Devoir de Philosophie

Qu'est-ce qu'une émotion esthétique ?

Publié le 27/02/2005

Extrait du document

Et la finalité à laquelle renvoie le Beau est immanente à la forme elle-même : elle ne suppose aucune fin qui pourrait être située hors de l'objet ; c'est donc une « finalité sans fin ».Dès lors, « ce ne sont ni des règles ni des prescriptions, mais seulement ce qui ne peut être saisi à l'aide de règles ou de concepts, c'est-à-dire le substrat suprasensible de toutes nos facultés, qui sert de norme subjective ». Ce substrat, c'est l'Idée esthétique que nous révèle le libre jeu de l'imagination, et qui ne saurait devenir connaissance, parce qu'elle est intuition à laquelle ne correspond aucun concept. On voit ici dans quelle mesure la Critique du jugement est appelée à équilibrer, chez Kant, la Critique de la raison pure : car une idée théorique de la raison, de son côté, ne peut devenir connaissance parce qu'elle est concept auquel ne correspond aucune intuition.   3) L'émotion esthétique est intellectuelle.   On reproche souvent à l'art qu'il est illusion. Au contraire, Hegel dira son Esthétique que l'apparence est essentielle à l'essence. Il n'y aurait pas de vérité s'il n'apparaissait pas pour elle-même et pour autrui. On a tendance a opposer le Monde Extérieur, matériel, jugé véritable et le Monde Intérieur et sensible de l'art d'illusoire. Justement, il faut voir au-delà de la réalité pour trouver la vérité.

  D’un point de vue psychophysiologique, l’étude de l’art est fréquemment rattachée à celle de l’émotion, bien qu’on soit encore loin d’un consensus quant au caractère émotif du comportement esthétique. Cependant, l’empathie – ou, plus explicitement, l’Einfühlung allemand – joue un rôle incontestable dans de nombreuses théories esthétiques. Mais dans un domaine aussi neuf, les connaissances actuelles sont insuffisantes pour démêler avec certitude l’avéré de l’hypothétique et du faux ; il est donc indispensable d’être particulièrement prudent lorsqu’on parle d’émotion en esthétique. Face à l’art, on peut ressentir une palette de sentiment, avoir des attitudes qui ne sont en rien émotive. La réflexion en fait partie. Aussi l’émotion esthétique sera une catégorie particulière de l’émotion où l’esprit aura une grande importance.

« doute un peu de cela, mais il faut aller plus loin dans l'interprétation.Dans la " Politique ", Aristote suggère lui-même que la catharsis concerne également la tragédie, c'est-à-dire la vue, et non pas seulement l'écoute de ce qu'il appelle des chants éthiques, dynamiques ou exaltants.

Il n'y a pas às'en étonner puisque la tragédie, à l'époque, réalise une certaine forme d' « art total » harmonisant le texte, les chœurs et la danse.

Mais, en outre, elle consiste à mettre en scène une action, une intrigue où des personnagesréels imitent des héros soumis à un destin angoissant ou pathétique.

Pensons à Œdipe .

Or la musique seule ne figure pas; elle ne représente rien; elle laisse tout loisir à l'auditeur d'imaginer librement selon ses états d'âme, toutcomme la lecture d'un récit.

En revanche, la tragédie impose un personnage, un masque comportant des traitsdéfinis.

Elle force en quelque sorte l'identification du spectateur appelé à devenir momentanément un « acteur secret » dans la pièce.

Mimésis d'action et de sentiments réels, la tragédie concentre la réalité dans le temps et dans l'espace, elle l'exagère et pousse les passions à leur paroxysme afin d'éclairer le public sur les conséquenceséventuelles de ses actes: voyez ce qu'il adviendrait, si d'aventure l'envie vous prenait d'imiter réellement cesmalheureuses victimes de la fatalité !Le remède n'est-il pas pire que le mal ? Un spectacle apaisant ne serait-il pas plus propice à la sérénité, au retour àl'équilibre? Aristote ne se pose pas la question.

Sa « cure médicale » (Bossuet ) est homéopathique: on soigne le mal par le mal, les passions excessives par l'excès d'émotions.Cette interprétation n'est pas vraiment abusive.

Le texte d' Aristote la suggère; elle fut notamment celle de tout le classicisme français, soucieux d'assigner au théâtre une fonction morale, voire moralisatrice.Mais de l'éthique au politique, il n'y a parfois qu'un pas.

La " Politique " d' Aristote se fonde sur sa philosophie de la tempérance, de la modération, du juste milieu.

Sa volonté de restaurer la tragédie en déclin, de renouer avec latradition des grands spectacles qui contribuèrent à la gloire d'Athènes au Ve siècle, n'est sans doute pas exempted'intentions politiques et sociales: permettre à la cité de vivre en paix et assurer au citoyen le bonheur d'une vievertueuse, conforme à la raison.

Un tel programme d'éducation civique et culturelle ne pourrait-il convenir au futurroi de Macédoine ?Multiplier les spectacles tragiques, attirer la foule au théâtre, c'est permettre à la catharsis d'opérer non seulementsur l'individu, mais collectivement.

C'est aussi distraire les citoyens, détourner leur attention des problèmes dumoment - les guerres incessantes - et permettre l'expulsion d'une mauvaise conscience qui commence à hanter unpeuple en décadence.Il s'agit là d'une explication presque psychanalytique au sens actuel du terme: le spectacle apaise les passionsparce qu'il permet de vivre fictivement, de façon innocente et inoffensive, pour la personne et pour la société, despassions qui les mettraient en danger dans la réalité.

La catharsis autoriserait alors une sorte de défoulement etjouerait un rôle d'exutoire.On parle de défoulement.

Ce n'est pas un hasard si Freud a choisi le terme de catharsis pour désigner la finalité de la cure psychanalytique: le retour à la conscience des pulsions refoulées, notamment dans le cas des névroses.

Riende plus préjudiciable à l'équilibre de l'individu et de la société que de se complaire dans le malaise ou le mal-être depassions et de pulsions condamnées au mutisme, rejetée, dans le tréfonds de l'inconscient.Cette interprétation établit un lien entre la " Poétique " et la " Politique ".

Sur un plan plus général, elle révèle les implications politiques - au sens large du terme - et le discours sur l'art.

Or ce n'est pas non plus un hasard si cetype d'interprétation a systématiquement été omis par la tradition qui se réclame d' Aristote .

On pourrait d'ailleurs en dire autant de Platon .

Au IV siècle, nous l'avons dit, on se soucie surtout de la portée morale du théâtre.

On ne prête attention qu'aux règles de l'art, aux procédés techniques qui permettent d'aboutir à l'effet recherché.

A la findu XVIIIe siècle, Lessing dénonce l'assimilation aristotélicienne entre la poésie et la peinture dans le cadre de sa critique de l' « ut pictura poesis ».

La fonction cathartique par la mise en scène de la terreur ne lui plaît guère.

Il préfère la pitié et considère que la tragédie doit surtout susciter la compassion.

Quant à Goethe , peu sensible à l'effet de purgation et de purification de la catharsis, il ne parle que de retour à l'équilibre.

Dans sa périodeantiquisante et classique, et dans le cadre d'une esthétique idéaliste, il privilégie l'harmonie qui naît de lacontemplation de la beauté idéale propre à l'œuvre d'art réussie.

Surtout lorsque cette œuvre d'art appartient à lapoésie dramatique.Plus récemment, Bertolt Brecht (1898-1956) a fondé sa théorie et sa pratique théâtrale sur ce lien entre esthétique et politique : « Ce qui nous paraît du plus grand intérêt social, c'est la fin qu' Aristote assigne à la tragédie: la catharsis, purgation du spectateur de la crainte et de la pitié par l'imitation d'actions suscitant lacrainte et a pitié.

Cette purgation repose sur un acte psychologique très particulier: l'identification du spectateuraux personnages agissants que les comédiens imitent. » Brecht critique avec virulence la catharsis et ses effets anesthétisants au regard de la réalité peu plaisante du monde actuel.

Mais c'est moins Aristote qu'il dénonce que la « dramaturgie aristotélicienne », la tradition du théâtre classique et « vermoulu ».

Il lui reproche de miser sur l'identification entre le spectateur et les personnages afin d'engendrer un plaisir illusoire qui détourne le public de la réalité concrète.

À cette trop grande proximité qui vise,selon lui, à mystifier le spectateur, il oppose la distanciation.

Celle-ci a pour effet d'instaurer précisément unedistance critique.

Elle permet au public de prendre conscience des enjeux politiques et idéologiques de l'actionfictive représentée sur la scène.

La grande difficulté de ce théâtre didactique et épique, qui repose sur uneconception marxiste de l'histoire et de la société, consiste évidemment à concilier, dans l'intérêt du spectateur,didactisme et divertissement, pédagogie politique et magie du spectacle.Aristote laisse le problème de la catharsis en suspens, comme d'ailleurs tous ses interprètes et commentateurs.

On peut regretter la perte du livre II de la " Poétique "; il n'est pas sûr toutefois qu'il ait pu résoudre définitivement le problème.

Doit-on ou non montrer un spectacle représentant des actions et des héros à forte charge émotionnelle ?Produit-il un effet bénéfique ou néfaste sur le public ? Nous ne le savons toujours pas.

il suffit de penser aux débatsactuels, quasiment insolubles, sur la légitimé de la représentation de la violence fictive dans les médias modernes,cinéma ou télévision ? Effet cathartique ou incitation à l'imitation et passage aux actes réels ? Le problème de lacatharsis est encore promis à un bel avenir.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles