Sartre et le désespoir
Publié le 24/03/2015
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Ce texte s'attache à la définition du concept de désespoir, qui joue un
rôle important dans les philosophies de l'existence depuis le
Traité du
désespoir
de Kierkegaard.
II s'agit de tirer les conséquences pratiques de
l'état de délaissement dans lequel est laissé
le Pour-soi : il ne faut compter
que sur les possibles que notre action suppose et
ne compter que sur soi
seul, sans attendre l'intervention de Dieu.
Le concept de désespoir est considéré par Sartre comme un concept
«extrêmement simple», qui n'a en rien le sens complexe que lui donne
Kierkegaard : puisqu'il n'y a pas de valeurs sur lesquelles compter
ni de
commandements divins qu'il suffirait
de suivre, il est impossible de déter
miner
a priori ce que je dois faire ou bien l'issue de mon action.
C'est
dans cette perspective que
je suis désespéré, non au sens où je cesserais
d'agir et que
je m'abandonnerais au quiétisme, mais au sens où je ne
compterai pas sur des possibles qui seraient donnés d'avance mais sur
« l'ensemble des probabilités qui rendent notre action possible.
» (lignes
2-3) Le possible n'est donc pas un élément préexistant
au réel, même si je
peux compter sur certaines probabilités objectives (le fait que le train ne
déraillera pas, si j'attends un ami), mais il succède au réel au sens où il est
produit par mon action.
Il n'y
a, en ce sens, aucun possible qui viendrait au devant de ma
volonté, qui serait prévu par Dieu, mais c'est la volonté qui provoquera
ses possibles.
Ce que Sartre rapproche de la formule de la morale par
provision de Descartes, dans le
Discours de la méthode, troisième partie :
« tâcher plutôt à me vaincre que la fortune, et à changer mes désirs que
l'ordre du monde.
» (citée inexactement ligne 11) En réalité, la propo
sition cartésienne est très différente de ce que lui fait dire Sartre :
Descartes s'inspire de la morale stoïcienne, qui affirme que
le cours du
monde ne dépend pas de nous et que ne dépendent de nous que nos repré
sentations et nos désirs ; il s'agit donc pour nous de renoncer à nos désirs
plutôt qu'à ce qui
«ne dépend pas de nous» (Epictète).
À l'inverse, pour
Sartre,
il n'y a rien à quoi je doive renoncer a priori car je ne saurai ce qui
est possible qu'après avoir agi :
il n'y a ni possibles ni impossibles sinon
ceux qui sont dessinés par
le champ de mon action ; il n'est dans cette
perspective rien qui viendrait limiter ma liberté, dont on a
vu qu'elle était
infinie :
un obstacle n'est infranchissable que pour celui qui a le libre
projet de
le franchir (cf.
L'Être et le Néant, p.
545), et il ne dira qu'il était
impossible
à franchir que parce qu'il a renoncé à le surmonter..
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