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Merry ouvrit de grands yeux sur le défilé des pierres

Publié le 29/03/2014

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Merry ouvrit de grands yeux sur le défilé des pierres : elles étaient noires et usées, les unes étaient inclinées, d’autres étaient tombées, d’autres encore fissurées ou brisées, on aurait dit des rangées de vieilles dents avides. Il se demandait ce qu’elles pouvaient être, et il espéra que le roi n’allait pas continuer de les suivre jusque dans l’obscurité d’au-delà. Puis il vit qu’il y avait des groupes de tentes et des baraques de part et d’autre de la route des pierres, mais ils n’étaient pas établis près des arbres, et ils semblaient plutôt pelotonnés hors de leur atteinte vers le bord de l’escarpement. Le plus grand nombre se trouvaient à droite, où le Firienfeld était plus large, et sur la gauche, il y avait un camp plus petit, au centre duquel s’élevait un haut pavillon. Un cavalier vint à ce moment de ce côté à leur rencontre, et ils se détournèrent de la route.

En approchant, Merry vit que le cavalier était une femme, dont les longs cheveux nattés luisaient dans le crépuscule, elle portait cependant un casque, elle était vêtue jusqu’à la taille comme une guerrière et ceinte d’une épée.

« Salut, Seigneur de la Marche ! cria-t-elle. Mon coeur se réjouit de votre retour. «

« Et toi, Eowyn, dit Théoden, tout va-t-il bien pour toi ? «

« Tout va bien ! « répondit-elle. Mais Merry eut l’impression que sa voix démentait sa parole, et il aurait cru qu’elle avait pleuré, si la chose était imaginable pour un visage aussi dur. « Tout va bien. La route était pénible pour des gens arrachés soudain à leur foyer. Il y a eu des mots rudes, car cela fait longtemps que la guerre nous a chassé des champs verts, mais il n’y a eu aucun acte mauvais. Tout est maintenant ordonné, comme vous le voyez. Et votre logement est préparé, car j’ai eu pleine information à votre sujet et je connaissais l’heure de votre arrivée. «

« Aragorn est donc venu, dit Eomer. Est-il encore ici ? «

« Non, il est parti «, dit Eowyn, se détournant et regardant les montagnes qui se détachaient, sombres, à l’Est et au Sud.

« Où est-il allé ? « demanda Eomer.

« Je n’en sais rien, répondit-elle. Il est venu le soir et il est reparti hier matin, avant que le soleil ne soit monté au-dessus des montagnes. Il est parti. «

« Tu es affligée, ma fille, dit Théoden. Que s’est-il passé ? Dis-moi, a-t-il parlé de cette route ? « Il désigna les rangées assombries de pierres en direction du Dwimorberg. « Des Chemins des Morts ? «

« Oui, Seigneur, dit Eowyn. Et il a disparu dans les ombres d’où nul n’est jamais revenu. Je n’ai pu l’en dissuader. Il est parti. «

« Dans ce cas, nos chemins sont séparés, dit Eomer. Il est perdu. Nous devons chevaucher sans fui, et notre espoir s’amenuise. «

Ils traversèrent lentement la courte lande et l’herbe du plateau, sans plus parler jusqu’à leur arrivée au pavillon du roi. Merry vit que tout avait été préparé et que lui-même n’avait pas été oublié. Une petite tente avait été dressée à son intention à côté du logement du roi ; il s’assit là, tout seul, tandis que des hommes allaient et venaient devant lui pour entrer se concerter avec le roi. La nuit tomba, et les cimes à demi visibles des montagnes à l’ouest furent couronnées d’étoiles, et l’est était noir et vide. Les files de pierres disparurent lentement de la vue ; mais au-delà, plus noire que l’obscurité, s’étalait encore la vaste ombre accroupie du Dwimorberg.

