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Publié le 29/09/2014

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1 Saral Sarkar Comprendre la crise économique actuelle Une approche écosocialiste Publié par Initiative Ökosozialismus © Saral Sarkar, Cologne. 2012 Traduction réalisée par Camille Lambion, Céline Letawe et Marina Schmidt (master en traduction ULg) N'hésitez pas à diffuser ce texte dans sa version intégrale 2 Contact : Initiative Ökosozialismus c/o Bruno Kern Mombacher Strasse 75A 55122 Mayence Allemagne Tél : 0049/6131236461 Email : [email protected] Retrouvez-nous sur Internet : www.oekosozialismus.net www.ökosozialismus.de 3 Table des matières Introduction ............................................................................................................................................. 4 1. Des explications superficielles ......................................................................................................... 4 2. Pourquoi la bulle immobilière a-t-elle éclaté ? ............................................................................... 6 3. Les causes plus profondes ............................................................................................................... 7 4. Les théories des crises chez Marx, Keynes et Schumpeter - des théories solides mais dépassées. 12 5. L'actuel dilemme keynésien .......................................................................................................... 15 6. Perspectives d'avenir ..................................................................................................................... 17 7. Conclusion...................................................................................................................................... 20 Bibliographie .......................................................................................................................................... 22 4 Introduction La crise économique actuelle, qui a débuté approximativement en janvier 2008 et qui perdure jusqu'aujourd'hui1, a bouleversé le monde. Politiciens, économistes et journalistes débordent de superlatifs à son sujet. Elle est considérée comme la pire crise économique depuis la crise de 1929. D'un point de vue superficiel, on peut dire qu'il y a eu, au cours des dernières décennies, plusieurs crises semblables, même si elles n'ont pas été aussi graves. On a connu des krachs boursiers, des banques et des pays en faillite, des crises financières, des périodes de resserrement du crédit, de fortes récessions etc. Ces phénomènes, je les décris dans mon livre Die Krisen des Kapitalismus (2010, également disponible en anglais sous le titre The Crises of Capitalism). Cependant, l'ordre de grandeur, c.-à-d. la profondeur et l'ampleur de la crise actuelle sont telles que toutes les personnes concernées ont paniqué à un moment ou à un autre. De nombreux observateurs ont même craint pour la subsistance du système capitaliste. Ne s'agissait-il que d'une crise de plus dans le système capitaliste ? Ou de la crise du capitalisme, attendue depuis longtemps par les marxistes, les communistes, les socialistes et autres critiques du système capitaliste ? Il y a au moins un point qui fait l'unanimité : le capitalisme ne sera plus jamais ce qu'il était avant la crise. Le capitalisme effréné, mondialisé et néolibéral sera à l'avenir toujours dompté dans une certaine mesure, processus qui a déjà commencé aujourd'hui. Je pars du principe que les lecteurs de cet article sont au courant des principaux faits et événements de la crise. Mon intention se limite à permettre une compréhension plus profonde et plus globale de cette crise, c'est pourquoi je ne répèterai pas les analyses superficielles et les spéculations sur l'avenir déjà fort répandues. 1. Des explications superficielles Les économistes des différentes écoles de pensée actuelles expliquent presque tous la crise de la même manière. Leurs explications, que je considère comme superficielles, sont sûrement déjà bien connues de mes lecteurs. Malgré tout, je vais en résumer ci-dessous les principaux éléments afin de mettre en évidence les différences existant entre ces explications et la mienne. 1. L'élément central de ces explications est le suivant : Les crédits immobiliers subprime représentaient la majeure partie des nombreuses créances pourries, raison principale et déclencheur de la crise aux Etats-Unis. Ces crédits avaient été accordés par des banques d'affaire et des établissements hypothécaires à des acheteurs normalement considérés comme insolvables en raison de leurs faibles revenus et/ou de leur emploi précaire. Ces crédits risqués ont néanmoins été octroyés parce que la structure du marché financier américain était déficiente. Les banques locales n'ont pas hésité à octroyer ces crédits puisqu'elles savaient qu'elles les revendraient immédiatement aux deux géants du crédit hypothécaire Freddie Mac et Fannie Mae. Ceux-ci ont émis des titres à partir de portefeuilles de crédits subprime (titrisation) et les ont vendus à des banques dans le monde entier. Et ces dernières les ont achetés parce qu'elles voulaient placer à profit leurs liquidités excédentaires. 