puissances naturelles,
ne se, liberent pas tout a fait de la matiere.
L'interpretation de Hegel conduit vers l'essentielle question posee a
l'homme moderne.
La civilisation technicienne s'epuise-t-elle dans l'effort
« titanique » qui se borne a rechercher la satisfaction des besoins materiels de l'homme dans les limiter tracees par la nature, ou bien doit-elle tendre
vers l'effortg heroique» qui, au bout d'un penible mais magnifique chemine-
ment, permet a l'homme de &passer la nature, en substituant a l'ordre des
choses tyrannique un monde de l'esprit ou regne la liberte?
( )
On a justement souligne le desarroi de l'homme moderne livre au sein
d'un monde sans clef a une liberte sans contenu.
S'etant affranehi de sa
soumission a la nature, il ne sait quel sens donner a sa victoire.
L'esclave
devenu maitre est embarrasse de sa liberte toute nouvelle.
(...) Quels que soient les dangers que la technique fasse courir a l'homme, it
est impossible de retourner en arriere.
L'humanite a uni son sort a celui
d'une science triomphante.
Mais il est possible, voire indispensable, de
ner une transgression de l'ordre divin et qu'à ce titre elle peut être sacrilège
et source de maux nouveaux.
C'est de cette am.bigulté foncière du mythe de Prométhée que Hegel&
tire argument pour nous prévenir contre une conception tronquée de l'acti
vité hùmaine.
Distinguant dans l'effort multiforme de l'époque moderne
une double sollicitation dont l'une consiste à soulever la matière à la hau
teur de l'esprit humain, alors que l'autre aboutit à écraser l'esprit humain
sous Je poids d'une matière inerte, il met en parallèle les exploits dr Promé
thée et ceux d'Hercules.
Victime des dieux pour avoir voulu être le bienfaiteur de l'humanité,
Prométhée devrait au moins pouvoir compter sur la reconnaissance éternelle
des hommes.
Or, les Grecs le rangent parmi les Titans?, forces aveugles et
le plus souvent néfastes.
Platons justifie cette apparente ingratitude en
précisant que la découverte du feu, quelque utile qu'elle soit au genre hu
main, est du seul ressort de la vie matérielle.
L'entreprise de Prométhée
pour libérer l'humanité de la servitude où les dieux cherchaient à la maintenir
se solde par un échec, puisque la loi morale, seul garant d'une liberté véri
table, continue à rester entre les mains de Zeus9.
Et Hegel d'ajouter que le
martyre de Prométhée met en pleine lumière les conséquences douloureuses
d'une ·libération manquée.
Offrant au hec du vautour un foie perpétuelle
ment .
renouvelé, Prométhée préfigure l'homme moderne en butte à des
tour~ents incessants du fait qu'insatisfait des conditions matérielles de sa
vie, il ne cesse de se créer des besoins nouveaux.
Il en est tout autrement des travaux d'Hercule qui consistent non pas
à s'emparer des forces de la nature afin de s'en servir, mais à les dompter,
à délivrer les hommes de leur pression brutale et malfaisante.
Aussi les
Grecs ont-ils
élevé Hercule au rang de héros.
Il est même supérieur aux dieux.
Vainqueur de la nature grâce à une activité qui puise son unique raison
d'être dans les exigences de la loi morale, il atteint à une « individualité
purement spirituelle», alors que les dieux, issus des puissances naturelles,
ne se libèrent pas tout à fait de la matière.
L'interprétation de Hegel conduit vers l'essentielle question posée à
l'homme moderne.
La civilisation technicienne s'épuise-t-elle dans l'effort
« titanique» qui se borne à rechercher la satisfaction des besoins matériels
de l'homme dans les limites tracées par la nature, ou hien doit-elle tendre
vers l'effort« hérolque» qui, au bout d'un pénible mais magnifique chemine
ment, permet à l'homme de dépasser la nature, en substituant à l'ordre des
choses
tyrannique un monde de l'esprit où règne la liberté?
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)
On a justement souligné le désarroi de l'homme moderne livré au sein
d'un monde sans clef à une liberté sans contenu.
S'étant affranchi de sa
sounrission à la nature, il ne sait quel sens donner à sa victoire.
L'esclave
devenu maitre est embarrassé de sa liberté toute nouvelle.
( ...
)
Quels
que soient les dangers que la technique fasse courir à l'homme, il
est impossible de retourner en arrière.
L'humanité a uni son sort à celui
d'une science triomphante.
Mais il est possible, voire indispensable, de.
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