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L'interrogatoire de Joseph Darnand

Publié le 17/01/2022

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Mémoire 1944 - Le président procède à l'interrogatoire de Joseph Darnand, Après avoir rappelé son très brillant passé militaire-celui de 1914-1918 et celui, de 1939-1940-, il indique qu'entre les deux guerres il a adhéré successivement à l'Action française, au PSF, au PPF, s'affirmant comme partisan d'un " chambardement ". Le président.- " Comment, après avoir de si belle façon lutté contre l'Allemagne au cours des deux guerres, avez-vous pu arriver à collaborer avec l'ennemi ? ". Joseph Darnand.- " A l'armistice, mon coeur de soldat aurait dû m'amener aux côtés des Français résistants. Mais en face de de Gaulle se dressait le maréchal-une grande figure pour un homme simple comme moi ". L'accusé indique que c'est pour obéir à Pétain qu'il prit la direction de la Légion française des combattants dans les Alpes-Maritimes, qu'appelé à Vichy il devint inspecteur général du SOL, créé par lui, la Légion étant " mal fichue ". C'est encore par obéissance qu'il " fit le pas " de la collaboration, où le maréchal avait dit qu'il s'engageait " dans l'honneur et la dignité ". C'est toujours par obéissance qu'il se rendit sur le front de l'Est pour saluer la LVF, devenue Légion tricolore. Dans tout cela, il n'y avait pas de double jeu. " Le double jeu, je n'y ai rien compris ". Lorsque, en 1944, Oberg, chef de la police allemande en France, lui proposa le poste de secrétaire général au maintien de l'ordre, il n'accepta que sur l'ordre de Laval, qui voyait ainsi le moyen d'éviter un gauleiter. Il fut obligé de se battre contre des Français : ce souvenir le " soulève d'émotion ". Mais croit-on que tous les actes de la Résistance aient été indispensables à la libération, l'assassinat de miliciens non armés, de familles entières, de vieillards ? (Murmures.) M. Germinal, juré.- " Pas d'histoires ! ". Joseph Darnand.- " C'est le conseil des ministres, auquel assistaient le maréchal et Laval, qui décida les opérations contre le maquis et qui créa les cours martiales. Tout le monde se défilait. J'ai accepté de désigner les membres de ces cours, qui n'ont pas condamné à mort d'autres résistants que ceux pris en flagrant délit d'assassinat. (Mouvements.) Je ne cherche pas à sauver ma vie, mais mon honneur de soldat ". " On me reproche d'avoir pris 300 millions à la Banque de France de Belfort avant de passer en Allemagne : il ne fallait pas que nous dépendions financièrement des Allemands. L'opération a été faite sur mon ordre, sans violences, par mon collaborateur Bout-de-l'An. Quand j'ai été pris en Italie, j'ai moi-même indiqué la cachette où se trouvaient les 200 millions que j'avais sauvegardés ". Le président.- " A la Banque de France de Guéret, la Milice avait déjà enlevé, les armes à la main, 10 millions ". Joseph Darnand.- " Je ne l'ai su que beaucoup plus tard. A la fin, lorsque je ne pouvais plus, en raison de la situation contrôler effectivement les miliciens, des excès graves ont été commis, que je n'ai appris que tardivement. Je les ai réprouvés avec violence. J'ai fait interner, poursuivre et condamner plusieurs chefs. L'un d'eux, un de mes amis, je l'ai fait fusiller dans le dos ". Le président.- " A propos des crimes de la Milice, le ministère public ne relève pas contre vous l'accusation d'assassinat, ni même de complicité d'assassinat. Vous n'en étiez pas moins le chef ". Joseph Darnand.- " En janvier 1944, surchargé d'occupation, je désignais, pour me remplacer au commandement de la Milice, un petit comité dirigé par Bout-de-l'An. Je ne veux pas l'accuser pour me disculper, mais il a été très faible ". " Lorsque le maréchal m'a écrit, le 6 août 1944, pour protester contre les agissements de la Milice, je lui ai répondu en substance : Pendant quatre ans, vous n'avez cessé de me féliciter. Maintenant que les américains approchent, on me dit que je serai une tache dans l'histoire de France. On aurait pu s'y prendre plus tôt ". Le président.- " L'ingratitude n'est pas que le fait des démocraties ". (Rires.) L'interrogatoire est terminé. Le Monde du 5 octobre 1945

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