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JEAN-JACQUES ROUSSEAU (1712-1778). Vie et oeuvre

Publié le 20/06/2011

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1. Vie. — Jean-Jacques Rousseau est né à Genève, le 28 juin 1712. Sa famille était d'origine française. Jean-Jacques, ayant perdu sa mère dès sa naissance, fut d'abord élevé par son père, qui lui faisait lire avec lui des romans d'aventures et les Vies de Plutarque. Puis il fut confié pendant deux ans à son oncle, M. Bernard, qui le mit en pension chez le pasteur Lambercier, à Bossey. L'enfant revint à Genève et fut placé comme apprenti chez un graveur. Mais un jour, pour ne pas s'exposer à un châtiment mérité, il se rendit chez le curé de Confignon, petit village à deux lieues de Genève, et lui déclara qu'il voulait se convertir au catholicisme. Le curé l'envoya à Annecy chez Mme de Warens, et celle-ci l'adressa à l'hospice des catéchumènes de Turin. Quand il quitte Turin, Jean-Jacques cherche à gagner sa vie; mais après plusieurs mésaventures, il retourne chez Mme de Warens, qui lui donne l'hospitalité à Chambéry, puis à sa maison de campagne des Charmettes. Là, il lit, il regarde la nature, il rêve. En 1740, — il avait vingt-huit ans, — il accepte une place de précepteur chez M. de Mably, à Lyon. Mais il ne réussit pas. Enfin, il arrive à Paris, avec quelques louis que lui a donnés Mme de Warens, et un nouveau système de notation musicale qu'il veut présenter à l'Académie des sciences. Il fait la connaissance de Diderot, puis de quelques financiers. On le fait entrer comme secrétaire chez M. de Montaigu, qui partait pour l'ambassade de Venise ; au bout d'un an, brouillé avec son chef, il est de retour à Paris. Le voilà qui accepte une autre place de secrétaire, chez Mme Dupin, femme d'un fermier général : c'est le moment mondain de son existence. Il compose de la musique ; il semble s'accommoder fort bien des moeurs et des vices de cette société qu'il flétrira bientôt. En 1750, il se révèle brusquement philosophe paradoxal et écrivain de génie, en publiant son Discours sur les sciences et les arts, sujet proposé par l'Académie de Dijon. Son succès est tel qu'il se sent forcé de mettre sa vie d'accord avec ses principes. Il rompt avec le monde, se loge dans une mansarde et gagne sa vie en copiant de la musique. Puis il se rend à Genève, où il est reçu comme un grand homme et admis à faire de nouveau profession de calvinisme. En 1755, Rousseau compose un second Discours, sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes, et ce Discours ne fait pas moins de bruit que le précédent. Il accepte alors de Mme d'Épinay un pavillon situé dans la forêt de Montmorency, l'Ermitage, non loin du château de la Chevrette. Là, au milieu de la nature, il commence trois grands ouvrages : l'Émile, le Contrat social et la Nouvelle Héloïse. Mais bientôt il se croit persécuté par Mine d'Épinay et par tous ceux qui sont reçus chez elle, et il quitte l'Ermitage en décembre 1757. Il s'installe à Montmorency, d'abord dans le village, puis dans le château du maréchal de Luxembourg. Il y achève la Nouvelle Héloïse et le Contrat social (1761); l'Émile, à son tour, va paraître, quand le Parlement fait saisir l'ouvrage et ordonne d'arrêter l'auteur. Rousseau quitte la France, et se réfugie en Suisse; on le voit successivement à Yverdun, à Motiers, où il s'habille en Arménien, dans l'île Saint-Pierre sur le lac de Bienne. Partout il se fait des ennemis. En 1766, il part pour l'Angleterre, où l'avait appelé le philosophe David Hume. Mais il ne tarde pas à se brouiller avec lui. Il revient en France, et après quelques étapes en Normandie, à Lyon, à Monquin (Dauphiné), il s'installe de nouveau à Paris : il habite alors la rue Plâtrière, qui porte aujourd'hui son nom, et il se remet à copier de la musique. Un de ses admirateurs, M. de Girardin, l'emmena le 20 mai I78 dans son château d'Ermenonville. C'est là que Jean-Jacques mourut, d'une attaque d'apoplexie, le 2 juillet 1778. On l'enterra, selon son voeu, dans l'île des Peupliers, au milieu du parc de ce château. En 1794, ses restes furent transportés au Panthéon.