« Les Chemins des Morts, se murmura-t-il à lui-même. Les chemins des Morts ? Que signifie tout cela ? Ils m’ont tous abandonné, à présent. Ils sont tous partis vers quelque destin : Gandalf et Pippin pour la guerre de l’Est, Sam et Frodon pour le Mordor, et Grands-Pas, avec Legolas et Gimli, pour les Chemins des Morts. Mais mon tour viendra assez vite, je suppose. Je me demande de quoi ils parlent tous et ce que le roi entend faire. Car je dois aller où il ira, maintenant. «

Au milieu de ces sombres pensées, il se rappela soudain qu’il avait grand-faim, et il se leva pour aller voir si quelqu’un d’autre dans cet étrange camp ressentait la même chose. Mais à ce moment même, il y eut une sonnerie de trompette, et un homme vint l’inviter, lui, écuyers du roi, à prendre son service à la table du souverain.

Dans le fond du pavillon, il y avait un petit espace, isolé par des tentures brodées et jonché de fourrures, et là étaient assis à une petite table Théoden avec Eomer et Eowyn, et Dunhere, seigneur de Harrowdale. Merry se tint auprès du tabouret du roi, et le servit, jusqu’au moment où le vieillard, sortant d’une profonde réflexion, se tourna vers lui et sourit.

« Allons, maître Meriadoc ! dit-il. Vous ne resterez pas debout. Vous allez vous asseoir à côté de moi tant que je resterai sur mes propres terres, et vous m’allégerez le coeur en me contant des histoires. «

Une place fut ménagée pour le hobbit à la gauche du roi, mais personne ne demanda d’histoire. Il y eut, en fait, peu d’échanges de paroles, et ils mangèrent et burent la plupart du temps en silence, mais enfin Merry, rassemblant son courage, posa la question qui le tourmentait.

« Par deux fois maintenant, Seigneur, j’ai entendu parler des Chemins des Morts, dit-il. Que sont-ils ? Et où Grands-Pas, je veux dire le seigneur Aragorn, où est-il allé ? «

Le roi soupira, mais personne ne répondit jusqu’à ce qu’enfin Eomer parlât. « Nous n’en savons rien, et

nous avons le coeur lourd, dit-il. Mais pour ce qui est des Chemins des Morts, vous en avez vous-même passé les

premières marches. Non, je ne prononce aucune parole de mauvais augure ! La route que nous avons gravie est

l’approche de la Porte, là-bas dans le Dimholt. Mais aucun homme ne sait ce qui s’étend au-delà. «

« Aucun homme ne le sait, dit Théoden, pourtant l’ancienne légende, rarement rappelée de nos jours, en dit

quelque chose. S’il faut en croire ces vieux contes transmis de père en fils dans la Maison d’Eorl, la Porte sous le

Dwimorberg mène à un chemin secret qui va sous la montagne vers une fin oubliée. Mais personne ne s’y est

jamais aventuré pour déchiffrer le secret, depuis que Baldor, fils de Bregon, passa la Porte et ne fut jamais revu

parmi les hommes. Il avait prononcé un voeu inconsidéré, alors qu’il vidait la corne au festin que Bregon avait

donné pour consacrer la ville de Meduseld nouvellement construite, et il ne monta jamais sur le haut siège dont

il était l’héritier.

« On dit que les Morts des Années Sombres gardent la route et ne permettent à aucun vivant d’accéder à

leurs salles cachées, mais on peut les voir parfois eux-mêmes franchir la Porte comme des ombres et descendre

la route des pierres. Les habitants de Harrowdale assujettissent alors leurs portes et voilent leurs fenêtres, et ils

tremblent de peur. Mais les Morts sortent rarement et seulement en des temps de grande inquiétude et de mort

prochaine. «

« On dit pourtant à Harrowdale, intervint Eowyn d’une voix basse, qu’il y a peu a passé par les nuits sans

lune une grande armée en étrange arroi. Nul ne savait d’où elle venait, mais elle gravit la route des pierres et

disparut dans la montagne, comme pour répondre à un rendez-vous. «

« Pourquoi alors Aragorn est-il allé par-là ? demanda Merry. N’avez-vous aucune explication ? «

« À moins qu’il ne vous ait dit en tant qu’ami des choses que nous n’avons pas entendues, répondit Eomer,

personne actuellement sur la terre des vivants ne peut dire quel est son but. «

« Il m’a paru grandement changé depuis la première fois que je l’ai vu dans la maison du roi, dit Eowyn : il

était plus sévère, plus vieux. Sur le point de mourir, m’a-t-il paru, comme un de ceux que les Morts appellent. «

