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Le reggae

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1 PRÉSENTATION reggae, genre musical jamaïcain apparu à la fin des années 1960, issu de la fusion des musiques des Caraïbes et du rhythm and blues américain, et imprégné par la pensée mystique du rastafarisme. 2 LES ORIGINES DU REGGAE 2.1 Le ska et le rock steady Les styles précurseurs du reggae, développés dès la fin des années 1950 en Jamaïque puis en Grande-Bretagne par les immigrants jamaïcains, sont le ska et le rock steady, encore relativement proches de leurs sources américaines. Au milieu des années 1950, alors que l’île de la Jamaïque vibre au rythme chaloupé de la calypso et du mento — forme dépouillée de la calypso —, les vagues du rhythm and blues, du rock and roll et du doo-wap se répandent grâce aux sound systems, sonos mobiles animées par les disc-jockeys (ou DJs) locaux. De cette rencontre de la musique noire américaine avec les musiques antillaises naît le ska, genre caractérisé par un tempo rapide et une utilisation systématique de la guitare rythmique en contretemps. Ses principaux représentants sont The Skatalites de Don Drummond, Blue Rivers and the Maroons, Desmond Dekkers, dont la chanson « Israelites » connaît un succès international, tout comme le tube de la chanteuse Millie, « My Boy Lollipop ». Le ska, symbole de l’indépendance jamaïcaine obtenue en 1962, donne naissance au rock steady, au tempo plus marqué, au rythme plus lent et où l’usage de la basse devient déterminant. À son apogée entre 1966 et 1968, le rock steady est illustré par les Wailers (au sein desquels officie Bob Marley), les Parangons, Alton Ellis et Ken Booth notamment. 2.2 La naissance du reggae Vers la fin des années 1960, le reggae trouve sa forme définitive, découlant en droite ligne du ska et du rock steady. Plus lent encore que ce dernier, mais gagnant en souplesse et en vigueur, le reggae adopte un rythme saccadé (grâce à une batterie syncopée), accorde une place de choix à la basse, joue avec les silences et met l’accent, via la cymbale, sur le quatrième temps de la mesure. Le tout définit une pulsion rythmique difficilement définissable, mais immédiatement reconnaissable. Le terme « reggae » est utilisé pour la première fois dans les chansons « Do the reggae », écrite en 1968 par Toots, leader du groupe The Maytals, et « Regay » de Tommy McCook. Selon Toots, le terme viendrait de l’anglais regular people (« gens du peuple ») ou de raggedy (« déguenillé »). Une autre étymologie fait dériver le mot de l’argot jamaïcain steggae (« femme facile »). 2.3 Un genre musical politique et mystique : l’impact du rastafarisme Expression de la population noire de la Jamaïque et notamment celle des ghettos, le reggae est, dès ses origines, porteur d’un message politique et religieux, le rastafarisme. Fondé par un Jamaïcain, Marcus Garvey, ce courant mystique connaît son véritable essor aux États-Unis ; prêchant le retour en Afrique de tous les descendants d'esclaves disséminés sur le continent américain, et situant la terre promise des Noirs africains en Éthiopie, le mouvement mêle pensée biblique et panafricanisme, et se donne comme messie l'empereur d'Éthiopie Hailé Sélassié Ier, d'où le terme de rastafarisme — ras tafari signifie « roi des rois » en amharique (langue officielle en Éthiopie). Surnommé Jah (pour Jehovah), le souverain est considéré comme le descendant direct de la lignée de Salomon et de la reine de Saba, et représente la branche noire des tribus d’Israël. L’oppression blanche est incarnée par Babylone la maléfique, et donne au reggae une dimension de rébellion qui entre en résonance avec les aspects subversifs inhérents au rock. Empreint de mysticisme, le reggae enflamme les bidonvilles de Trench Town et de Jones Town. Par la forme, il reprend souvent le dialogue entre le soliste et le chœur, en vigueur dans les sermons du rastafarisme. S’appuyant également sur l’ancienne tradition de plainte des esclaves, le reggae traduit le mécontentement populaire. 3 HISTOIRE DU REGGAE 3.1 Bob Marley, principal artisan de l’avènement du reggae (années 1970) Vers 1972-1973, après une nouvelle mutation, le reggae connaît une vague d’interprètes sans précédent : Peter Tosh (ex-Wailers, le groupe de Bob Marley), Bunny Wailer, Douglas Mack, The Ethiopians, Burning Spear, Black Uhuru, Israel Vibrations, The Gladiators, Gregory Isaacs ou encore Horace Andy. Fils d’un officier de l’armée anglaise stationné en Jamaïque et d’une chanteuse de gospel, Bob Marley demeure toutefois le principal artisan de la célébrité mondiale du reggae, mais aussi un symbole populaire de libération politique et culturelle à travers le monde. En 1972, il apporte son soutien au candidat socialiste et contribue, par cet engagement « officiel », à donner au reggae un droit de