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Article de presse: Accord sur Hébron entre Israël et l'OLP

Publié le 17/01/2022

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16 janvier 1997 - Ce fut long, mouvementé, parfois même extrêmement agité, et le gouvernement de Benyamin Nétanyahou n'en est finalement pas sorti indemne puisque Beni Begin, ministre des sciences, a annoncé sa démission à l'issue de la réunion. Mais après une douzaine d'heures d'un débat marathon plein d'acrimonie, de procès d'intention et d'accusations diverses, le gouvernement israélien, par onze voix contre sept, a officiellement approuvé, aux premières heures de jeudi 16 janvier, le compromis paraphé la nuit précédente sur le redéploiement militaire israélien à Hébron. Côté palestinien, le bureau politique de l'OLP, réuni sous la présidence de Yasser Arafat en présence des membres du gouvernement de l'Autonomie, a également approuvé l'accord sur Hébron. Pour être mis en oeuvre sur le terrain, le redéploiement militaire de Tsahal dans la ville dite " des Patriarches " devait ensuite être ratifié par la Knesset. Cette ratification paraissait d'autant plus aisée à obtenir que l'opposition travailliste avait annoncé son intention de voter avec la majorité. Entrecoupé de plusieurs interruptions liées notamment à la diffusion télévisée de fausses interprétations de la lettre d'accompagnement américaine, puis de rumeurs non confirmées sur l'existence prétendue de clauses secrètes que le premier ministre aurait cherché à dissimuler à ses ministres, le débat au sein du conseil des ministres a illustré le climat d'extrême méfiance qui règne désormais entre M. Nétanyahou et ses principaux ministres, en particulier les " faucons " du gouvernement. Assurances Pour être tout à fait certains de ne pas se retrouver dupés, autant que pour rassurer leur base politique, les ministres ont exigé et obtenu de leur chef un certain nombre d'assurances sur l'avenir. Ainsi le communiqué officiel publié à l'issue de ce conseil " extraordinaire " reprécise-t-il ce qui figure déjà aussi bien dans les accords d'Oslo que dans la lettre d'assurance américaine signée par Warren Christopher, le secrétaire d'Etat américain sortant, à savoir qu'Israël " fixera seul les détails des redéploiements " qui doivent avoir lieu en Cisjordanie occupée d'ici à la mi-1998. Pour plus de sûreté encore, le communiqué précise que " le gouvernement débattra du statut définitif [des territoires] avant le second " des trois redéploiements prévus. Enfin, le gouvernement annonce qu'il agira " pour maintenir de bonnes conditions de vie et assurer les besoins d'existence de la communauté juive d'Hébron ". Comme le soulignait avec gourmandise Yossi Beilin, candidat travailliste déclaré aux prochaines élections pour le poste de premier ministre, " si M. Nétanyahou entend réellement mener le processus de paix à son terme, il ne pourra pas le faire avec ce gouvernement ". Très proche de Shimon Pérès, à qui il doit sa carrière, M. Beilin, comme son mentor, ne serait pas opposé, sur le principe, à la formation d'un gouvernement d'union nationale avec M. Nétanyahou. Pour le reste, à l'instar des colons, des Palestiniens, de Léah Rabin, la veuve du premier ministre assassiné qui réclame maintenant de M. Nétanyahou des excuses posthumes pour son époux décédé, M. Beilin, souhaitant au premier ministre " la bienvenue au club d'Oslo ", se demande encore " pourquoi il nous a fallu attendre sept mois et payer, en tant que nation, un prix élevé pour voir signer, en fin de course, un accord similaire à ce que nous avions nous-même négocié ". Mis à part le délai d'un an obtenu par le premier ministre pour la mise en oeuvre des futurs redéploiements en Cisjordanie, et l'obtention de quelques patrouilles communes supplémentaires sur les hauteurs d'Hébron, une fois le redéploiement partiel effectué, la différence avec les accords précédents est, selon Ouri Savir, l'architecte du processus de paix, " égale à zéro ". En sept mois d'atermoiements, comme le faisait amèrement remarquer Shimon Pérès, des affrontements armés, principalement causés par le blocage des négociations par M. Nétanyahou, ont abouti, fin septembre, à la mort de seize soldats israéliens et soixante Palestiniens. Et l'Etat juif " a perdu une bonne part de la bonne volonté internationale et arabe qui prévalait précédemment ". Vigilance Pour l'OLP, même s'il est symboliquement important parce qu'il s'agit du premier accord avec un gouvernement Likoud, le nouveau compromis sur Hébron n'apporte, concrètement, rien de neuf. Sans aller jusqu'à reprendre les anathèmes de l'opposition islamiste qui évoque " une nouvelle capitulation ", certains notables de l'OLP ne cachent ainsi pas, dans la coulisse, leur déception. " Certains d'entre nous, confie un membre dirigeant du Fatah à Jérusalem-Est, se demandent encore ce que Abou Ammar (nom de guerre de Yasser Arafat) a obtenu en échange de son accord pour retarder d'un an les prochains redéploiements et, surtout, pour avoir admis le principe de remise en cause et de renégociation d'accords solennellement signés. " De fait, les Palestiniens n'obtiennent concrètement rien de plus qu'initialement prévu, c'est-à-dire, dans l'immédiat, ni plus ni moins qu'un demi pour cent de territoire supplémentaire en Cisjordanie. Tous les sujets ayant fait l'objet d'accords qui n'ont jamais été mis en oeuvre par Israël (la libération des prisonniers, la liberté de circulation garantie pour les Palestiniens entre les territoires sous statut différents, la mise en service de l'aéroport de Gaza...) restent " à négocier ". Ainsi, l'Autorité autonome souhaitait poster en permanence ne serait-ce qu'un homme à elle aux côtés des dizaines de soldats israéliens qui gardent, en un lieu qui fut sept siècles durant une mosquée, le tombeau présumé d'Abraham, ancêtre biblique commun des Juifs et des Arabes. Elle ne l'a pas obtenu. Yasser Arafat souhaitait surtout obtenir un engagement, à tout le moins une référence même indirecte, à l'obligation pour Israël de s'abstenir de bâtir de nouvelles colonies dans les territoires occupés avant que le sort définitif de ces territoires, la partie orientale de Jérusalem incluse, ne soit négocié comme prévu d'ici mai 1999. Le mot même de " colonie ", qui ne figure d'ailleurs dans aucun des accords signés jusqu'ici sauf pour mentionner la discussion sur leur sort final d'ici deux ans n'est mentionné nulle part. Ni dans le protocole sur Hébron ni dans les " minutes conjointement agréées ", soit les documents qui l'accompagnent. En somme, les " nouveaux " engagements d'Israël à l'endroit de l'Autorité palestinienne, non seulement ne garantissent pas la poursuite du processus de paix, la plupart des analystes politiques, israéliens comme palestiniens, estiment que M. Nétanyahou a fait preuve, sous la pression internationale, d'un pragmatisme bien compris et non pas amorcé un tournant idéologique, mais ils ne modifient en rien le caractère éminemment fragile de l'autonomie palestinienne. Comme l'admet en substance Bill Clinton, comme le conseille l'Europe et comme le réclament les Arabes, la vigilance demeure plus que jamais à l'ordre du jour dans les rapports israélo-palestiniens. PATRICE CLAUDE Le Monde du 17 janvier 1997

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