2. La Réserve fédérale américaine (FED, la banque centrale des Etats-Unis) a maintenu un taux directeur très bas sur une longue période de temps. Il était dès lors aisé pour les banques de lui emprunter d'énormes sommes d'argent pour les prêter à leur tour à des personnes insolvables et à 1 Ce texte a été rédigé en août 2010 et légèrement modifié en septembre 2011. 5 des spéculateurs attirés par les faibles taux. Ce qui a donné naissance à un boom immobilier et plus tard à une bulle immobilière. 3. Les banquiers étaient voraces. Vu que les bonus, calculés à partir du chiffre réalisé, représentaient une bonne partie de leurs rémunérations, ils ont pris énormément de risques, tant dans l'octroi de crédits que dans la spéculation. 4. Le secteur financier et bancaire était trop peu régulé et la mondialisation y avait eu lieu de façon incontrôlée. Par conséquent, une quantité énorme de titres terriblement risqués, extrêmement compliqués et quasiment incompréhensibles ont été vendus, principalement à des banques. Ces éléments ne se rapportent pas seulement à la situation aux Etats-Unis mais aussi à celle de la plupart des grands pays industrialisés. Selon moi, ces explications sont superficielles et elles ne sont pas convaincantes. Elles se basent sans aucun doute sur des faits. Mais elles n'offrent pas de réponse satisfaisante à la question de savoir pourquoi la crise a été si grave, si étendue et si longue et pourquoi elle n'a pas pu être surmontée comme les crises similaires qui l'ont précédée : le krach de 1987, la crise asiatique de 1997-1998 et la crise de 2001-2003 (plus de détails dans Sarkar 2010). Elles n'expliquent pas pourquoi la crise perdure encore ni pourquoi les perspectives d'avenir sont toujours aussi sombres. De plus, deux de ces faits sont vraiment banals. La voracité des banquiers n'explique rien, car elle fait depuis toujours partie des piliers du système capitaliste. On s'attend à ce que tous les acteurs du système soient voraces - à un degré plus ou moins élevé. Et la dérégulation du secteur financier fait partie intégrante du capitalisme néolibéral mondialisé depuis les années 1980. Les deux autres faits étaient certes quelque peu inhabituels. Les banquiers ont toujours accordé des crédits un peu risqués. Et il est normal qu'ils doivent faire une croix sur une partie d'entre eux. Mais dans ce cas-ci, l'ampleur des crédits subprime était telle que les affaires n'ont pas pu se poursuivre comme d'habitude quand, aux Etats-Unis, le boom immobilier a touché à sa fin, les prix de l'immobilier ont commencé à chuter et des milliers de débiteurs ne sont plus parvenus à rembourser leur crédit dans les temps. Contrairement à ce qui se fait d'habitude, les banques créancières n'ont pas pu récupérer leur argent en vendant les maisons. Pendant la période concernée, la politique de la Réserve fédérale était elle aussi inhabituelle. Normalement, la FED commence à réduire la quantité d'argent en circulation dès que l'économie montre les premiers signes de surchauffe, comme un taux d'inflation supérieur à la moyenne ou la formation d'une bulle sur le marché des actions et de l'immobilier. Pour ce faire, on a l'habitude d'élever le taux directeur, ce qui entraîne une augmentation des taux d'intérêt sur les marchés financiers. Mais cette fois, la FED a conservé un taux directeur bas, laissant ainsi gonfler les bulles. On a reproché à la FED et aux banques cette politique inhabituelle qui, selon les critiques, a été la principale cause de cette crise aiguë. Mais imputer la crise à ce seul élément ne se justifie pas et empêche même d'en trouver les véritables causes et d'en comprendre la nature. Il a été rapporté que le boom immobilier était venu à point nommé pour les hommes politiques au pouvoir. La voracité n'est pas seulement une caractéristique des banquiers et des spéculateurs. Les gens normaux, et en particulier les Américains, aimeraient eux aussi devenir riches. Cela fait partie du « rêve américain «. Et posséder une maison, aussi tape-à-l'oeil que possible, était jusque là la voie royale des « petites gens « vers la richesse, d'autant plus que, selon l'opinion générale, la valeur des maisons, contrairement à celle des actions, ne pouvait qu'augmenter. Les hommes politiques ont bien sûr voulu aider les citoyens à réaliser ce rêve. Après tout, les pauvres et les citoyens de la classe moyenne constituaient la majorité des électeurs. Le parti démocrate avait un intérêt tout particulier 6 à suivre cette politique, partant du principe que son électorat potentiel comptait beaucoup d'ouvriers et d'Américains pauvres. En 1997, à l'initiative du président démocrate Bill Clinton, une loi exonérant d'impôts les bénéfices issus de la vente de biens immobiliers a été votée, ce qui a encouragé la spéculation. Mais un boom immobilier faisait également l'affaire du parti républicain. Le président George W. Bush (2001-2008) a déclaré qu'il souhaitait à tous les Américains de pouvoir posséder une maison. Les politiciens de tous bords ont ainsi fait pression, de manière directe ou indirecte, sur les banques pour qu'elles octroient aux Américains pauvres des crédits leur permettant d'acheter une maison. Toutefois, il serait faux de conclure que des considérations électoralistes de politiciens égoïstes auraient à elles seules causé l'envol massif des crédits subprime. Cette situation avait aussi un intérêt sur le plan macro-économique. Il faut garder à l'esprit que les Etats-Unis ont traversé une période de récession au début des années 1990 mais aussi dans les premières années de ce siècle. La croissance du PIB est passée de 3,5% en 1989 à -0,5% en 1991. 2000-2001 a vu s'effondrer la dite « nouvelle économie «. Les cours de la bourse ont chuté pendant longtemps et l'économie réelle est tombée dans une période de récession. Le taux de croissance du PIB est passé de 4,4% en 1990 à seulement 0,8% en 2001. Entre 2000 et 2002, les entreprises de télécommunication ont licencié un demi-million d'employés. Le taux de chômage officiel est passé de 4% en 2000 à 5,8% en 2002 (chiffres de l'OCDE 2000/2, OCDE 2004/2 et Brenner 2003). Face à cette récession, même le président républicain Georges W. Bush a dû prendre des mesures typiquement keynésiennes pour relancer l'économie, qui a commencé à reprendre en 2003-2004. Un boom immobilier basé sur des crédits subprime allait parfaitement bien avec de telles mesures. Il permettait d'encourager la croissance et l'emploi à un moment où de plus en plus d'entreprises américaines du secteur secondaire délocalisaient leur production vers des pays à bas salaires, voire même fermaient carrément leurs sites. La construction de maisons à l'intention des citoyens américains ne peut pas être réalisée dans des pays à bas salaires et les maisons ne peuvent pas être entièrement importées de l'étranger (contrairement aux voitures par exemple). Les maisons devaient être construites aux Etats-Unis. De plus, elles sont des biens de première nécessité. Et pourtant, en 2006, des observateurs ont commencé à mettre en garde contre une bulle immobilière et, peu de temps après, le marché immobilier a commencé à s'essouffler. 2. Pourquoi la bulle immobilière a-t-elle éclaté ? Il est simpliste de dire que toute bulle éclate tôt ou tard. Il est important de faire la différence entre une bulle immobilière et une bulle financière. Cette dernière a également éclaté, en octobre 2008, après la première. On a dit que, dans la semaine qui a suivi l'éclatement de la bulle financière, 2,5 billions de dollars avaient disparu et que les actionnaires avaient perdu 8,4 billions de dollars depuis le pic atteint par le cours des actions un an auparavant (Wall Street Journal, 10.10.2008). Mais qu'est-ce que cela signifie réellement ? On dit dans ce genre de cas que la fortune s'est volatilisée. Mais en réalité, rien de concret n'a disparu, pas une maison, pas une voiture, rien. Ce qui s'est volatilisé, c'est seulement quelques chiffres sur du papier. Les 8,4 billions de dollars n'étaient qu'une fortune fictive. Un an avant d'atteindre leur apogée, les actions avaient été nettement moins bien cotées. C'est uniquement la spéculation qui avait fait grimper leur valeur marchande. Après le krach, ces valeurs qui de toute façon n'étaient que fictives ont cessé d'exister. En fin de compte, la valeur réelle des actions dépend uniquement de la demande des produits de l'entreprise en question. Quand une entreprise doit être liquidée en raison d'une demande 7 insuffisante de ses produits, la valeur de ses actions peut devenir nulle. Les maisons, par contre, sont des choses très concrètes, avec une valeur d'usage considérable. En général, la demande de maisons ne fait jamais défaut vu que la population croît dans presque tous les pays et que les gens veulent toujours de meilleures habitations. (Seules certaines maisons bien particulières ne trouvent pas d'acheteur.) Dans notre cas concret, celui de la crise des subprime aux Etats-Unis, le problème n'était pas que les débiteurs n'avaient plus envie d'habiter dans les maisons qu'ils avaient achetées à crédit. Il ne s'agissait pas, du moins pour la plupart d'entre eux, de spéculateurs. Le problème était que, parmi eux, des centaines de milliers n'ont plus pu rembourser leurs dettes suite à un changement de circonstances indépendant de leur volonté. Une fois devenus insolvables, ils ont été expulsés par les banques créancières et leurs maisons ont été mises en vente, ce qui a déclenché une réaction en chaîne. Les prix des maisons sont tombés de plus en plus bas et on a construit de moins en moins de nouvelles maisons. Donc la question décisive pour comprendre la crise actuelle est la suivante : Pourquoi des gens normaux qui avaient acheté leurs maisons à crédit sont-ils devenus incapables de rembourser leurs dettes ? Lorsque la crise du marché immobilier a gagné le marché financier et que la chute du cours des actions, par l'effet de richesse négatif, a affaibli la solvabilité et le pouvoir d'achat de millions d'actionnaires, le ralentissement de la conjoncture a eu des répercussions sur l'économie réelle, renforçant ainsi la récession qui, selon des économistes américains, avait déjà commencé en décembre 2007. Comme les maisons, les voitures par exemple sont des choses très concrètes qui ont une grande valeur utilitaire. Le problème n'était pas que les Américains n'avaient soud...

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