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«Le Sud des Blancs : société, économie, idéologie»

Publié le 08/03/2014

Extrait du document

Présentation 

 

Le texte à analyser, «Le Sud des Blancs : société, économie, idéologie«, est un chapitre de l’étude écrite par Peter Kolchin et qui s’intitule Une institution très particulière : l’esclavage aux États-Unis, 1619-1877, aux pages 181 à 210. Cet ouvrage est la traduction française du livre original publié en 1993 sous le titre American Slavery, 1619-1877. Historien américain, l’auteur se spécialise entre autres en histoire des États-Unis au XIXè siècle, mais aussi en histoire du Sud américain, de l’esclavage et de l’émancipation. 

 

Objectif 

 

Dans ce chapitre, le projet de l’auteur consiste à nous exposer la spécificité du Sud américain au XIXème siècle, en prenant en considération que ce dernier est profondément différent du reste du pays par la nature esclavagiste de sa société. En effet, l’auteur entend nous démontrer que cette "institution particulière" a forgé le Sud sur le plan politique, social et économique, et ce, de façon plus accrue durant le demi-siècle qui précéda la guerre de Sécession. De plus, l’œuvre de l’historien s’inscrit dans ce renouveau historiographique qui place l’étude de l’esclavage et des Afro-Américains au premier plan. 

 

Moyens 

 

Les arguments sur lesquels s’appuie l’auteur relèvent de plusieurs domaines. En effet, comme l’intention de celui-ci est de présenter les multiples facettes de la société sudiste qui sont affectées par «l’institution particulière«, c’est-à-dire l’esclavage, pendant le demi-siècle qui précède la guerre de Sécession, l’auteur puise son argumentation dans les domaines économique, idéologique, politique et sociale. De plus, tout au long du texte, Kolchin se réfère à différents auteurs qui ont également écrit sur le sujet pour amener des points de comparaison ou pour appuyer ses idées. Également, il fait référence à des témoins, des acteurs qui ont participé de loin ou de proche aux différents évènements qui se sont déroulés durant la période concernée en introduisant des citations de ceux-ci pour valider son point de vue. 

 

Plan 

 

L’auteur dans l’introduction (paragraphes 1 à 10) pose le problème de la spécificité du Sud des États-Unis, en nous introduisant à la notion avec la démonstration de l’évolution du débat historiographique que sous-tend la question de l’identité sudiste. Le développement tant qu’à lui comprend quatre parties, divisé thématiquement de manière à mettre en lumière chaque aspect de la société qui est touché par l’esclavage. Donc en premier lieu (paragraphes 11 à 23), l’auteur s’attarde à illustrer la situation économique précaire du Sud. Deuxièmement (paragraphes 24 à 35), il illustre à quel point la question de l’esclavage pouvait réguler la vie politique et la vie en société. Ensuite (paragraphes 36 à 45), il dénote le conservatisme de plus en plus marqué des élites politiques sudistes qui empêche notamment l’émergence de mouvements réformateurs. Finalement (paragraphes 46 à 62), l’auteur s’intéresse davantage au conservatisme de façon à démontrer que le fondement des conservateurs était la défense de l’esclavage et nous illustre l’argumentaire des défenseurs de l’esclavage. Pour conclure (paragraphes 63 à 66) l’auteur insiste sur l’attachement particulier du Sud à son institution. En effet, nulle part ailleurs un pays avait été en guerre pour défendre ses intérêts. 

 

Synthèse 

Le système esclavagiste était très contradictoire, et de ces contradictions sont nés les différents courants historiographiques autour de la question de l’esclavage au sud des États-Unis. En effet, les historiens débattent depuis longtemps de l’identité propre du Sud. De marginal et secondaire dans les études historiques d’autrefois, la question de l’esclavage et plus largement des afro-américains, pris une place prépondérante dans la littérature avec l’émergence d’une nouvelle génération d’historiens. 

 

«La situation économique du Sud dans les décennies précédant la guerre de Sécession illustre la nature singulière de la société esclavagiste.«[1] En effet, malgré une forte croissance économique due à une augmentation de la production, celle-ci n’engendre pas de changements dans la structure même de l’économie et de la société, contrairement au Nord. De plus, le Sud était considéré par plusieurs comme étant relativement «en retard«. En effet, la situation économique du Sud à la veille de la guerre de Sécession était loin derrière celle du Nord et divers signes témoignent de ce recul. Notons principalement le nombre limité d’établissements industriels et la faible urbanisation de la région. Toutefois, l’urbanisation modeste du sud découle également du fait que l’esclavage et l’urbanisation s’accordent mal.[2] En effet, les maîtres voyaient les villes comme étant des lieux de corruption et de perversion. Ils s’assuraient ainsi qu’un nombre restreint de leurs esclaves y demeurent. Bref, les villes étaient marginales dans le Sud, elles l’étaient encore plus en ce qui concerne l’esclavage.[3] Cependant, il est important de rappeler que le retard économique du Sud n’est pas seulement attribuable à l’esclavage. En effet, «l’économie de l’esclavage était très dynamique, et ne montrait aucun signe d’essoufflement dans les années 1850.«[4] Par contre, elle n’était pas conciliable avec les transformations socio-économiques que connaissaient alors le pays et elle n’entraînait pas de changements dans la structure de l’économie, renforçant tout au plus l’ordre social existant. 

 

La deuxième partie de l’ouvrage révèle que l’institution est tolérée et même soutenue par une majorité de la population qui ne possédait pas d’esclaves. Cette affirmation suscite de nombreux débats et fait ressortir la nature de la société sudiste et de l’ordre esclavagiste. D’abord, les intérêts de la majorité des gens étaient indirectement liés à l’esclavage. En effet, posséder ou non un esclave était le moyen de gravir ou descendre les échelons de la société. Ensuite, il faut souligner qu’il y avait une proportion de la population qui était raciste et donc, préférait voir les Noirs en esclavage plutôt que libres dans le pays. À ces sentiments racistes se joint un durcissement du patriotisme sudiste. Effectivement, ceux qui défendaient l’esclavage se présentaient comme les défenseurs du Sud en général, et l’esclavage en est venu à se confondre avec la préservation de la «liberté« du Sud. Toutefois, de vives tensions régulaient la vie politique sudiste, opposant les élus des arrière-pays à ceux des régions de plantations, notamment à propos de l’esclavage et de la place de plus en plus proéminente que prenaient les planteurs sur la scène politique. Néanmoins, on préférait le consensus aux divergences d’opinion concernant l’esclavage croyant que «toute manifestation publique d’opposition ne fût interprétée comme une charge anti-sudiste, ce qui équivalait à un suicide politique«.[5] Ainsi, les arguments antiesclavagistes ne circulaient pas ouvertement. De plus, il y avait un renforcement de l’hégémonie des propriétaires d’esclaves sur la scène politique. «Les politiques du Sud étaient plus riches en moyenne que le reste de la population. Cela permit l’identification des intérêts du Sud avec veux des élites dirigeantes, c’est-à-dire avec les intérêts esclavagistes.«[6] 

 

La troisième partie traduit le conservatisme de plus en plus flagrant qui caractérise la société et la politique sudistes dans les années qui précédèrent la guerre de Sécession.[7] En effet, l’essor du conservatisme se faisait au détriment des sentiments antiesclavagistes qui, à partir des années 1790, connaissait un déclin graduel. En dépit de l’émergence à la grandeur du pays de plusieurs mouvements réformateurs pour améliorer l’organisation sociale et même le caractère humain, le Sud ne participa à toute cette effervescence, ou du moins tentait le plus possible d’opprimer ces élans progressistes. Prônant la défense de l’ordre esclavagiste, «l’expérimentation sociale était perçue comme une menace fondamentale à l’égard de leur monde.«[8] La pensée politique sudiste était donc marquée par de très profondes tendances anti-démocratiques[9], mais dont la diffusion était tout de même limitée afin de convertir à leur pensée les sudistes Blancs qui ne possédaient pas d’esclaves. «Mais la frontière était bien fine entre la suspicion à l’égard du réformisme et une franche hostilité au «trop-plein« de liberté.«[10] En effet, on s’inquiétait beaucoup des répercussions des réformes sur l’ordre social sudiste. «De plus, l’hostilité aux réformes était significative de la manière dont on croyait aux possibilités de l’homme en général.«[11] 

