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Roald Amundsen

Publié le 22/02/2012

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L'exploration aux pôles ne manque pas de grands hommes ; pour ces voyages sans indulgence, celui qui marque une route est toujours un géant. On peut traverser un continent par hasard, forcer une barrière religieuse par diplomatie, découvrir une île par erreur et l'exploration des régions normalement supportables exige qu'on sélectionne et qu'on distingue des types qui vont de l'apôtre au simple repris de justice. L'explorateur polaire échappe toujours aux proportions moyennes ; même attiré par l'or, il doit payer un tel prix sa victoire que presque tous entrent en ligne avec les plus grands du reste du monde. Mais, parmi eux, quelle place peut tenir l'homme qui franchit le premier le passage du Nord-Est, qui le premier atteignit le pôle Sud, qui survola le premier le pôle Nord en dirigeable et qui disparut en avion en se portant au secours d'un compagnon en détresse ? C'était une volonté lucide, servie par l'intelligence du savant et l'instinct du marin. Il avait aussi la plus belle qualité des grands explorateurs : il était humain, il savait choisir ses hommes et les garder. On sait combien d'expéditions ont pu échouer dans la discorde ; on a vu, dans d'autres régions, des compagnons brouillés réussir séparément leurs prouesses mais dans les régions polaires, où seul l'esprit d'équipe peut assurer le triomphe, l'équipe divisée est perdue.
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« que Manni, le petit Netsilik qu'ils avaient adopté, se noya accidentellement.

Le reste du voyage se passa sansincident.

Le détroit de Béring était franchi le 30 août et ce n'est plus que l'enthousiasme qui monte d'escale enescale jusqu'à San Francisco qu'ils atteignent le 19 octobre.

"C'est là que repose le vieux Gjöa...

et il en avait grandbesoin," dit Amundsen dans son rapport. Ici débute la course vers le pôle Sud.

Le "continent austral" des Anciens, héritage d'une logique qui voulait, au suddu monde, une masse équilibrant le poids de l'hémisphère boréal, a hanté tous les siècles.

Il reculait à chaqueexploration nouvelle, mais rares sont les voyageurs au Sud qui n'ont pas pris une île, un iceberg, un rivage, pour lapointe avancée de la Terra australis incognita.

De déception en déception, on avait fini par ne plus croire aux terresaustrales et Cook avait donné le coup de grâce au continent-contrepoids.

Puis on se mit à découvrir des îles, deplus en plus nombreuses jusqu'au jour où, en 1830, Biscoë vit pour la première fois la côte du continent antarctique: la terre Enderby.

A partir de ce jour, par pointes successives, les marins dessinèrent en pointillé les contours d'uncontinent véritable, coiffant le pôle Sud, moins énorme que ne l'imaginait le Moyen Âge mais grand pourtant commel'Australie.

A la fin du XIXe siècle, l'attaque était devenue possible.

Amundsen, à vingt-six ans, en 1898, avaitparticipé comme pilote à l'expédition du Belgica, le premier bâtiment qui eût hiverné dans les glaces australes.

De1901 à 1910, Scott et Shackleton avait progressivement poussé vers l'intérieur, Edworth Davis avait atteint le pôlesud magnétique.

Le moment du dernier effort approchait. Amundsen, en 1910, quitta la Norvège à bord du Fram avec sept compagnons et cent quinze chiens groenlandais.Son but officiel était une expédition vers le pôle nord, mais il changea sa route en secret et fonça directement versle sud.

Son long voyage, qui devait le conduire en été boréal de 1911 au détroit de Béring, lui permit d'arriverpendant l'été austral, en février 1911, à la barrière de Ross.

Il mouilla à 79° à "Framheim" pour hiverner et profita dela neige pour préparer des dépôts sur le premier tiers des mille deux cents kilomètres qui le séparaient du pôle.

Ilattendit ensuite le printemps et, en octobre, avec cinq traîneaux, soixante-dix chiens, quatre mois de vivres, il sedirigeait vers le sud.

Helmer Hansen, du passage du Nord-Ouest, l'accompagnait avec trois autres compatriotes. Ils franchissent la barrière de Ross et attaquent le continent par étapes de plus de trente kilomètres par jour.

Vingt-deux jours après, ils atteignent les montagnes.

Suivant le glacier Axel-Heiberg, ils abordent la chaîne de la Reine-Maud.

Les cols qui séparent des sommets de 4000 mètres sont franchis sans trop de difficultés, malgré latempérature.

Le glacier de la "Salle de danse du Diable" leur donna plus de peine, puis de nouveaux cols s'offrirentpour aboutir finalement à deux cents kilomètres du but, sur le plateau polaire, à 3200 mètres d'altitude.

Le 14décembre 1911, Amundsen élevait une tente et le pavillon norvégien sur le Pôle Sud. Un mois après, Scott, concurrent infortuné, retrouvait cette tente et mourait au retour.

Amundsen mit quinze joursde moins pour retourner à Framheim et rentra en Europe sans incidents.

Comme pour le Passage du Nord-Ouest,tout s'était déroulé avec une maîtrise incomparable, avec une sûreté et une rapidité bouleversantes : l'aller et leretour, de la Barrière au Pôle, avaient pris quatre-vingt-dix-sept jours ! Scott, lui, avait marché soixante-dix-neufjours pour atteindre le Pôle, et soixante-sept jours sur la route qui le conduisit à la mort.

Dans toute l'Oeuvred'Amundsen, on retrouve le même rythme, les mêmes proportions : une préparation longue et minutieuse, uneexploration précise, rapide, dans le plus petit bâtiment possible, avec le minimum de compagnons.

Par la suite, cettetendance s'accusera encore. Pourtant, lorsqu'il partit avec le Maud en 1918, il caressait un projet de longue haleine.

On sait qu'en 1867, laJeannette, commandée par l'Américain De Long, avait été prise dans les glaces aux abords de l'île Wrangel, près dudétroit de Béring, et était partie en dérive vers le pôle, avec la banquise.

Abandonnée par son équipage au momentoù elle coulait, la Jeannette avait libéré des épaves qui, en 1884, dix-sept ans après, avaient été repêchées auGroenland.

Nansen, en 1893, s'était volontairement fait prendre par la banquise ; en trois ans, il avait traversé lacalotte polaire, mais n'avait pu toucher le pôle et était rentré par le Spitzberg.

En 1909, par ailleurs, Peary avaitatteint le pôle Nord en traîneau.

Amundsen ne songeait donc pas à s'inscrire premier dans son projet, il voulaitrenouveler l'exploit de Nansen et atteindre le pôle en utilisant le Maud comme base lorsqu'il arriverait au point le plusseptentrional de sa dérive.

De 1918 à 1922, il fit plusieurs tentatives, mais échoua, tantôt immobilisé, tantôt pris pardes contre-courants qui le sortaient du pack.

Il resta quatre ans sur place, renouvelant ses efforts et mûrissant unenouvelle méthode. En 1922, il songeait le premier à gagner le pôle par avion.

Le précurseur de l'exploration aérienne du pôle avait été leSuédois Andrée, parti en 1897, en ballon, avec deux compagnons et dix pigeons voyageurs.

Il fallut trente-trois anspour savoir qu'Andrée avait atterri loin du pôle, à 83° N.

32° E., et que tous trois étaient venus mourir à trois centskilomètres de là, sur la terre de Giles.

Si Amundsen n'inventa pas l'exploration aérienne, il sentit que l'avionconduirait au pôle.

Ce moyen nouveau répondait bien à sa tactique : rapide, il ne risquait qu'un minimumd'existences humaines et limitait les difficultés de manOeuvre d'un groupe important d'explorateurs.Mais l'avion n'était pas encore prêt à accomplir sa pensée.

En 1922, il se disposa à partir avec un Junkers-Larsenqu'il abandonna aux essais.

En 1925, avec deux hydravions Dornier-Wal (le N.

25 commandé par lui et le N.

24commandé par Ellsworth) il atteint 87° 44' N., à deux cent cinquante kilomètres du but, perd un appareil et rentrede justesse avec les deux équipes à bord du N.

25.

C'est Byrd, l'année suivante, qui survolait le premier le pôle avecun biplan Ford. Mais Amundsen n'était pas découragé.

Il travaillait à la mise en état d'un vieux dirigeable italien, construit parNobile, le Norge, et le 11 mai 1926, il partait de King's bay avec Ellsworth, Nobile et douze collaborateurs.

Ensoixante-douze heures, après avoir subi le givrage et la tempête, le Norge survolait successivement le pôle, la côte. »

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