« Le roi se mêle depuis peu de faire des vers. MM. de Saint-Agnan et Dangeau lui apprennent comment il faut s'y prendre. Il fit l'autre jour un petit madrigal que lui-même ne trouva pas trop joli. Un matin, il dit au maréchal de Gramont : “ Monsieur le maréchal, lisez, je vous prie, ce petit madrigal et voyez si vous en avez jamais vu un si impertinent ; parce qu'on sait que depuis peu j'aime les vers, on m'en apporte de toutes les façons. ” Le maréchal, après l'avoir lu, dit au roi : “ Sire, Votre Majesté juge divinement bien de toutes choses ; il est vrai que voilà le plus sot et le plus ridicule madrigal que j'aie jamais lu. ” Le roi se mit à rire et lui dit : “ N'est-il pas vrai que celui qui l'a fait est bien fat ?
- Sire, il n'y a pas moyen de lui donner un autre nom.
- Ah ! bien ! dit le roi, je suis ravi que vous m'ayez parlé si bonnement : c'est moi qui l'ai fait. - Ah ! Sire, quelle trahison ! que Votre Majesté me le rende ; je l'ai lu brusquement. - Non, Monsieur le maréchal, les premiers sentiments sont toujours les plus naturels. ” Le roi a fort ri de cette folie, et tout le monde trouve que voilà la plus cruelle petite chose que l'on puisse faire à un vieux courtisan. Pour moi, qui aime toujours à faire des réflexions, je voudrais que le roi en fît là-dessus et qu'il jugeât par là combien il est loin de jamais connaître la vérité. «
(Mme de Sévigné.)
Le respect dû au roi.
« Il survint entre le Roi et Monsieur son frère un petit démêlé d'enfans qui se disputent quelque chose. Le roi voulut prendre un poêlon de bouillie. Monsieur en tenoit le manche et avant que les gouverneurs eussent fait finir ce tiraillement, Monsieur fit mine d'en frapper le Roi. La reine avertie vint faire fouetter Monsieur. «
(Histoire de Daniel de Cosnac.)