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Suis-je un ou plusieurs?

Publié le 08/04/2005

Extrait du document

Ainsi « un enfant devient un homme, et il est tantôt gras, tantôt maigre, sans que change son identité » remarque Hume (Traité de la nature humaine, Livre I, partie IV, section VI). -          L'esprit en fait de même pour ce qui concerne le moi, et ne s'apercevant pas des changements, il croit qu'il y a constance et que le moi est stable. -          En vérité, l'esprit se modifie continuellement, et il y a autant d'individus qu'il y a d'instants. Nous avons le sentiment intime de notre identité, mais celui-ci n'est qu'une illusion. Dans les faits, nous n'avons d'unité que pour un instant, et celle-ci disparaît pour une autre identité à l'instant suivant. -          L'on pourrait donc affirmer alors qu'en dépit de la croyance cartésienne à l'âme, tout individu se modifie perpétuellement avec le temps, si bien qu'à l'échelle d'une vie, nous sommes tous « plusieurs ».   En moi s'opère une lutte de plusieurs instincts.   -          Ces considérations doivent elles-mêmes être renforcées par le fait que, loin d'être à chaque instant un tout homogène et cohérent, notre esprit est le résultat d'un conflit entre plusieurs désirs contradictoires. -          Ce que nous croyons percevoir de nous-mêmes n'est en effet jamais qu'un résultat, il n'est que le produit du corps, ou plus exactement, de l'inconscient. -          Notre conscience nous fait ainsi parvenir l'illusion que notre moi est un, mais notre conscience ne représente que la partie émergée de l'iceberg.

Analyse du sujet :

 

-          La question, prise littéralement, semble absurde : en effet, si je dis « je «, c’est que je parle de moi, or, je ne peux être à la fois moi et quelqu’un d’autre.

-          Toutefois, il faut accepter le jeu de l’intitulé et tâcher de prendre au sérieux la question : qu’est-ce que cela signifierait que de dire « je suis plusieurs « ?

-          Ce ne peut être, de toute évidence, que je sois à la fois « Jules «, « Marie « et « Médor «. Cela voudrait plutôt dire, par exemple, que j’ai plusieurs personnalités.

-          On a d’ailleurs tous déjà entendu dire que quelqu’un qu’il « n’est plus le même homme « lorsqu’il est mis dans certaines situations particulières.

-          Si « ce n’est plus le même homme «, ce n’est peut-être pas parce qu’il est devenu autre, mais parce qu’il a toujours eu une personnalité multiple, et que c’est un trait bien particulier de cette personnalité qui s’exprime alors.

-          On devrait alors considérer que « être plusieurs «, cela signifie qu’on est doué de diverses personnalités, et que celles-ci s’expriment tour à tour selon les circonstances.

-          Toutefois, une telle supposition pose problème, car si tel était le cas, qu’est-ce qui nous permettrait encore de croire que nous possédons un moi et une identité propre ?

-          Pour que tel soit le cas, ne faudrait-il pas que quelque chose subsiste en nous, qui permette que nous soyons toujours le même en dépit de nos changements ?

 

Problématisation :

Affirmer que « je suis un « semble bien légitime, et néanmoins fort problématique : car cela signifie-t-il que je suis toujours le même qu’il y a dix ans ? Par ailleurs, affirmer que « je suis plusieurs « c’est renier le sens même du terme « je « : car à quoi se réfère encore ce « je « s’il n’incarne plus une identité mais plutôt une pluralité d’individus ? Il faudrait ainsi trouver un élément auquel raccrocher ce « je «, un élément qui permette de considérer qu’en dépit de toutes ces velléités variées qui s’expriment en moi, il existe bien toujours un moi. Mais cela relance alors le problème : quel crédit accorder à un tel moi si l’expérience le contredit ?

« écrit le philosophe Hume ( Traité de la nature humaine , Livre I, partie IV, section VI). - L'âme unitaire dont Descartes fait l'hypothèse n'est dans les faits qu'une fiction.

L'esprit n'est en réalité rien de plus que le lieu où s'exprime une succession de perceptions diverses.

Essayer depenser une âme qui soit coupée de l'expérience personnelle revient à faire l'hypothèse d'une âmequi serait accessible sans que l'individu qui en est le dépositaire en ait quelques perceptions. - La croyance à l'âme relève en réalité de l'orgueil humain.

L'être humain dispose d'une passion immodérée pour lui-même qui le pousse à croire à l'existence de l'âme.

Il faut y voir l'excès de« l'intérêt que nous prenons à nous-mêmes » (Hume, Traité de la nature humaine , Livre I, partie IV, section VI) et par lequel nous désirons exister en dehors du temps et de l'espace, dans uneconstance et une unité qui nous confèreraient une sorte d'individualité exceptionnelle. - Si nous avons ainsi l'illusion que quelque chose subsiste en nous éternellement et quoi qu'il advienne c'est parce que notre esprit considère notre moi de la même manière qu'il considère lereste des choses. - En effet, notre esprit a tendance à nier les changements qui ne sont pas brutaux.

