Devoir de Philosophie

Puis-je surmonter la distance entre moi et autrui ?

Publié le 12/02/2004

Extrait du document

* Sartre critique l'hypothèse solipsiste de Descartes. L'existence d'autrui, pour lui, ne peut pas faire l'objet d'une démonstration car le «moi» qui effectuerait cette démonstration ne se connaît lui-même qu'en même temps qu'il connaît autrui.* En effet pour Sartre, «l'autre est indispensable à mon existence aussi bien qu'à la connaissance que j'ai de moi»: je ne peux parler de moi-même et prendre conscience de moi-même que par rapport au regard qu'autrui porte sur moi. L'intersubjectivité, c'est-à-dire la structure commune à moi et autrui, est première par rapport à ma subjectivité.* C'est pourquoi je ne peux pas sérieusement mettre en doute l'existence d'autrui. Ce qui ne signifie pas que je sois toujours d'accord avec lui ou que je ne puisse pas le maltraiter.C'est dans le dialogue que se constitue un terrain commun entre moi et autrui.«Dans l'expérience du dialogue, il se constitue entre moi et autrui un terrain commun [...] Il y a là un être à deux.» Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception (1945).

Le sujet semble d’amblée dire que nous avons une certaine distance à garder avec autrui. Nous devons nous interroger sur les rapports interpersonnels et intersubjectifs. De quel type sont-ils ? Nous devons bien considérer que l’autrui évoqué ici n’est pas seulement un autre, c’est un autre qui pourrait être moi, une sorte d’alter ego, avec lequel je vis en communauté, d’où l’importance de l’enjeu à déterminer l’approche que l’on peut avoir avec autrui. Doit-on toujours garder ses distances avec autrui ? En d’autres termes : autrui n’est-il qu’une menace pour moi ? Ou encore ai-je besoin de m’éloigner d’autrui pour être moi même, mais aussi en quoi cependant peut-on dire que la présence d’autrui m’est indispensable pour que je sois.

« place sans fondement qu'elle occupe dans le monde.

Mais toute justification d'une place sans fondement ne peutêtre qu'arbitraire : c'est pourquoi une conscience ne pourra justifier sa situation dans le monde qu'en étant demauvaise foi. La conscience existe en s'opposant au monde des choses De quoi est faite cette conscience ? Quelle est sa composition, sa substance ? Sartre pense avec Husserl (lefondateur de la phénoménologie) que la conscience précisément n'est pas une substance, c'est-à-dire une choseayant sa consistance et sa permanence données dans l'espace et dans le temps.Une chose, en effet, est fermée sur elle-même, munie à tout instant d'une forme et d'un contenu déterminés, et elleest enfin un objet purement passif pour les consciences qui la perçoivent : elle est en elle-même ce qu'elle est, rienque ce qu'elle est et tout ce qu'elle est.

La chose obéit donc au principe d'identité, elle est un « être-en-soi », ditSartre.La conscience est, pour Sartre, tout le contraire d'une chose : elle est constamment ouverte sur autre chose qu'elle(sur le monde), elle n'a ni forme ni contenu déterminés, et enfin elle n'a jamais la pure passivité de l'objet touteconscience établit des rapports avec elle-même, elle s'apparaît comme pure activité à elle-même, et d'autre partelle est saisie par les autres consciences comme un étrange objet doué d'activité interne.Supposons, par exemple, que j'observe dans une vitrine de magasin un objet qui me plaît, que je désire posséder:l'objet, lui, est ce qu'il est, il n'entretient de rapports ni avec lui-même ni avec moi, et mon désir de lui ne l'affectepas.

Alors que ma conscience, pour exister comme conscience désireuse de cet objet, implique en elle-même cetobjet pourtant extérieur à elle, elle est hantée par cet objet désirable qu'elle n'est pas, et c'est seulement par cemouvement qui la porte au-delà d'elle-même qu'elle peut exister.Si la chose est ce qu'elle est, et si la conscience est tout le contraire d'une chose, alors il est par principeimpossible à la conscience d'être ce qu'elle est: la réalité humaine, du fait qu'elle est conscience, est ce qu'elle n'estpas et n'est pas ce qu'elle est.