« Peut-être a-t-il été appelé, dit Théoden, et mon coeur me dit que je ne le reverrai pas. C’est pourtant un

homme royal de haute destinée. Et trouve un réconfort en ceci, ma fille, puisque tu parais avoir besoin de

réconfort dans ton affliction pour cet hôte : Il est dit que lorsque les Eorlingas descendirent du Nord et finirent

par franchir le Snowbourn à la recherche de places fortes de refuge en temps de nécessité, Bregon et son fils

Baldor gravirent l’escalier du refuge et arrivèrent ainsi à la Porte. Sur le seuil était assis un vieillard, d’un âge

indéterminable, il avait été grand et majestueux, mais il était alors desséché comme une vieille pierre. En fait, ils

le prirent pour une pierre, car il ne bougeait pas et ne dit mot jusqu’au moment où ils voulurent le dépasser et

entrer. Alors une voix sortit de lui, que l’on eût dit venue de la terre, et, à leur stupéfaction, elle parlait dans la

langue de l’ouest : La voie est fermée.

« Ils s’arrêtèrent alors et, l’examinant, ils virent qu’il était toujours vivant, mais il ne les regardait pas. La

voie est fermée, reprit la voix. Elle fut faite par ceux qui sont morts, et les Morts la gardent jusqu’au moment

venu. La voie est fermée.

«Et quand sera ce moment? demanda Baldor. Mais il ne reçut jamais de réponse. Car le vieillard mourut

dans l’heure et tomba face contre terre, et les autres n’eurent jamais plus aucune nouvelle des anciens habitants

des montagnes. Peut-être, cependant, le temps annoncé est-il venu et Aragorn peut-il passer. «

« Mais comment un homme saurait-il si le temps est venu ou non, sans oser affronter la Porte ? demanda

Eomer. Et je n’irais pas par-là, toutes les armées de Mordor seraient-elles après moi et serais-je seul, sans aucun

autre refuge. Quelle pitié qu’une humeur de mort soit tombée sur un si grand coeur en cette heure critique ! N’y

a-t-il donc pas assez de choses mauvaises dans le monde sans aller les chercher sous la terre ? La guerre est là. «

Il se tut, car il y eut à ce moment un bruit au-dehors : la voix d’un homme qui criait le nom de Théoden, et le

qui-vive de la garde.

Le Capitaine de la Garde tira bientôt le rideau. « Il y a là un homme, Seigneur, dit-il, un messager de

Gondor. Il désire paraître immédiatement devant vous. «

« Qu’il vienne ! « dit Théoden.

Un homme de haute taille parut, et Merry retint un cri, car il lui sembla un instant que Boromir, ressuscité,

était revenu. Puis il vit qu’il n’en était rien, l’homme était un étranger, bien qu’il ressemblât à Boromir comme

un frère, grand, fier, avec des yeux gris. Il était vêtu en cavalier avec un manteau vert foncé par-dessus une cotte

de fines mailles, sur le devant de son casque était sertie une petite étoile d’argent. Il tenait à la main une seule

flèche, empennée de noir et barbelée d’acier, mais la pointe en était peinte de rouge.

Il mit un genou en terre et présenta la flèche à Théoden. « Salut, Seigneur des Rohirrim, ami du Gondor !

dit-il. Je suis Hirgon, messager de Denethor, qui vous apporte ce signe de guerre. Le Gondor est dans un grand

besoin. Les Rohirrim nous ont souvent aidés, mais à présent le seigneur Denethor demande toute votre force et

toute votre célérité, de crainte que le Gondor ne tombe enfin. «

« La Flèche Rouge ! « dit Théoden, la tenant de l’air de quelqu’un qui reçoit un appel depuis longtemps

attendu et pourtant redoutable quand il vient. Sa main tremblait. « La Flèche Rouge n’a plus été vue dans la

Marche de toutes mes années ! Les choses en sont-elles donc arrivées là ? Et qu’est-ce que le seigneur Denethor

estime que doive être toute ma force et toute ma célérité ? «

« Vous le savez mieux que personne, Seigneur, dit Hirgon. Mais il se pourrait bien qu’avant peu Minas Tirith soit encerclée, et à moins que vous n’ayez une force suffisante pour briser un siège de plusieurs armées, le seigneur Denethor me charge de dire qu’il juge que les puissantes armes des Rohirrim seraient mieux à l’intérieur de ses murs qu’au-dehors. «