 

La quatrième partie s’engage à exposer que l’objectif essentiel des conservateurs était la défense de l’esclavage. «Dans les années 1850, la croisade esclavagiste en était venue à dominer entièrement la vie intellectuelle du Sud, ralliant à elle tous les Sudistes blancs.«[12] Dès lors, les porte-parole du Sud ont mis au point une série d’arguments esclavagistes. Toutefois, il n’y avait pas vraiment une pensée uniforme esclavagiste, les propagateurs amalgamaient une multitude de thèmes qui se contredisaient parfois. Les arguments étaient d’ordre pratique, religieux et raciste. D’ailleurs, les arguments racistes fonctionnaient mieux en combinaison avec les arguments exaltant les vertus de l’esclavage. En effet, l’élément principal de l’argumentaire était la supériorité du travail forcé sur le travail libre. C’est ainsi que les défenseurs de l’esclavage développèrent l’idée selon laquelle le sort des esclaves était meilleur que celui de biens des travailleurs libres du Nord et de la Grande-Bretagne et entreprirent de comparer systématiquement le travail forcé au travail libre, ce dernier «ne pouvant mener qu’à la lutte des classes, à l’anarchie, à l’extrémisme, à l’individualisme égoïste, et à des engouements dangereux pour des idées extravagantes.«[13] Cette idée était reprise par les socialistes, mais à un détail près, c’est-à-dire que les esclavagistes ne prônaient pas l’égalitarisme, bien au contraire : «Les Sudistes les plus francs affirmaient explicitement leur penchant pour l’ordre, la hiérarchie et l’inégalité comme socles fondateurs de toute vraie civilisation, et faisaient de l’esclavage le seul rempart authentique contre le socialisme.«[14] Les arguments esclavagistes sont apparus lorsqu’il parut opportun de défendre l’esclavage. En effet, ces derniers ont évolué et se sont raffinés au fil des circonstances. 

 

Le Sud américain menait une bataille qui était bien différente de toute celle qui avait été menée jusqu’à là. En effet, nulle autre région n’avait mené son pays à la guerre pour défendre l’attachement qu’elle ressentait envers cette institution. 

 

Bilan 

 

Avec ce texte, l’auteur a l’intention de démontrer que le Sud américain était bien différent du reste des États-Unis durant le demi-siècle précédant la guerre de Sécession. En effet, l’esclavage faisait en sorte que chaque aspect de la société était touché par cette institution et faisait du Sud une région bien distincte du reste du pays. Que se soit sur le plan économique, social, politique ou idéologique, l’esclavage n’a qu’accentué l’écart qui existait entre le Nord et le Sud et ce fossé était de plus en plus perceptible à la veille de la guerre de Sécession. 

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[1] KOLCHIN Peter. Une institution très particulière; l’esclavage aux États-Unis 1619-1877. Éditions Belin, Paris. 1993 (1998), p. 185 

 

[2] Ibid., p.189 

[3] Ibid., p.190 

[4] Ibid. 

[5] Ibid., p.196 

[6] Ibid. 

[7] Ibid. 

[8] Ibid., p.198 

[9] Ibid. 

[10] Ibid.,p.200 

[11] Ibid. 

[12] Ibid., p.201 

[13]Ibid., p.206 

[14] Ibid., p.207

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