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Le franc abandonne définitivement la scène à l'euro

Publié le 17/01/2022

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17 février 2002 Dimanche 17 février, le franc devait s'effacer devant l'euro, la nouvelle monnaie commune à douze pays européens. plusieurs solutions restent néanmoins possibles pour échanger les francs contre des euros : d'ici au mois de juin dans les banques commerciales, puis jusqu'en 2005 pour les pièces, et enfin 2012 pour les billets dans les agences de la Banque de France. Selon les dernières statistiques, un tiers des billets en francs en circulation n'ont toujours pas été échangés, soit l'équivalent de 10,9 milliards d'euros. La monnaie qui ne sera pas restituée constitue une recette non négligeable pour les Etats de la zone euro (évaluée à 35 à 40 milliards d'euros). Pour les grandes entreprises, le passage à l'euro aurait coûté 7 milliards d'euros, sans compensation de la part de l'Etat. LE DIMANCHE 17 février restera gravé dans les mémoires. Le symbole monétaire national, le franc, devait disparaître à minuit et s'effacer définitivement devant l'euro, la nouvelle monnaie commune à douze pays européens. A partir de cette date, les pièces et billets en francs n'ont plus cours légal, et ne peuvent donc plus être utilisés pour des achats, après avoir été exclu le 1er janvier des paiements par chèque ou par Carte bleue. Pour les particuliers qui n'ont pas encore eu le temps de rapporter leurs derniers francs avant le 17 février, date jusqu'à laquelle les banques avaient l'obligation de les échanger gratuitement, plusieurs solutions restent possibles. Les banques commerciales acceptent encore de récupérer les vieux francs jusqu'au 30 juin. Mais difficile d'exiger en retour des espèces, elles feront quasiment toutes passer la somme à changer sur un compte bancaire et inciteront leurs clients à récupérer des euros par le biais d'un distributeur de billets ou d'un retrait au guichet. Pour ceux qui découvriront quelques francs glissés dans les poches de leur garde-robe d'été, une autre solution est possible, et pour plus longtemps. Les succursales de la Banque de France, de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM) et les agences du Trésor public échangent les billets en francs, qui avaient jusqu'ici cours légal, jusqu'au 17 janvier 2012, et reprennent, jusqu'au 17 février 2005, les pièces de monnaie qui circulaient avant l'introduction de l'euro. Les pièces en argent de 5, 10 et 50 francs ne sont pas échangeables, car elles ont été démonétisées et privées de leur cours légal en 1980 ; elles peuvent en revanche être revendues auprès des numismates professionnels pour la valeur de l'argent qu'elles contiennent. Les particuliers qui vivent dans un autre pays de la zone euro peuvent également se rendre dans une succursale de la banque centrale du pays. Celles-ci échangent gratuitement les billets en francs les plus récents jusqu'au 30 mars. Autre alternative, échanger ses derniers francs par correspondance. Cette opération est possible mais selon des conditions très strictes. Seuls les billets, pour un maximum de 5 000 euros, sont acceptés. moindre affluence Jusqu'à présent, les particuliers ont montré beaucoup d'empressement à se débarrasser de leurs francs, se précipitant dès les premiers jours de janvier dans les agences des banques, à la Banque de France ou chez les commerçants. Mais depuis un mois, cette affluence, due notamment à la courte période officielle de l'échange gratuit des francs contre des euros dans les banques commerciales, a eu tendance à se tarir. Selon les dernières statistiques de la Banque de France, le montant des billets en francs en circulation au 11 février 2002 représentait encore encore un tiers du total des billets, soit l'équivalent de 10,9 milliards d'euros. Tant les banques que leur tutelle, la Banque de France, déplorent ce retour plus lent que prévu de l'ancienne monnaie. Les premières évoquent des tensions de trésorerie, dues au fait que leurs comptes à la Banque de France ont déjà été débités, courant janvier, des montants correspondant à l'approvisionnement en euros, mais ne sont crédités qu'avec retard des francs sortant de la circulation. La Banque de France doit, elle, maintenir une logistique lourde, permettant le comptage et la vérification de l'authenticité des billets perforés par les banques ainsi que leur destruction. Ainsi, alors qu'en rythme de croisière, 700 millions de billets usés sont détruits chaque année par l'institut d'émission, plus du double (soit 2 000 tonnes) doit cette fois disparaître. Ces coupures seront soit broyées par des machines dans les succursales de la Banque de France, soit incinérées dans la papeterie de Vic-le-Comte, dans le Puy-de-Dôme. Quant aux pièces, propriété d'une direction du ministère des finances, les Monnaies et Médailles, leur sort reste incertain. Les huit milliards de pièces susceptibles d'être retournées, représentant quatre fois le poids de la tour Eiffel (37 000 tonnes), pourraient être trouées ou fondues. Quoi qu'il en soit, la fin du franc risque fort de se traduire par une modification des habitudes de paiement des consommateurs. Des sources internes à la Banque de France relèvent, en effet, que le passage à l'euro a entraîné une baisse sensible de la circulation fiduciaire, c'est-à-dire du nombre de billets en circulation, dans des proportions encore méconnues. La confiance en l'euro n'étant pas encore installée, les particuliers ont eu davantage recours au règlement par carte bancaire (+ 14,4 % en janvier) et par chèque (+ 4 %). L'attitude des banques a également joué, celles-ci ayant souvent contraint leurs clients à déposer sur leurs comptes courants les espèces en francs qu'ils étaient pourtant venus échanger contre des euros. « cagnotte » Pour autant, il restera toujours des pièces et des billets cachés, restés au fond des poches, conservés par des touristes étrangers, qui ne seront jamais réinjectés dans le circuit. Ces milliards qui ne seront pas restitués constituent une recette non négligeable pour les Etats de la zone euro. Cette manne inespérée devrait atteindre entre 35 et 40 milliards d'euros, soit l'équivalent de près de 10 % de la masse monétaire en circulation pour les douze pays de la zone euro, selon une étude du cabinet européen EuroZone Advisors ( Le Monde du 29 janvier), montants que les autorités de tutelle refusent de commenter. Pour la France, le montant de cette cagnotte atteindrait, selon certaines estimations, environ 1 milliard d'euros. En France, le projet de loi de finances pour 2002 ne prévoit un gain que de 240 millions d'euros pour les billets et de 533 millions d'euros pour les pièces, soit une « cagnotte » - terme réfuté par Bercy - de 773 millions d'euros. Dans le bilan des banques centrales, les billets et les pièces sont considérés comme une créance : si les particuliers ne la réclament pas, elle appartient à l'Etat. Ce montant inscrit dans les comptes pour 2002 ne correspond qu'à « des billets qui n'ont plus cours légal aujourd'hui », précise la Banque de France, comme les billets Pascal de 500 francs, retirés depuis 1997, les Montesquieu de 200 francs, hors du circuit depuis 1998, ou les Delacroix 1999 de 100 francs. En théorie, le calcul se fait dix ans après et l'Etat empoche un profit exceptionnel à ce moment. Mais Bercy ne manquera sans doute pas de demander une « avance » dès le 18 février. ANNE MICHEL, CECILE PRUDHOMME, PASCALE SANTI Le Monde du 18 février 2002

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