Lorsque quelque chose subit des modifications douces et graduelles, notre esprit croit que la choseconcernée ne change pas, alors qu'en réalité, elle n'est plus tout à fait la même.

Ainsi « un enfantdevient un homme, et il est tantôt gras, tantôt maigre, sans que change son identité » remarqueHume ( Traité de la nature humaine , Livre I, partie IV, section VI). - L'esprit en fait de même pour ce qui concerne le moi, et ne s'apercevant pas des changements, il croit qu'il y a constance et que le moi est stable. - En vérité, l'esprit se modifie continuellement, et il y a autant d'individus qu'il y a d'instants. Nous avons le sentiment intime de notre identité, mais celui-ci n'est qu'une illusion.

Dans les faits,nous n'avons d'unité que pour un instant, et celle-ci disparaît pour une autre identité à l'instantsuivant. - L'on pourrait donc affirmer alors qu'en dépit de la croyance cartésienne à l'âme, tout individu se modifie perpétuellement avec le temps, si bien qu'à l'échelle d'une vie, nous sommes tous« plusieurs ». En moi s'opère une lutte de plusieurs instincts. 3.

- Ces considérations doivent elles-mêmes être renforcées par le fait que, loin d'être à chaque instant un tout homogène et cohérent, notre esprit est le résultat d'un conflit entre plusieursdésirs contradictoires. - Ce que nous croyons percevoir de nous-mêmes n'est en effet jamais qu'un résultat, il n'est que le produit du corps, ou plus exactement, de l'inconscient. - Notre conscience nous fait ainsi parvenir l'illusion que notre moi est un, mais notre conscience ne représente que la partie émergée de l'iceberg.

Dans l'inconscient se joue une lutte, et nous neconnaissons en notre conscience que l'issue de cette lutte. - « Notre corps n'est en effet qu'une structure sociale composée de nombreuses âmes » écrit Nietzsche dans Par-delà bien et mal , §19.

Il s'agit pour Nietzsche d'un « conflit des instincts.

» Il existerait ainsi en nous une multitude d'instincts qui se combattent pour obtenir la souveraineté,et c'est seulement l'affect dominant qui trouvera droit de cité dans la conscience.

Mais la lutte estâpre, et il s'en faut généralement de peu pour que la victoire soit conférée à un autre. - Freud confirmera également en grande partie les intuitions nietzschéennes par la suite.

Sa théorie du psychisme se fonde en effet sur l'hypothèse selon laquelle il existerait au niveauinconscient un conflit des pulsions, et que de l'issue de ce conflit découlerait le comportement del'individu.

Ces pulsions consistant principalement en des désirs primaires qui peuvent êtrecontradictoires les uns les autres, mais qui subsistent tant qu'ils ne sont pas parvenus à leursbuts. - C'est pourquoi les pulsions qui ne peuvent s'exprimer directement auront tendance à ressortir tôt ou tard par le biais de l'acte manqué, du lapsus ou du symptôme névrotique. - De l'enseignement de Nietzsche et Freud, on peut tirer l'idée que l'être humain est l'espace de jeu de multiples pulsions, et que la victoire de l'une sur l'autre n'est jamais que temporaire, si bienque les « instincts » ou « pulsions » refoulées subsistent toujours.

De la sorte, nous sommestoujours plusieurs : ce que nous percevons de nous-mêmes et, en deçà, ce qui reste inconscientmais qui rejaillit par moments, ou encore ce qui nous pousse à agir sans que nous ne nous enrendions compte. - Par suite, on peut considérer que l'être humain est toujours multiple : d'abord dans le temps parce que, comme Hume nous l'a montré, nous sommes perpétuellement changeant, et ensuitedans sa structure même, car l'être humain dont nous croyons avoir conscience lorsque nousplongeons en nous-mêmes ne montre en vérité qu'une facette de lui-même.

Derrière ce masque dela conscience se cache un être aux multiples désirs dont les différents visages sont masqués. Conclusion :Nous avons d'abord montré avec Descartes pourquoi il était possible d'affirmer : « je suis un ».

Nous avons ensuitedémontré grâce à Hume en quoi ce sentiment d'unité n'était qu'une illusion, et nous avons affirmé que l'être humainchangeait avec le temps.

Enfin, nous nous sommes appuyés sur Nietzsche et Freud pour mettre en avant le fait quecette unité de la conscience n'était qu'un masque derrière lequel se jouait une lutte permanente de multiplesinstances contradictoires, et nous avons ainsi insisté encore sur le fait que tout être humain est avant tout. »

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