« Mais il sait que nous sommes un peuple qui se bat plutôt à cheval et en terrain découvert, et aussi que nous sommes dispersés et qu’il faut un certain temps pour rassembler nos Cavaliers. N’est-il pas exact, Hirgon, que le seigneur de Minas Tirith en sait plus long que ce qu’il indique dans son message ? Car nous sommes déjà en guerre, comme vous l’avez pu voir, et vous ne nous trouvez pas tous en état d’impréparation. Gandalf le Gris a été parmi nous, et en ce moment même où nous nous rassemblons pour le combat de l’Est. «

« Je ne saurais dire ce que le seigneur Denethor peut connaître ou deviner de toutes ces choses, répondit Hirgon. Mais notre cas est vraiment désespéré. Mon seigneur ne vous envoie aucun ordre, il vous demande seulement de vous souvenir de la vieille amitié et des serments depuis longtemps prononcés, et, pour votre propre bien, de faire tout ce qui est en votre pouvoir. Nous apprenons que de nombreux rois sont venus de l’Est au service du Mordor. Du Nord au champ de Dagorlad, il y a des escarmouches et des rumeurs de guerre. Dans le Sud, les Haradrim bougent, et la peur s’appesantit sur toutes nos côtes, de sorte que peu d’aide nous viendra de là. Hâtez-vous ! Car c’est sous les murs de Minas Tirith que se décidera le destin de notre temps, et si la marée n’est pas contenue là, elle submergera tous les beaux champs de Rohan et même dans ce refuge parmi les collines, il n’y aura nul abri. «

« Sombres nouvelles, dit Théoden, mais non pas toutes indevinées. Dites toutefois à Denethor que nous viendrions à son aide même si le Rohan n’était pas en danger. Mais nous avons essuyé beaucoup de pertes au cours de nos combats contre le traître Saroumane, et nous devons encore penser à nos frontières du nord et de l’est, comme les nouvelles de lui le rendent clair. Une puissance telle que celle dont le Seigneur Ténébreux paraît maintenant disposer pourrait bien nous contenir dans une bataille devant la ville sans qu’il soit empêché de frapper avec une grande force au-delà de la rivière après la Porte des rois.

« Mais ne parlons plus des conseils que dicterait la prudence. Nous viendrons. La prise d’armes était fixée à demain. Quand tout sera ordonné, nous partirons. J’aurais pu déverser dix mille lances dans la plaine au désarroi de vos ennemis. Ce sera moins à présent, je le crains, car je ne laisserai pas toutes mes places fortes sans défense. Toutefois, six mille Cavaliers me suivront. Car dites à Denethor qu’en cette heure le Roi de la Marche descendra en personne au pays de Gondor, encore qu’il puisse bien n’en pas revenir. Mais c’est une longue route, et hommes et bêtes doivent atteindre le but avec assez de force pour le combat. Il faudra peut-être une semaine à compter de demain matin pour que vous entendiez venir du Nord le cri des Fils d’Eorl. «

« Une semaine ! dit Hirgon. S’il le faut, il le faut. Mais dans sept jours d’ici vous ne trouverez sans doute que des murs en ruine, à moins d’une autre aide inattendue. Quoi qu’il en soit, vous pourriez au moins déranger les Orques et les Hommes Basanés de leur festoiement à la Tour Blanche. «

« Nous ferons au moins cela, dit Théoden. Mais je rentre juste moi-même du combat et d’un long trajet, et je vais maintenant aller me reposer. Demeurez ici cette nuit. Vous verrez ainsi le rassemblement du Rohan et vous repartirez plus heureux de cette vision, et plus rapidement quant au reste. Les décisions sont meilleures le matin, et la nuit change maintes penses. «

Sur quoi, le roi se leva, et tout le monde fit de même. « Allez maintenant, chacun à son repos, et dormez bien, dit-il. Et vous, maître Meriadoc, je n’ai plus besoin de vous ce soir. Mais soyez prêt à répondre à mon appel dès le lever du soleil. «

« Je serai prêt, dit Merry, même si vous m’ordonniez de vous accompagner sur les Chemins des Morts. «

« Ne prononcez pas de paroles de sinistre augure ! dit le roi. Car il peut y avoir plus d’une route à laquelle ce nom conviendrait. Mais je n’ai pas dit que je vous ordonnerais de m’accompagner sur quelque route que ce soit. Bonne nuit ! «

« Je ne me laisserai pas abandonner là pour être convoqué au retour ! dit Merry. Je ne me laisserai pas abandonner, non. « Et, se répétant sans cesse ces mots, il finit par s’endormir sous sa tente.

Il fut réveillé par un homme qui le secouait. « Réveillez-vous, réveillez-vous, maître Holbytla ! « criait l’homme, et Merry, sortant enfin de ses rêves profonds, se redressa en sursaut. Il faisait encore très noir, se dit-il.

« Qu’y a-t-il ? « demanda-t-il.

« Le roi vous demande. «

« Mais le soleil n’est pas encore levé «, dit Merry.

« Non, et il ne se lèvera pas aujourd’hui, maître Holbytla. Ni jamais plus, pourrait-on penser sous ce nuage. Mais le temps ne s’arrête pas, même si le soleil est perdu. Dépêchez-vous ! «

Ayant enfilé en hâte quelques vêtements, Merry regarda au-dehors. Le monde était obscur. L’air même paraissait brun et tout alentour était noir, gris et sans ombre, une grande immobilité régnait. On ne voyait aucune forme de nuage, si ce n’était très loin à l’ouest, où les plus lointains doigts tâtonnants du grand assombrissement rampaient encore et où un peu de lumière filtrait au travers. Au-dessus s’étendait un lourd plafond sombre et sans relief, et la lumière semblait plutôt diminuer que croître.

« Le roi soupira, mais personne ne répondit jusqu’à ce qu’enfin Eomer parlât.

« Nous n’en savons rien, et nous avons le cœur lourd, dit-il.

Mais pour ce qui est des Chemins des Morts, vous en avez vous - même passé les premières marches.

Non, je ne prononce aucune parole de mauvais augure ! La route que nous avons gravie est l’approche de la Porte, là -bas dans le Dimholt.

Mais aucun homme ne sait ce qui s’étend au -delà.

» « Aucun homme ne le sait, dit Théoden, pourtant l’ancienne légende, rarement rappelée de nos jours, en dit quelque chose.

S’il faut en croire ces vieux contes transmis de père en fils dans la Maison d’Eorl, la Por te sous le Dwimorberg mène à un chemin secret qui va sous la montagne vers une fin oubliée.

Mais personne ne s’y est jamais aventuré pour déchiffrer le secret, depuis que Baldor, fils de Bregon, passa la Porte et ne fut jamais revu parmi les hommes.

Il ava it prononcé un vœu inconsidéré, alors qu’il vidait la corne au festin que Bregon avait donné pour consacrer la ville de Meduseld nouvellement construite, et il ne monta jamais sur le haut siège dont il était l’héritier. « On dit que les Morts des Anné es Sombres gardent la route et ne permettent à aucun vivant d’accéder à leurs salles cachées, mais on peut les voir parfois eux -mêmes franchir la Porte comme des ombres et descendre la route des pierres.

Les habitants de Harrowdale assujettissent alors leu rs portes et voilent leurs fenêtres, et ils tremblent de peur.

Mais les Morts sortent rarement et seulement en des temps de grande inquiétude et de mort prochaine. » « On dit pourtant à Harrowdale, intervint Eowyn d’une voix basse, qu’il y a peu a passé pa r les nuits sans lune une grande armée en étrange arroi.

Nul ne savait d’où elle venait, mais elle gravit la route des pierres et disparut dans la montagne, comme pour répondre à un rendez - vous.

» « Pourquoi alors Aragorn est -il allé par -là ? demanda Merry .

N’avez-vous aucune explication ? » « À moins qu’il ne vous ait dit en tant qu’ami des choses que nous n’avons pas entendues, répondit Eomer, personne actuellement sur la terre des vivants ne peut dire quel est son but. » « Il m’a paru grandement changé depuis la première fois que je l’ai vu dans la maison du roi, dit Eowyn : il était plus sévère, plus vieux.

