SIEGFRIED, pièce de J. Giraudoux

SIEGFRIED, pièce de J. Giraudoux (1928), en 4 actes, tirée de son roman, Siegfried et le Limousin (1922). Selon Giraudoux lui-même, c'est « l'histoire d'un Français privé de la mémoire par une blessure reçue à la guerre, rééduqué sous le nom de Siegfried par ceux qui l'ont recueilli dans une nation et des mœurs qui ne sont pas les siennes, et ramené par des amis à son ancienne vie ». Le thème de l'amnésie avait déjà été évoqué par Giraudoux dans Lectures pour une ombre (1917), celui de la vie double dans Suzanne et le Pacifique (1921), celui de l'évasion et du retour dans Simon le Pathétique (1918), Suzanne (1921), Juliette au pays des hommes (1924). La question du couple

France-Allemagne avait été posée dans Siegfried et le Limousin, bien sûr, mais aussi dans Bella (1926). Pour l'écrivain qui essayait d'amplifier sa voix grâce au théâtre qu'il appelle un « mégaphone », le problème était plus que politique : il s'agissait d'« introduire la poésie en France, la raison en Allemagne ». Giraudoux, germaniste fervent et diplomate français, voit très clairement les dangers que court l'Allemagne ardente et poétique, mais meurtrière, ceux que court la France immobile, enlisée dans son cartésianisme. Mais il était délicat en 1928 de parler de l'« âme franco-allemande », quelque dix ans après la guerre : René Doumic, directeur de la Revue des Deux Mondes,