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Suffit-il d'être certain pour être dans le vrai

Publié le 21/03/2004

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■ Lorsque l'esprit se fixe dans un jugement, ou bien, tout en croyant que sa pensée est vraie, il conçoit qu'elle pourrait être fausse, il associe à son affirmation l'idée d'une erreur possible, et c'est [opinion ; ou bien il croit absolument à la vérité de ce qu'il pense, il exclut l'idée même de la possibilité d'une erreur, et c'est la certitude. «La certitude, explique Jules Lagneau, est l'état de l'esprit qui adhère fermement à ce qu'il juge être vrai.« (Célèbres leçons et fragments, 2e éd., 1964, p. 161).  ■ Mais dès que l'esprit est certain de quelque chose, il peut poser cette chose comme certaine : dire "je suis certain de" est posé comme synonyme de "il est certain que". La certitude est prise dans un sens objectif : le mot désigne ainsi, observe E. Boirac, «non plus un état de l'esprit, mais un caractère des choses ou des vérités ; en ce sens, certitude est synonyme d'évidence (en comprenant sous ce dernier mot l'évidence médiate, ou la preuve, aussi bien que l'évidence immédiate)«. L'évidence se donne en effet comme « le caractère (ou signe ou critérium) d'une vérité clairement et distinctement conçue qui s'impose à l'esprit« (J. Lagneau, ici.).  ■ Dans ces conditions, ce n'est pas la certitude qui se donne comme critère de vérité, mais l'évidence qu'elle enferme et sur laquelle elle se fonde. En d'autre termes, ce n'est pas parce que je suis certain que je suis dans le vrai, mais parce que le vrai m'apparaît avec évidence que je suis certain d'être dans le vrai. Reste à savoir si l'évidence qui anime la certitude est bien un critère de vérité.  

« III.

LA CERTITUDE LOGIQUE— Dans les disciplines formelles (sans contenu empirique), les conditions du raisonnement et de la vérité qui s'y rattache sont définies rigoureusement.— La vérité y dépend du respect:• d'un vocabulaire symbolique univoque (vide, sans référent intuitif);• des règles d'opération ou de combinaison des éléments de ce vocabulaire.— Dès lors, la certitude qui peut accompagner un raisonnement formel (un calcul) signifie le sentiment d'avoir obéi aux contraintes initiales du système, et garantit en conséquence la véritédes jugements ainsi élaborés.

Elle renvoie cette fois, non au monde extérieur, mais à la raison elle-même dans sa capacité à définir ses propres règles de fonctionnement, et rend compte del'existence d'une nécessité purement rationnelle. En fait, l'impression vécue de certitude n'est pas suffisante pour caractériser le jugement vrai.

Car on peut se croire dans le vrai et cependant se tromper.

Je veux éprouver unsentiment très fort et très sincère de certitude et pourtant être dans l'erreur.

C'est une grave objection à la théorie de l'évidence-vérité.Comment distinguer les fausses évidences et les vraies évidences, C'est ici qu'un critère serait nécessaire.

Descartes disait Leibniz , « a logé la vérité à l'hostellerie de l'évidence mais il a négligé de nous en donner l'adresse ».

Souvent les passions, les préjugés, les traditions fournissent des contrefaçons d'évidence.

Nous avons tendance à tenir pour claires & distinctes les opinions qui nous sont les plus familières, celles auxquelles nous sommes habitués.

Les idées claires trop claires sont souvent des « idées mortes ».

En revanche, les idées nouvelles, révolutionnaires, ont du mal à se faire accepter.

Au nom de l'évidence de la prétendue évidence, c'est-à-dire des traditions bien établies et des pensées coutumières, lespenseurs officiels, installés dans leur conformisme, ont toujours critiqué les grands créateurs d'idées neuves.

Aussi, pour Leibniz qui juge l'évidence intuitive toujours sujette à caution, le raisonnement en forme fournit l'instrument du vrai, car il dépasse le psychologique pour s'élever au logique, au nécessaire.

A l'immédiateté de l'intuition il oppose les étapes nécessaires de la démonstration, conçue comme chaîne où l'on substitue aux définis les définitions, et selonun ordre d'implication logique dont le syllogisme fournit un des modèles.

« Tous les hommes sont mortels.

Or, Socrate est un homme.

Donc Socrate est mortel. »S'il est évident que Socrate est un homme, cette évidence, pour être communiquée et fondée, requiert l'appel, non à une intuition, mais à la formalisation des relations d'implication logique entre des idées qui ne sauraient être considérées comme des absolus, mais comme les résultats de définitions ou de démonstration. Toutefois, et aussi loin que l'on pousse ce travail de réduction des éléments par application du principe d'identité, n'est-il pas inévitable de parvenir à un terme pour lequel on jugera quel'évidence intrinsèque du rapport ou du défini est, en fin de compte, et au moins pour nous, plus claire que la démonstration que l'on pourrait en tenter ? Et quel que soit par ailleurs le degréde formalisation des règles, ne faut-il pas toujours juger qu'elles sont correctement appliquées ? Ainsi force nous est de constater que le débat entre intuitionnisme et formalisme ne saurait se clore au bénéfice unique de l'un des deux termes, ce qui est probablement le signe qu'ilsconstituent non pas deux éléments strictement antithétiques, mais plutôt deux pôles irréductibles de la connaissance humaine.