cité. Toutefois, son ascension rapide ne l’empêche pas de continuer à prôner la philosophie rasta, comme en témoigne l’album Catch A Fire (1973), évocation sans ambages de la misère et de la criminalité croissante. À propos de la musique, Bob Marley affirme : « La musique est la religion et la religion la musique. Le reggae est une communication, la communication la plus douce ». Natty Dread (1974) en constitue une fidèle et éclatante démonstration. En 1974, Eric Clapton atteint le sommet des hit-parades avec une reprise de Bob Marley, « I Shot the Sheriff ». Keith Richards, guitariste des Rolling Stones, revendique quant à lui ouvertement sa passion pour le reggae, tandis que les Clash, fers de lance de la scène punk londonienne, incorporent dans leur musique des éléments rythmiques dignes des formations reggae les plus traditionnelles. Le genre doit également beaucoup au succès du film culte The Harder They Come (Perry Henzel, 1975), dont la musique est composée par son acteur principal Jimmy Cliff. 3.2 Le reggae se décline en diverses ramifications (les années 1980) 3.2.1 Le dub et ses avatars Survenue en 1981, la mort de Bob Marley annonce la naissance d’un sous-genre du reggae, le dub, qui trouve ses origines dans des pratiques musicales typiques de la Jamaïque ; pays pauvre où l’achat et la distribution de disques sont difficiles, le système des sono mobiles qui diffusent les dernières chansons à la mode s’y est aisément développé. Les morceaux sont présentés par des DJs qui deviennent rapidement des toasters (ou « tchatcheurs », ancêtres des rappeurs) en improvisant des rimes parlées-chantées sur les instrumentaux des faces B des 45 tours. L’un des pionniers du genre est Lee Perry qui fait du dub — synthèse d’instrumentaux et d’improvisations vocales — une palette de techniques et d’expérimentations sonores : collage, reverb, scratch (hip-hop), accélération ou ralentissement du tempo, superposition de rythmes. Parmi les autres explorateurs du genre figurent U Roy, King Tubby et Mad Professor, qui a collaboré avec Massive Attack. L’influence des toasters et autres adeptes du dub devient prépondérante dans les années 1980, et le genre détrône le reggae « à l’ancienne » (root reggae), qui continue de payer son tribut aux idées de Marcus Garvey. Le dub donne naissance à plusieurs avatars : le « dutty dub » (de dirty, « sale » en anglais), qui cultive les allusions salaces et pornographiques et la pose machiste ; le « raggamuffin » (mot signifiant garnement), intégré au hip-hop aux États-Unis, trouve une idole en la personne de Shabba Ranks. Les rappeurs du ragga se contentent le plus souvent de débiter très vite une avalanche de paroles sur des rythmes reggae, désormais issus de la révolution numérique. Autre épigone du ragga, le genre « slackness » tourne essentiellement autour du sexe avec une nouvelle génération d’interprètes comme Cobra, Cutty Ranks ou Shaggy. 3.2.2 Le « revival ska » et autres interprétations personnelles du reggae Un revival (littéralement « renaissance ») ska important marque la fin des années 1970 en Angleterre, peu après l’explosion du mouvement punk. Les groupes les plus importants relevant de cette tendance sont The Specials, Madness, Selecter ou encore The English Beat. Plus directement influencés par le reggae « classique », des artistes et des groupes multiraciaux issus des ghettos jamaïcains anglais apparaissent sur la scène internationale : Steel Pulse et UB 40 — cette dernière formation ayant multiplié les succès tout au long des années 1980. Quant à Linton Kwesi Johnson, il est l’inventeur d’un genre de reggae à part, le dub poetry, rimé et soigneusement écrit (contrairement aux toasters). Ce sociologue jamaïcain émigré à Londres dans les années 1970 milite pour les droits de l’homme sur une musique à la basse très lourde, et à la voix grave monocorde. L’album Forces of Victory (1979) est un excellent exemple de son art du groove (ou « rythme ») si particulier. 3.3 Entre investigations musicales et héritage des pionniers (les années 1990) L’influence du reggae essaime à travers les différentes branches des musiques électroniques apparues dans les années 1980 et consacrées lors de la décennie suivante — house, techno, jungle ; tous ces genres s’enracinent en effet, peu ou prou, dans des trouvailles rythmiques et des effets sonores expérimentés par les DJs jamaïcains. Quant au rap, il est directement issu des spécificités de la scène reggae, à savoir l’usage des sound systems et le rôle déterminant des toasters pionniers comme U Roy et King Tubby. Ces derniers, grands expérimentateurs de sons, chantent et improvisent des rimes sur des instrumentaux de reggae lors des bals populaires qui ont lieu quotidiennement sur l’île. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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