A tout moment, elle vise et se représente ce qu'elle n'est pas : les données dumonde.

Mais elle est toujours au-delà de ses moments par le mouvement même de visée et de saisie qui laconstitue.

Or coïncider avec elle-même, se donner la consistance et la permanence d'une chose, c'est-à-diredevenir aussi incontestable qu'une chose, c'est là le rêve de toute conscience.

Et c'est dans la mauvaise foi, qu'elleréalisera ce rêve. En s'opposant aux choses, en les « néantisant », la conscience transcende le monde. La conscience surgit dans le monde des choses, s'ouvre aux choses, et ainsi, ces choses, qu'elle n'est pas, luiapparaissent (dans la perception et la connaissance).

C'est donc en n'étant pas le monde des choses que laconscience peut être présence à ce monde.

Je ne suis pas la table que je perçois, car si j'étais elle, je ne lapercevrais plus: la conscience constitue donc le monde en se constituant elle-même comme n'étant pas ce monde ;c'est ce que Sartre appelle « mouvement de néantisation de la conscience.» Exister, pour la conscience, c'est êtrepar principe au-delà de ce qui se donne à elle, c'est échapper à son objet, et c'est cette capacité d'échappementcontinuel, d'évasion vers autre chose que le donné, que Sartre nomme « transcendance».

La néantisation et latranscendance sont donc une seule et même chose. Mais puisque la conscience doit sortir d'elle-même pour saisir les objets, cela veut dire que l'objet est toujours endehors de la conscience, elle ne peut jamais coïncider avec lui: l'objet est donc à son tour transcendant à laconscience.

C'est pourquoi, paradoxalement, tout ce que la conscience transcende la transcende à son tour.

Laconscience vise des objets du monde sans jamais pouvoir les atteindre : car en aboutissant aux choses, elle seconfondrait avec elles et s'abolirait comme conscience.

Le monde et les autres consciences qui habitent ce monderestent donc inaccessibles pour chaque conscience.Pour prendre une image, la conscience pour Sartre existe dans le monde comme un prédateur traqué.

Prédateur,parce que la conscience est néantisation, elle ne peut saisir les autres consciences qu'en les niant, en lessupprimant, elle ne peut donc se révéler elle-même que dans le conflit.

Mais la conscience est aussi traquée dans lemonde par les autres consciences, qui sont déjà là dans le monde quand elle les vise: toute conscience est unetranscendance déjà transcendée par la conscience d'autrui, puisque nier autrui, c'est reconnaître qu'il était déjà là.La présence d'autrui signifie donc pour toute conscience une toujours possible mise en échec de sa transcendancepar l'autre.

La transcendance n'est donc possible pour la conscience humaine qu'accompagnée des dimensions duconflit et de l'échec.

C'est pour nier ces dimensions, pourtant nécessaires, qui la déstabilisent, que la conscienceaura recours à la mauvaise foi. Toute conscience de quelque chose est en même temps conscience d'elle-même Toute conscience est conscience de son objet, et elle ne peut jamais être objet pour elle-même.

Elle ne peut passe saisir elle-même.

Par exemple, un sprinter qui voudrait se voir partir sur l'écran géant du stade, sur lequel défilentles images en direct du départ de la course, serait condamné à manquer son départ.

Tout comme ce sprinter, laconscience ne peut jamais viser l'image de son propre effort, elle ne peut jamais prendre son propre mouvementintérieur pour objet.Et pourtant la conscience existe pour elle-même comme conscience.

Elle est existence pour soi, dit Sartre, ouprésence à soi.

Mais c'est une présence immédiate, irréfléchie à soi, qui n'a jamais la valeur d'une connaissance desoi: cette présence immédiate à soi, Sartre l'appelle le «cogito pré-réflexif».

Cela signifie qu'avant toute réflexion, laconscience doit être présence spontanée à soi pour exister comme conscience dans toutes ses activités :percevoir, se souvenir, imaginer, aimer...

Percevoir, c'est poser un objet dans son extériorité ; se souvenir, c'est. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles