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qu'une société de vrais chrétiens pratiquant les vertus évangéliques ne saurait subsister durablement.

Publié le 21/10/2012

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qu'une société de vrais chrétiens pratiquant les vertus évangéliques ne saurait subsister durablement. Peut-être faut-il commettre le mal pour survivre et se faire craindre (ce dont ne sont pas en peine les nations chrétiennes d' Occident). Il passe sa vie dans la controverse, mais pour montrer que les armes des controversistes sont dérisoires. Il attaque la raison : ce n'est pas pour la déprécier, mais pour en prévenir l'abus, car elle ne saurait être employée à établir les vérités de la foi. La raison a sa tâche, qui est de reconnaître les évidences; seulement les vérités de la foi ne sont jamais des évidences. Le sentiment a son domaine. La Grâce a le sien. Il ne faut pas confondre, il ne faut pas se laisser séduire par de fausses conséquences. Inlassablement, et avec une gravité quelquefois un peu lourde, Bayle rappelle à ses contemporains ce devoir tout simple et cette morale d'avant toute morale, qui est de penser juste. « Je dis, Monsieur, que cette manière de raisonner est trompeuse. « JEAN STAROBINSKI FONTENELLE Bernard Le Bovier de r57-1757) On e dirait installé du côté de la mort. L'ouvre de sa jeunesse : les Dialogues des Morts. L'oeuvre de son âge mûr : les Eloges funèbres qu'il prononce en sa qualité de secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences. Enfin, comme s'il appartenait déjà à son royaume, la mort semble l'oublier, pour se souvenir enfin de lui le g janvier 5757, un mois avant le terme de sa centième année. Ce qui nous fait croire que Fontenelle est installé dans la mort, c'est qu'il a introduit la vie ( ou son simulacre) dans les lieux que nous attribuons d'ordinaire à la mort. Une vie un peu exsangue, à laquelle manque la chaleur de la passion. Une vie illuminée par le clair de lune de la raison. Les morts célèbres bavardent spirituellement dans les Champs Elysées... Rien d'insolite ni de surnaturel dans le monde qui nous entoure, pour peu qu'on ait compris le vrai mécanisme de la nature, ce jeu de tourbillons, de poulies, de leviers. Voici donc l'univers dépouillé de ses sortilèges et la nature désenchantée. Pour compenser, des enchantements artificiels et raisonnables nous sont offerts — l'opéra, la conversation qui rendent je ne sais quel charme à cet univers géométrisé. Mélodieusement, et presque tendrement, l'on expliquera le ciel étoilé à une marquise (dans la réalité, elle s'appelle Madame de la Mésangère) dont la beauté blonde fait contraste avec la beauté brune de la nuit. Leçon de choses, devant la Chose universelle qui livre obligeamment quelques-uns de ses secrets. La langue des Entretiens sur la pluralité des mondes ressemble à celle des pièces de clavecin de Couperin : noblement rythmée, digne jusque dans la galanterie, et sans que manque jamais l'ornement conventionnel du trille ou du mordant. « C'est un Orphée qui diminue sa voix dans un lieu resserré qui ne permet point de plus grands éclats. « Mais un Orphée pour qui l'âge des fables et des oracles est révolu, un Orphée qui ne peut plus croire à l'histoire d' Orphée. Fontenelle, en effet, n'éprouve aucune nostalgie pour l'époque où l'homme croyait vivre au milieu des divinités. Cet âge d'or que d'autres regrettent, il s'en fait l'historien désabusé. L'homme de la religion naïve se trompe. Peu à peu, pour notre chance, les vérités se sont fait jour. L'esprit est sorti de sa poétique enfance; il a su quitter les fables pour trouver les faits, et il n'y a rien perdu. L'un des premiers, Fo...

« de cinquate ans, des études diverses, une correspondance, forment une œuvre d' lwn­ nête lwmme plus que de véritable écrivain.

Cet « honnête lwmme », qui critiquait le style de Molière, n'est pas seulement un moraliste; moraliste, il l'est contre La Rochefoucauld, puisqu'il réhabilite l'lwm­ me et les passions, d'une manière d'ail­ leurs toute laïque.

(« Aimez; les passions nobles », seules sources de l'action, de la gloire).

Il repousse une morale qui ne soit pas une morale de l'action dans le monde.

S'éloignant ainsi de l'ataraxie, idéal stoïcien, il se rapproche de l'esprit du stoïcisme en définissant le bien comme « ce qui est estimable à l'égard de toute la terre », joignant par là Montesquieu à ce que sera Kant.

Mais il est aussi philosophe : c'est un systématique qui apporte, dans l'étude de l'esprit, un idéal newtonien : «l'esprit étendu considère les êtres dans leurs rap­ ports mutuels ...

les réunit à leur source et dans un centre commun, et les met sous un même point de vue ».

La réalisation de cet enchaînement universel est entravée par la multiplicité des « types d'esprit ».

Il y a rapport inversement proportionnel entre l'unité de l'esprit et l'étendue des connaissances (chère aux encyclopédistes); rapport qui ne peut être nié que par l'exception du génie, qui bouleverse l'ordre intellectuel, tout en s'éloignant parfois de l'ordre moral : « Il y a de grandes qualités qui s'éloignent de la vertu »; la règle du héros de Vauve­ nargues, réunissant la gloire et l'esprit, est fort proche de la règle même énoncée à propos du finalisme contre la recherche des causes finales : « Tout ce qui a de l'être a de l'ordre >>.

VOLTAIRE François-Marie Arouet, dit (1694-1778) On le sépare difficilement de sa légende, et cette légende tient toute dans son sou­ rire.

Il se moque du duc d'Orléans.

Mais il n'est pas permis de sourire : à la Bastille! Le chevalier de Rohan-Chabot, qui n'aime pas le sourire insolent de cet Arouet transformé en Monsieur de Voltaire, lui fait donner la bastonnade.

La Bastille une seconde fois.

Puis l'exil en Angleterre.

Il sourit encore, mais avec bienveillance, devant les Quakers, devant Shakespeare, ce barbare inspiré.

Il rit à la face de Jeanne d'Arc, il ironise sur Pascal, il tourne la Bible en dérision.

Il fait en souriant l'apologie du luxe et du plaisir.

La mode s'engoue de ce sourire.

Frédéric l'attirera à Berlin.

Mais ce grand prince apprendra à ses dépens qu'il n)> a pas loin du sourire à la morsure.

Et Rousseau, parmi tant d'autres, fera la même expérience : dans ses moins bons moments, le satiriste devient dénonciateur.

La terre tremble à Lisbonne, trente mille personnes périssent.

Le sourire devient sarcasme : qui ose encore prétendre que tout est bien? Qui ose encore parler du meilleur des mondes possibles? Tant de clwses vont mal ; mais nous pouvons en améliorer quelques-unes.

Au travail! Ecrasons l'infâme! Confondons le fana­ tisme et l'intolérance ! Accablons de lwnte les juges qui condamnèrent Calas et La Barre! .•• Le sourire vengeur se creuse et se fige un peu.

Souvent le mot pour rire tient lieu de dernier mot.

La lutte veut cela.

A vrai dire, Voltaire eût pu mettre sa gloire à profit pour finir ses jours dans l'inaction.

Mais il prifère les dangers et la comédie d'une demi­ clandestinité; il se met en situation d'échapper à toutes les persécutions et vient régner à Ferney, lieu-frontière entre deux Etats et deux religions.

Toute l'Europe accourra en pèlerinage.

Elle a fait son idole de ce pourfendeur d'idoles, elle vient adorer cette mâclwire, ces rides, ces yeux souriants.

Il paraît immor­ tel, et se croit toujours mourant.

Mais le jour vient où Paris l'accueille en triomphe.

Il assiste à son apothéose; on couronne son buste sur la scène de la Comédie-Française.

Devenu écrivain offi­ ciel, il n'a plus de puissants contre qui sourire, et par conséquent il meurt, âgé de quatre-vingt-trois ans, le 30 mai 1 778.

Mais, chemin faisant, il a imposé Locke et Newton aux Français.

Dans l'Essai sur les Mœurs, il a rompu avec la traditionnelle histoire des princes et des guerres, pour lui opposer cette nouveauté : l'histoire de la culture et de la civilisation.

Il a affirmé le progrès de l'humanité, tout en proclamant l'unité permanente et l'universalité de l'esprit humain : contradiction sensible, mais qui invite à réfléchir...

Il a soutenu que tout se fait nécessairement dans l'univers.

Mais il n'a pu accepter la présence du mal, et, pour l'expliquer, il n'a pu accepter non plus l'idée du péché originel.

Que croire? Qu'on ne peut rien croire.

Micromégas promet de révéler « le bout des clwses », mais son livre est tout blanc.

Seulement cette blancheur en dit encore trop long.

Voltaire n'est pas sceptique par principe.

Il est celui qui, devant toute affirmation, et même celle du livre blanc, dit encore Mais, à la façon de Zadig.

« Comme il disait Mais, l'ange prenait déjà son vol vers la dixième sphère.

» JEAN STAROB1NSK1 DIDEROT Denis (1713-1784) L'expérience! Avec son siècle, à partir de Hobbes et de Locke, Diderot ne cesse d'invoquer ce qui peut tomber sous le sens comme seul principe de connaissance valable.

Il s'agit là, bien entendu, d'un idéal, d'une philosophie, plus que d'une métlwde réellement appliquée.

Cette notion d'expérience devait exclure la considé­ ration des causes et des substances : l'ontologie métaphysique.

Elle n' em­ pêche pas Diderot d'opter pour le maté­ rialisme.

Dans l'espace absolu, la matière, partout présente, se distribue, non en atomes, qui supposent le vide, mais en corpuscules ou molécules.

Ce n'est pas le mécanisme corpusculaire de Descartes.

La matière ne se réduit pas à l'étendue lwmogène et uniforme : elle implique la force, ses molécules sont hétérogènes, il n'en est pas deux identiques.

Un dynamisme, donc, plus proche de Leibniz; que de Des­ cartes.

Et un vitalisme, sans doute.

De la pierre à l'homme, la Nature doit être une.

Diderot fait de la sensibilité tantôt une propriété inhérente à la force moléculaire - ainsi la perception, dans la monade, ne se sépare pas de l'appéti­ tion - tantôt la conséquence de l' orga­ nisation (résultant elle-même d'une com­ position des forces primitives).

En tout cas, les instincts qui différencient les espèces dépendent de l'organisation.

Parmi ces instincts : la raison.

Elle n'est appa­ rue, dans l'évolution de l'espèce, qu'avec une infinité d'expériences ancestrales pas­ sées en habitudes et, ces habitudes, en instinct, dans la nuit de l'inconscient.

La raison peut changer encore.

D'ailleurs, si son origine est biologique, son déve­ loppement n'est possible que dans et par une société qui lui en offre les loisirs.

L' lwmme n'est pas tombé par accident dans la vie sociale, il ne s'est élevé à la raison que par elle, elle lui est conna­ turelle.

De même qu'un tout organique est un consensus de tendances où chaque organe a son intérêt propre, de même la société, harmonisant les tendances indi­ viduelles, qui cherchent leur satisfaction dans le bonheur, devrait subordonner les intérêts privés à l'intérêt général.

Il fau­ drait donc que l'intérêt commandât le droit civil, politique et pénal.

Par malheur, trop de conventions, nées de l'ignorance, ont perverti les règles naturelles de la société.

D'où le fanatisme religieux, l'esclavage de la pensée, l'inégalité par la loi, les injustices de l'impôt, la mau­ vaise organisation du commerce, l'absur­ dité d'un enseignement sans rapport avec les exigences techniques du présent, etc.

Le remède? Pour Diderot, un libéra­ lisme éclairé.

En morale, l'expérience - ici, comme partout, synonyme de la nature - enseigne un naturalisme utilitaire.

Egoïsme et cruauté, voilà, semble-t-il, le fonds primitif.

C'est que le bon et le mauvais, variables selon la constitution des êtres, se définissent d'abord par l'utile à l'es­ pèce et à l'individu : l'amour-propre est principe de conservation, la cruauté exprime l'énergie, principe d'expansion.

Plaisir, douleur règlent nos premières démarches.

Cependant, par notre nature sociale, le bon et le mauvais sont changés en bien et en mal.

Grâce à « je ne sais quelle singerie des organes », la sympa­ thie élève l'amour-propre à l'intérêt général et fait de l'énergie vitale un facteur de progrès.

Ce n'est pas un Dieu illusoire, c'est la société qui nous laisse entrevoir une morale universelle sans transcendance, sans innéité, patiemment conquise et apprise dans le mouvement même de l'évolution sociale.

Cette dernière n'est pas fatale.

Elle est nécessaire.

Diderot veut dire : soumise, comme tout, au déterminisme.

Nous n'avons pas besoin du libre-arbitre, cette chimère.

La liberté consiste à découvrir, utiliser les lois de la nature et de notre nature pour promouvoir, par la science et par la politique, le progrès moral.

En art également, il faut imiter la nature.

Le génie est une création de la vie.

Le beau a l'unité d'un organisme et il se place sous le principe de l'utile : mais, comme l'énergie vitale peut s' exal­ ter en cruauté, le beau s'exalte parfois au sublime, par delà les plaisirs du goût, jusqu'à « quelque chose d'énorme, de barbare et de sauvage » qui dénonce. »

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