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Spinoza: passions, lois et politique.

Publié le 08/05/2005

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spinoza
Si les hommes étaient ainsi disposés par la nature qu'ils n'eussent de désir que pour ce qu'enseigne la vraie raison, certes la société n'aurait besoin d'aucune loi, il suffirait simplement d'éclairer les hommes par des enseignements moraux pour qu'ils fassent d'eux-mêmes et d'une âme libre ce qui est vraiment utile. Mais tout autre est la disposition de la nature humaine; tous observent bien leur intérêt, mais ce n'est pas suivant l'enseignement de la droite raison; c'est le plus souvent entraînés par leur seul appétit de plaisir et les passions de l'âme (qui n'ont aucun égard à l'avenir et ne tiennent compte que d'elles-mêmes) qu'ils désirent quelque objet et le jugent utile. De là vient que e société ne peut subsister sans un pouvoir de commandement et une force, et par suite sans des lois qui modèrent et contraignent l'appétit du plaisir et les passions sans frein. SPINOZA
spinoza

« Quelle est la conséquence de cette nature divisée pour le problème qui nous occupe ici, à savoir la vie en société etla nécessité ou non de lois contraignantes? Spinoza donne à cet égard deux indications intéressantes: les passions« n'ont aucun égard à l'avenir et ne tiennent compte que d'elles-mêmes ».

Ces deux caractères font des passionsles ennemies de la vie en société.

En effet, la société ne tient que dans la durée, par une stabilisation des rapportset une orientation des efforts vers le long terme.

Le lien social se tisse à travers des relations stables de proximitéet de confiance, et aussi des coutumes communes.

Il est d'autre part nécessaire de coordonner les efforts deshommes et d'établir des échanges, de reconnaître à certains des priorités, c'est-à-dire que chacun relativise aumaximum ses intérêts propres.

Les passions, au contraire, sont par nature exclusives et partiales.Face à ce trait profond de la nature humaine, dans lequel Kant verra « l'insociable sociabilité » de l'homme, quellesolution Spinoza préconise-t-il? Sans prétendre que cela soit la panacée, il justifie au moins l'existence des lois : lespassions auraient tôt fait de mettre à mal le lien social si une autorité supérieure n'imposait une régulation : tel estle rôle de l'État et de ses institutions comme la justice ou la police, qui imposent une stabilisation des moeurs et unemodération des passions de sorte qu'au moins la liberté de chacun s'arrête où commence celle des autres.

Ce queSpinoza ne dit pas ici, c'est que l'État dispose de moyens plus discrets pour imposer paix et modération : lesinstitutions religieuses, la religion en général a une dimension politique qu'elle exerce en recommandant le respectdes textes et des institutions, l'ascèse personnelle, la modération, voire un renoncement plus radical.

Spinoza fut undes premiers à expliciter la fonction « théologico-politique » de la religion, et cette approche lui valut les piresennuis.On pourrait cependant voir dans ces propos un déplacement subtil du centre d'intérêt : on avait commencé parmontrer logiquement que le lien social doit être cimenté par un ordre légal; mais lorsque l'on considère froidement leslois concrètes, y voit-on directement un outil précieux pour la vie sociale la plus harmonieuse ? Aussi le texte deSpinoza, qui semble essentiellement disséquer les éléments déterminants chez l'homme, peut-il être lu, à la fin,comme un appel lancé aux régimes politiques pour qu'ils alignent leur Constitution et leurs lois sur cette mission.Victime de ses passions, l'homme n'est rien sans la loi; mais cette dernière ne lui apporte pas toujours ce qu'il peuten attendre, notamment en raison du fait que ce sont des hommes qui la font et qu'ils tentent souvent de la capterau service de leur propre intérêt passionnel à court terme. Conclusion C'est donc un enseignement riche et complexe que nous propose Spinoza dans ce texte.

Il nous invite à un effort delucidité pour renoncer à l'idée d'une harmonie spontanée et sans contrainte et accepter l'idée d'une soumission à laloi; mais il pose par là même une condition : la loi doit elle-même être conforme à la droite raison, c'est-à-direcompréhensible et acceptable par tous, sans quoi elle pourra à juste titre être rejetée.

Toute la question, abordéepar Spinoza dans d'autres textes, est alors de savoir quelle peut être l'attitude des sujets face à une loi injuste etcomment peut se manifester leur désaccord sans pour autant susciter une nouvelle explosion des passions. SPINOZA (Baruch). Né à Amsterdam en 1632, mort à La Haye en 1677. Il apprit l'hébreu, le latin, le français dans les écoles juives et latines, et travailla dans la maison de commercefamiliale.

Accusé d' « effroyables hérésies », Spinoza échappa de peu à un assassinat en 1656, et fut excommuniéde la synagogue la même année.

Il apprit la taille des instruments d'optique, vendit des verres télescopes pourvivre, et s'initia à la philosophie de Descartes.

Il constitua un cercle d'études près de Leyde, travailla intensémentde 1663 à 1670, et acquit une réputation considérable.

En 1670, il s'installa à La Haye, partageant sa vie entre laméditation philosophique et la taille des verres pour microscopes.

Il fut chargé en 1673 d'une mission secrète auprèsdu prince de Condé et du maréchal de Luxembourg.

Sa position devint ensuite de plus en plus difficile.

Il se rendit àAmsterdam, mais renonça à s'y établir.

En 1676, il reçut de nombreuses visites de Leibniz, qui niera plus tard l'avoirrencontré.

Malade, il mit de l'ordre dans ses manuscrits, en brûla peut-être.

Il mourut paisiblement et fut enterrédans la fosse commune.

Un don anonyme permit la publication intégrale (le ses manuscrits.

— Il professa un grandlibéralisme en politique et se montra rationaliste dans les questions religieuses.

Malgré un certain nombre d'ouvrages,on peut dire que Spinoza fut l'homme d'un seul livre : l'Ethique.

Le caractère géométrique de ce livre permet dedéfinir la pensée métaphysique de Spinoza à l'aide de ses propres définitions : « Par cause de soi, j entends ce dontl'essence enveloppe l'existence, autrement dit ce dont la nature ne peut être conçue qu'existante.

— Parsubstance, j'entends ce qui est eu soi et est conçu par soi, c'est-à-dire ce dont.

le concept n'a pas besoin duconcept d'une autre chose pour être formé.

— Par attribut, j'entends ce que l'entendement perçoit de la substancecomme constituant son essence.

— Par mode, j'entends les affections de la substance, autrement dit ce qui est enautre chose, par quoi il est aussi conçu.

— Par Dieu, j'entends un être absolument infini, c'est-à-dire une substanceconsistant en une infinité d'attributs, dont chacun exprime une essence éternelle et infinie.

— Est dite libre la chosequi existe d'après la seule nécessité de sa nature et est déterminée par soi seule à agir.

— Par éternité, j'entendsl'existence elle-même, en tant qu'elle est conçue comme suivant nécessairement de la seule définition d'une choseéternelle.

— D'une cause déterminée donnée, suit nécessairement un effet.

— Par corps, j'entends un mode qui. »

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