Sur le point de mourir, m’a -t- il paru, comme un de ceux que les Morts appellent.

» « Peut -être a -t- il été appelé, dit Théoden, et mon cœur me dit que je ne le reverrai pas.

C’est pourtant un homme royal de haute destinée.

Et trouve un réconfort en ceci, ma fille, puisque tu parais avoir besoin de réconfort dans ton affliction pour cet hôte : Il est dit que lorsque les Eorlingas descendirent du Nord et finirent par franchir le Snowbourn à la recherche de places fortes de refuge en temps de nécessité, Bregon et son fils Baldor gravirent l’escalier du refuge et arrivèrent ainsi à la Porte.

Sur le seuil était assis un vieillard, d’un âge indéterminable, il avait été grand et majestueux, mais il était alors desséché comme une vieille pierre.

En fait, ils le prirent pour une pierre, car il ne bougeait pas et ne dit mot jusqu’au moment où ils voulurent le dépasser et entrer.

Alors une voix sortit de lui, que l’ on eût dit venue de la terre, et, à leur stupéfaction, elle parlait dans la langue de l’ouest : La voie est fermée.

« Ils s’arrêtèrent alors et, l’examinant, ils virent qu’il était toujours vivant, mais il ne les regardait pas.

La voie est fermée , reprit la voix.

Elle fut faite par ceux qui sont morts, et les Morts la gardent jusqu’au moment venu.

La voie est fermée. «Et quand sera ce moment ? demanda Baldor.

Mais il ne reçut jamais de réponse.

Car le vieillard mourut dans l’heure et tomba face contre terre, et les autres n’eurent jamais plus aucune nouvelle des anciens habitants des montagnes.

Peut -être, cependant, le temps annoncé est -il venu et Aragorn peut -il passer.

» « Mais comment un homme saurait -il si le temps est venu ou non, sans oser affronter la Porte ? demanda Eomer.

Et je n’irais pas par -là, toutes les armées de Mordor seraient -elles après moi et serais - je seul, sans aucun autre refuge.

Quelle pitié qu’une humeur de mort soit tombée sur un si grand cœur en cette heure critique ! N’y a-t- il donc pas assez de choses mauvaises dans le monde sans aller les chercher sous la terre ? La guerre est là.

» Il se tut, car il y eut à ce moment un bruit au -dehors : la voix d’un homme qui criait le nom de Théoden, et le qui -vive de la garde.

Le Capitaine de la Garde tira bientôt le rideau.

« Il y a là un homme, Seigneur, dit - il, un messager de Gondor.

Il désire paraître immédiatement devant vous. » « Qu’il vienne ! » dit Théoden.

Un homme de haute taille parut, et Merry retint un cri, car il lui sembla un insta nt que Boromir, ressuscité, était revenu.

Puis il vit qu’il n’en était rien, l’homme était un étranger, bien qu’il ressemblât à Boromir comme un frère, grand, fier, avec des yeux gris.

Il était vêtu en cavalier avec un manteau vert foncé par -dessus une cot te de fines mailles, sur le devant de son casque était sertie une petite étoile d’argent.

Il tenait à la main une seule flèche, empennée de noir et barbelée d’acier, mais la pointe en était peinte de rouge. Il mit un genou en terre et présenta la flèche à Théoden.

« Salut, Seigneur des Rohirrim, ami du Gondor ! dit -il.

Je suis Hirgon, messager de Denethor, qui vous apporte ce signe de guerre.

Le Gondor est dans un grand besoin.

Les Rohirrim nous ont souvent aidés, mais à présent le seigneur Denethor demande toute votre force et toute votre célérité, de crainte que le Gondor ne tombe enfin. » « La Flèche Rouge ! » dit Théoden, la tenant de l’air de quelqu’un qui reçoit un appel depuis longtemps attendu et pourtant redoutable quand il vient.

Sa main tremblait. « La Flèche Rouge n’a plus été vue dans la Marche de toutes mes années ! Les choses en sont -elles donc arrivées là ? Et qu’est - ce que le seigneur Denethor estime que doive être toute ma force et toute ma célérité ? ». »

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