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Tous nos raisonnements sont-ils démonstratifs ?

Publié le 09/02/2004

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Quel lien peut-il  y avoir entre nos raisonnements et la démonstration ? Une démonstration, c’est le fait de montrer en expliquant, en disséquant le phénomène dans le but de faire comprendre quelque chose ou de convaincre quelqu'un. La démonstration semble donc mettre en lien deux personnes : celle qui explique le fonctionnement logique du phénomène et celle qui écoute et qui tente de comprendre ce même fonctionnement logique. Les termes : ‘Nos raisonnements’ dénotent une certaine individualité. Comment nos raisonnements personnels pourraient-ils être démonstratifs (échange) ? Et par ailleurs, est-ce que dans leur fonctionnement interne nos raisonnements procèdent par démonstration ? Est-ce que lors de nos réflexions nous disséquons toutes les étapes du processus afin de nous convaincre du bien fondé de ce raisonnement ? Une définition plus précise de la démonstration nous montre qu’elle est un mode de raisonnement qui consiste à faire suivre de prémisses admises ou déjà démontrées une conclusion nécessaire. Le point commun entre nos raisonnements et la démonstration serait donc la logique ? Bref, tous nos raisonnements sont-ils démonstratifs ?

« l'esprit ne pourrait jamais la concevoir distinctement.C'est donc peut-être un sujet digne d'éveiller la curiosité que de rechercher quelle est la nature de cetteévidence qui nous assure de la réalité d'une existence et d'un fait au-delà du témoignage actuel des sensou des rapports de notre mémoire.

[...]Tous les raisonnements sur les faits paraissent se fonder sur la relation de la cause à l'effet.

C'est aumoyen de cette seule relation que nous dépassons l'évidence de notre mémoire et de nos sens.Si donc nous désirons nous satisfaire au sujet de la nature de l'évidence qui nous donne la certitude desfaits, il faut que nous recherchions comment nous arrivons à la connaissance de la cause et de l'effet.J'oserai affirmer, comme une proposition générale qui n'admet pas d'exception, que la connaissance decette relation ne s'obtient, en aucun cas, par des raisonnements a priori ; mais qu'elle naît entièrement del'expérience quand nous trouvons que des objets particuliers sont en conjonction constante l'un avecl'autre." David Hume, Enquête sur l'entendement humain (1748), trad.

A.

Leroy, Aubier-Montaigne Ce que défend ce texte: Ce texte de Hume s'interroge sur la manière dont la science établit ce qu'elle appelle les lois de la nature.

Lorsqu'unchimiste nous dit que tel phénomène (par exemple l'ébullition de l'eau) est dû à telle cause (la chaleur), il établit unerelation de cause à effet qui s'exprime sous la forme d'une loi chimique simple : l'eau bout à cent degrés.

Commentpouvons-nous être sûrs, pourtant, qu'à chaque fois que nous porterons de l'eau à cent degrés elle se mettra àbouillir, et cela même en supposant l'avoir déjà vérifié un très grand nombre de fois?Pour rendre encore plus sensible l'importance de cette question, Hume choisit ici un exemple emprunté à laconnaissance commune, une évidence telle que celle qui consiste à dire : «le soleil se lèvera demain».

Cettebanalité que personne ne songerait à mettre en doute soulève pourtant les mêmes difficultés que les lois les plusabstraites de la science.

Comment la raison sait-elle que le soleil se lèvera demain? Comment peut-elle aujourd'huiprouver qu'il se lèvera bien demain?Ces questions sont légitimes car celui qui affirme que le soleil se lèvera demain n'a pas plus d'arguments pour leprouver que celui qui affirmerait le contraire.

Tous les deux en sont, au moment où ils parlent, au même point.

Leursdeux propositions sont compréhensibles et ne comportent pas de contradiction, c'est-à-dire ne comportent pas determes qui se contredisent entre eux.

Une phrase qui se contredit est une absurdité qu'on ne peut jamais concevoir.Or l'expression «le soleil ne se lèvera pas demain» se conçoit clairement car sa forme logique n'est pas incohérente :«Nous tenterions donc en vain d'en démontrer la fausseté.»Comment alors savons-nous que cette phrase est fausse, et que le soleil se lèvera bien demain? On ne peut secontenter ici de répondre : «parce qu'on le voit», étant donné qu'il s'agit d'un événement qui ne s'est pas encoreproduit et qui est donc «au-delà du témoignage actuel des sens».

Hume remarque alors que dans la science un seultype de connaissance dépasse précisément l'évidence de nos sens : c'est celle qui porte sur la relation de la causeà l'effet, et qui permet au chimiste d'établir ses lois.

La proposition «le soleil ne se lèvera pas demain» a donc lemême caractère que les lois de la science et ce sont bien elles qui sont visées par ce texte.Abandonnant cet exemple, Hume expose alors clairement la nature du problème en jeu: «il faut que nousrecherchions comment nous arrivons à la connaissance de la cause et de l'effet», c'est-à-dire comment nousétablissons cette liaison nécessaire qui transforme un phénomène en «cause» d'un autre phénomène qu'on appelle«effet».Pour Hume, la réponse tient en ces termes : la connaissance de cette relation naît de l'expérience uniquement etnon pas d'un raisonnement.

Or seuls les raisonnements peuvent nous livrer des résultats absolument nécessaires,comme en mathématiques, résultats qui n'ont pas besoin d'être confrontés à l'expérience et ne risquent pas de subirson démenti.

C'est pourquoi on doit dire que les raisonnements nous livrent des vérités a priori.

Si ce n'est pas leraisonnement qui établit la relation de la cause et de l'effet mais l'expérience sensible, qu'est-ce qui fonde alors lacertitude de l'invariabilité des lois physiques ?Pour Hume, cette certitude est en réalité fondée sur l'habitude.

Nous avons eu l'habitude d'observer un certainnombre de fois la conjonction de deux phénomènes quelconques et nous généralisons, sous l'effet de cettefréquence, cette conjonction que nous proclamons loi universelle et relation invariable de cause à effet. Ce à quoi s'oppose cet extrait: Cette conception très audacieuse cherche à démystifier les certitudes de la science dans ce qui constitue sonprincipe le plus essentiel : le principe de causalité.Celui-ci ne cacherait, en réalité, qu'une simple opinion, liée à l'habitude que nous avons de voir se produire laconjonction de deux phénomènes, sans que rien ne puisse garantir que cette conjonction se produira toujours.

C'estcontre ce texte et l'image qu'il donne de la science comme fragile édifice que Kant réagira dans sa philosophie.

Ilécrira que ce texte l'a fait sortir de son «sommeil dogmatique» et l'a poussé à chercher à «sauver la science» enmontrant que la nécessité des lois de la physique n'est pas réductible à une simple habitude.

Ce sera l'objectifpoursuivi par la Critique de la raison pure, texte dans lequel Kant tentera de poser le caractère universel etnécessaire des lois de la nature que la science nous décrit.

III. Le moindre mal.. »

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