Ce que Descartes affirme, contre les critiques du formalisme, « tout critérium qu'on voudra substituer à l'évidence ramènera à l'évidence » « L'appel aux idées n'est pas toujours sans danger, et beaucoup d'auteurs abusent du prestige de ce terme pour donner du poids à certaines de leurs imaginations ; car nous ne possédons pas l'idée d'une chose du fait que nous avons conscience d'y penser, comme je l'aimontré plus haut par l'exemple de la plus grande des vitesses.

Je vois aussi que de nos jours les hommes n'abusent pas moins de ceprincipe si souvent vanté : « tout ce que je conçois clairement et distinctement d'une chose est vrai et peut être affirmé de cette chose ».

Carsouvent les hommes, jugeant à la légère, trouvent clair et distinct ce qui est obscur et confus.

Cet axiome est donc inutile si l'on n'y ajoutepas les CRITERES du clair et du distinct [...] , et si la vérité des idées n'est pas préalablement établies.

D'ailleurs, les règles de la LOGIQUEVULGAIRE, desquelles se servent aussi les géomètres, constituent des critères nullement méprisables de la vérité des assertions, à savoir qu'ilne faut rien admettre o certain qui n'ait été prouvé par une expérience exacte ou une démonstration solide.

Or une démonstration est solidelorsqu'elle respecte la forme prescrite par la logique ; non cependant qu'il soit toujours besoin de syllogismes disposés selon l'ordre classique[...] mais il faut du moins que la conclusion soit obtenue en vertu de la forme.

D'une telle argumentation conçue en bonne et due forme, toutcalcul fait selon les règles fournit un bon exemple.

Ainsi, il ne faut omettre aucune prémisse nécessaire, et toutes les prémisses doivent oubien être démontrées préalablement, ou bien n'être admises que comme hypothèses, et dans ce cas la conclusion aussi n'estqu'hypothétique.

Ceux qui suivront ces règles avec soin se garderont facilement des idées trompeuses.

» Leibniz. L'évidence est un critère de vérité insuffisant, parce que subjectif.

Il repose sur une inspection de l'esprit (la conscience que nous avons de penser à quelque chose).

Il manque donc à la règle cartésienne des idées claires et distinctes un critère objectif, qui nous permette de savoir à quoi reconnaître le clair et le distinct, autrement que par l'attention quenous y portons. L'évidence peut être trompeuse.

Où trouver alors les critères objectifs du clair et du distinct, et donc de la certitude ? Dans les règles de la logique, c'est-à-dire dans le respect de la forme logique du raisonnement, dont la non-contradiction est la principe le plus universel.

Le syllogisme des Anciens en fournit l'exemple.

Les mathématiques aussi, maisLeibniz retient d'elles moins, comme Descartes , la clarté des intuitions que la rigueur du formalisme. Le calcul, manipulation réglée de signes, telle que la conclusion est nécessaire et immanquable, devient la règle suprême de la vérité : règle machinale, mais par conséquent plus sûre et plus objective que l'appel à l'évidence. On peut qualifier la conception cartésienne d'intuitionnisme et lui opposer le formalisme de Leibniz . L'académie des sciences se moque de Pasteur comme les vieux chimistes s'étaient moqués de Lavoisier .

Les vérités les plus fécondes, bien loin de s'imposer tout d'abord comme des évidences, sont proposées l'étonnement & le scandale.

Le sentiment d'évidence, de certitude est une donnée purement subjective, purement psychologique qui ne peut pas fournir unfondement objectif à la vérité. — Au sens strict, une telle certitude peut toujours être inquiétée par le risque d'avoir commis une erreur.

Il apparaît donc que la certitude ne garantit la vérité formelle qu'après que leraisonnement aura été soumis à vérification.CONCLUSIONLa notion de certitude est trop générale ou floue pour garantir dans tous les cas la présence de la vérité.

Lorsque la raison définit seule ses principes et ses contraintes, elle définit du mêmecoup les conditions d'une certitude rigoureuse, seule susceptible de signaler l'accès à la vérité.

Dès que l'univers subjectif ou, plus généralement, empirique, est pris en charge, la certitude nepermet aucunement à elle seule de décider de la vérité des énoncés.DOCUMENTLes apparences des sens ne nous promettent pas absolument la vérité des choses, non plus que les songes.

C'est nous qui nous trompons par l'usage que nous en faisons, c'est-à-dire par nosconsécutions.

(...) Une telle erreur est pardonnable, et quelquefois inévitable lorsqu'il faut agir promptement, et choisir le plus apparent; mais lorsque nous avons le loisir et le temps de nousrecueillir, nous faisons une faute, si nous prenons pour certain ce qui ne l'est pas.

Il est donc vrai que les apparences sont souvent contraires à la vérité; mais notre raisonnement ne l'estjamais, lorsqu'il est exact et conforme aux règles de l'art de raisonner.

Si par la raison on entendait en général la faculté de raisonner bien ou mal, j'avoue qu'elle nous pourrait tromper, etnous trompe en effet, et que les apparences de notre entendement sont souvent aussi trompeuses que celles des sens: mais il s'agit ici de l'enchaînement des vérités et des objections enbonne forme, et dans ce sens il est impossible que la raison nous trompe.

LEIBNIZ Lire le sujet La question peut sembler étrange dans la mesure où il est manifeste qu'il ne suffit pas que quelqu'un soit psychologiquement certain pour que ce dont il est certain soit vrai.

Il faut donc chercher s'il existe un type particulier de certitude qui pourrait se donner comme critère du vrai, et de rechercher si un tel critère est ou non valide.

)Introduction. »

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