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En écoutant Malraux

Publié le 17/01/2022

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Mémoire 1964 - La foule, les officiels groupés autour du général de Gaulle ont oubliée le vent froid, le hideux cénotaphe, tandis que devant les postes de télévision les voix se sont tues, les repas arrêtés... Une voix hachée, incantatoire, faisait dans une forme admirable se lever une ombre entourée d'ombres, balayant les lendemains impurs pour évoquer, autour de Jean Moulin, la Résistance enfin dépouillée des oripeaux et des querelles de l'après-guerre. André Malraux, ministre d'Etat chargé des affaires culturelles, n'était plus le chantre officiel de la Ve République, il était le colonel Berger, des maquis de Corrèze, avec son béret noir sur des yeux cernés, sa canadienne froissée. Jean Moulin n'était plus ce préfet à képi brodé, mais " le chef d'un peuple de la nuit " la Résistance surgissait aux yeux des millions de Français qui l'avaient méconnue et de ceux, plus nombreux encore, qui ne l'avaient jamais connue. D'elle aussi on pouvait dire, comme Malraux du fondateur du CNR : " Sans cette cérémonie, combien d'enfants de France sauraient son nom ? " Les enfants de France et leurs aînés auront appris par ce discours sans haine ce que furent les étapes d'une bataille sans fanfares : ce " désordre de courage " du début, cette organisation lente des structures, puis, à partir de 1943, l'année terrible, le combat " en face de l'enfer " de la torture et de la déportation. Grâce à Malraux, Jean Moulin, mort dans le silence, a pu rendre un dernier service à une France pour laquelle il n'acceptait aucun compromis : lui rappeler, dans son demi-sommeil d'aujourd'hui, qu'elle sait être jeune, austère et dévorée d'héroïsme. JEAN PLANCHAIS Le Monde du 22 décembre 1964

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