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Maison Blanche, Congrès et Cour suprême sont dans le camp républicain

Publié le 17/01/2022

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12 décembre 2000 Image symbolique s'il en est, le président élu républicain George W. Bush a choisi de prononcer son discours victorieux, mercredi 13 décembre, depuis la Chambre des représentants du Texas, ou démocrates et républicains l'ont applaudi du même élan. Le message est clair : après cinq semaines d'un combat féroce, il sera l'homme du rassemblement, comme il a su l'être comme gouverneur du Texas. Aussi paradoxal que cela puisse paraître pour un parti qui contrôlera, en janvier prochain, tous les leviers du pouvoir fédéral ­ la Maison Blanche, le Congrès, la Cour suprême ­ pour la première fois depuis la présidence Eisenhower (1956-1960), M. Bush n'a en réalité pas d'autre choix, tant cette victoire républicaine de l'an 2000 est limitée par les résultats du vote populaire et ternie par l'issue ambiguë de la bataille électorale. M. Bush est d'abord le premier président américain, depuis cent-vingt-quatre ans, à accéder à la Maison Blanche sans avoir obtenu la majorité du vote populaire ; c'est son adversaire Al Gore qui a remporté cette majorité, avec un peu plus de 330 000 voix d'avance au niveau national. Il est aussi le premier à y être installé par la Cour suprême avec une voix de majorité. La légitimité de son élection n'est pas remise en cause pour autant ; il est d'ailleurs intéressant de constater que les appels à l'abandon du collège électoral comme système de désignation du président qui s'étaient élevés tout de suite après le scrutin du 7 novembre se sont tus depuis. Mais les historiens ne manquent pas de souligner qu'aucun des prédécesseurs de M. Bush qui ont souffert de la même mésaventure n'est parvenu à se faire réélire au bout de quatre ans : on peut rêver de fondations plus solides pour entamer une présidence. Le futur président Bush va d'autre part gouverner avec une majorité républicaine dans les deux chambres du Congrès, un luxe que n'avait pas, par exemple, l'un de ses illustres prédécesseurs républicains, Ronald Reagan, flanqué d'une majorité démocrate. Mais cette majorité est si étroite et le Congrès si divisé que M. Bush ne disposera en réalité que d'une faible marge de manoeuvre. A la Chambre des représentants, les républicains ont 221 sièges contre 211 aux démocrates. Au Sénat, la situation est bien plus précaire : cinquante républicains contre cinquante démocrates, le futur vice-président, Dick Cheney, apportant la voix qui les départagera. Déjà, les démocrates ont commencé à réclamer une répartition équitable des puissantes commissions du Sénat, de leur budget, du personnel qui leur est alloué ; certains républicains modérés, comme le sénateur John McCain, y sont favorables. PERSONNALITÉS DE POIDS « Nous serons la conscience de la nation », a promis mercredi le sénateur démocrate du Vermont Patrick Leahy, au lendemain de la décision de la Cour suprême qui a donné la présidence à M. Bush. Le Sénat a d'autant plus de chances d'être, sous la présidence Bush, un centre de pouvoir important que ses règles de fonctionnement favorisent le consensus : il faut une majorité de 60 voix pour soumettre au vote la plupart des textes, et le chef de la majorité républicaine ne pourra donc rien faire s'il ne s'assure pas la coopération des démocrates. Ceux-ci comptent en outre quelques personnalités de poids au Sénat qui se feront fort de ne pas laisser la bride sur le cou aux républicains : Hillary Clinton, Joe Lieberman (qui retrouve son siège après avoir perdu la course à la Maison Blanche aux côtés d'Al Gore) en sont quelques-uns. SPHÈRES D'INFLUENCE De nouvelles sphères d'influence se dessinent au sein du futur Sénat, susceptibles de pousser des dossiers spécifiques, indépendamment de la Maison Blanche et de la direction du Parti républicain : le groupes des femmes, désormais porté à treize (dix démocrates, trois républicaines, qui ont prévu de se réunir une fois par mois), les indépendants, comme John McCain ou Robert Torricelli qui, bien qu'affiliés à un parti, ont leurs propres intérêts - la réforme du financement des partis, par exemple ; l'hebdomadaire Business Week identifie aussi le groupe des ex-gouverneurs, celui des centristes, et celui des défenseurs de l'industrie high tech, menés par la nouvelle sénateur de l'Etat de Washington, la démocrate Maria Cantwell, ex-PDG de RealNetworks. La Chambre des représentants risque de rentrer très vite en campagne électorale, ce qui ne favorise généralement pas la coopération inter-partis. Les midterm elections, en 2002, vont revêtir une importance particulière car les démocrates pensent avoir de bonnes chances de les remporter en capitalisant sur la frustration qu'aura engendrée la défaite d'Al Gore à la base ; « Nos militants considèrent qu'ils se sont fait voler la présidentielle, affirme Albert Wynn, représentant démocrate du Maryland. Je pense qu'ils seront très, très motivés. » Au Sénat, 33 sièges seront à renouveler, dont 20 républicains : là aussi, les démocrates espèrent en grignoter suffisamment pour faire basculer la majorité. Pour l'ancien membre du Congrès démocrate Lee Hamilton, s'il veut prouver sa volonté de dépasser les clivages politiques, George W. Bush devrait commencer par promouvoir une réforme du système électoral. Son autre priorité, vraisemblablement, sera l'éducation, puis la réforme des régimes de retraite, puis des réductions d'impôts moins ambitieuses que promis. Ceux qui connaissent bien le gouverneur du Texas et savent que son point fort est de faire travailler les gens ensemble prévoient qu'il concentrera ses efforts sur l'harmonie nationale, déléguant à d'autres le programme législatif. S'il choisit, comme il l'a promis, la voie de la coopération, en intégrant des démocrates dans son administration et en tendant la main à l'opposition au Congrès, le futur président Bush a des chances d'échapper à la paralysie. Mais beaucoup d'experts prévoient alors qu'il se trouvera en porte-à-faux avec la droite de son parti, qui n'est pas d'humeur conciliante. « Nous avons la Chambre, nous avons le Sénat et nous avons la Maison Blanche, a claironné la semaine dernière Tom DeLay, l'un des responsables de la majorité républicaine au Congrès et star de la droite. Ce qui veut dire que nous contrôlons l'ordre du jour. » M. DeLay a beau être texan comme le président élu, il ne tient pas tout à fait le même langage. L'avenir dira lequel parlera le plus fort.

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