2. Principaux ouvrages et philosophie de Rousseau. —J.-J. Rousseau soutient que l'homme est « bon, à l'état de nature «, mais qu'il est corrompu par la vie de société. A son époque, il y avait sans doute une part de vérité dans ce paradoxe; la vie mon-daine, à Paris et à la Cour, était frivole, luxueuse, et nuisait au développement normal de la vertu. Sachons donc distinguer ce qu'il y a de généreux et d'utile dans le Discours sur les sciences a les arts (1755), dans le Discours sur l'origine de l'inégalité (1755), dans la Lettre d d'Alembert sur les spectacles (1758), dans la Nouvelle Héloïse et le Contrai social (1761). Mais disons aussi que Rousseau manque à la fois d'expérience et de bon sens, qu'il exagère les maux et les vices de la société, et qu'il nous propose pour la guérir des remèdes chimériques et dangereux.

3. L'Émile (1762), et la pédagogie de Rousseau. —. Ce grand ouvrage est comme le point d'aboutissement des précédents. Rousseau avait en effet soutenu cette doctrine : a L'homme est bon par nature, la civilisation le corrompt. n Mais comment guérir de son mal une société si profondément atteinte? c'est à la base qu'il faut reprendre l'oeuvre, par l'éducation des enfants. L'Émile se compose de cinq livres : I. L'enfant vient de naître. A sa mère de le nourrir elle-même; elle doit lui laisser autant que possible le libre usage de ses membres, et ne pas l'emmailloter. Déjà le précepteur surveille les premières impressions de l'enfant, et veille à ce que la famille ou les serviteurs ne lui donnent pas de mauvaises habitudes. — II. Le précepteur s'est emparé d'Émile, âgé de cinq ans. Il l'emmène à la campagne, loin de la société, car son rôle sera surtout négatif, et consistera à laisser agir la nature (qui est bonne en soi) en préservant l'enfant de toute influence extérieure. Pas d'ordres, pas de punitions : seulement des leçons d'expérience. Point de lectures (surtout pas de fables de La Fontaine), mais des leçons de choses pour apprendre un peu de géographie, d'histoire, de géométrie. Ne pas négliger l'éducation des sens, celle de la vue, de l'ouïe; des exercices physiques, pour endurcir le corps. A douze ans, Émile est un « bel animal a. — III. Arrivons à l'éducation de l'intelligence. Émile sait lire, mais on ne lui permet que Robinson Crusoé et les Vies de Plutarque. On continue les leçons de choses, avec plus de développements; l'astronomie s'apprend par l'observation et par l'expérience. Mais il faut aussi qu'Émile soit en mesure de gagner lui-même sa vie, si la fortune venait à lui manquer : aussi apprend-il un métier, celui de menuisier. — IV. Émile a seize ans : c'est le tour de l'éducation morale. On ne lui a pas encore parlé de religion. Mais un jour, l'élève et le maître se rencontrent au sommet d'une montagne avec le vicaire savoyard, et celui-ci leur expose sa profession de foi : c'est une religion naturelle qui se rapproche beaucoup du christianisme. Ce morceau éloquent fait contraste avec le persiflage antireligieux de Voltaire et des philosophes; il eut une grande influence, avant Chateaubriand, sur les âmes éprises d'idéal. Émile peut désormais affronter la société; Rousseau trace à son intention un plan de vie pour un homme riche. — V. Émile se marie avec Sophie, jeune fille élevée elle aussi dans le système de Rousseau. Le précepteur reste dans la maison pour l'éducation des enfants qui naîtront de ce mariage. Cette rapide analyse suffit à, montrer le fort et le faible du système. Rousseau a raison de protester contre l'abus de la contrainte dans l'éducation morale, et de la mémoire livresque dans l'instruction. Il est d'accord avec Rabelais et avec Montaigne sur la nécessité de l'expérience, de la conversation, des leçons de choses, des exercices physiques, etc. Mais il a tort de croire que le précepteur sera ainsi maître absolu d'une jeune âme, et surtout d'affirmer que cette âme d'enfant ne peut avoir que de bons instincts qu'il suffit de préserver et d'amener à leur maturité naturelle. Là est l'utopie. La vertu s'apprend. C'est la faiblesse de l'homme de ne pas la suivre d'instinct ; c'est son honneur d'être propre à la goûter et de mettre sa grandeur à la pratiquer.

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