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Napoléon III

Publié le 16/02/2013

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1   PRÉSENTATION

Napoléon III, né Charles Louis Napoléon Bonaparte (1808-1873), homme d’État français, président de la République (1849-1852) puis empereur des Français (1852-1870).

2   UNE JEUNESSE EN EXIL

Né à Paris, Charles Louis Napoléon Bonaparte est le neveu de Napoléon Ier et le troisième fils de Louis Bonaparte et d’Hortense de Beauharnais (née du premier mariage de l’impératrice Joséphine). Son père, un personnage assez inconsistant, a occupé quatre années durant le trône de Hollande grâce à la faveur de Napoléon Ier, mais a été déchu du fait de sa médiocre gestion. Enfant d’un couple désuni — son père doute de sa paternité —, Louis Napoléon est élevé par sa mère, devenue duchesse de Saint-Leu après la chute du premier Empire, et passe sa jeunesse en Suisse, au château d’Arenenberg. Son principal précepteur, fils du conventionnel montagnard Philippe Lebas, est un futur disciple d’Auguste Comte. Quant à sa mère, elle développe chez lui le culte de la légende napoléonienne en le préparant à l’idée d’en assumer un jour l’héritage. Élève au collège militaire d’Augsbourg puis à l’École militaire de Thoune — d’où il sort officier d’artillerie de l’armée helvétique —, Louis Napoléon possède déjà à vingt ans certaines des convictions qui sont propres à sa future politique : Napoléon Ier est le continuateur de la Révolution française dont il a contribué à asseoir les principes, tandis que le congrès de Vienne, œuvre des vieilles puissances réactionnaires et absolutistes, n’a fait que consacrer des idées héritées du passé.

3   LE TEMPS DES CONSPIRATIONS

Sur la base de ces principes, il participe en 1831, aux côtés de son frère Napoléon Louis (membre de la Charbonnerie), au soulèvement des libéraux italiens en Romagne, soulèvement au cours duquel son frère meurt subitement d’une rougeole. Échappant à la police autrichienne, Louis Napoléon gagne ensuite Londres, où il participe à la préparation d’un coup de force sans suite contre la monarchie de Juillet. Revenu à Arenenberg, il devient, après la mort du duc de Reichstadt en 1832, le véritable chef du parti bonapartiste alors que son père et son oncle, nostalgiques des heures brillantes de l’Empire, ont depuis longtemps sombré dans le défaitisme et l’inaction.

S’assurant de quelques appuis au sein de l’armée, celui qui fait désormais figure de prétendant tente, en octobre 1836, de soulever la garnison de Strasbourg. Mal préparé, le coup de force échoue et Louis Napoléon, arrêté, est envoyé aux États-Unis. Il en revient en octobre 1837, trop tard pour assister sa mère au seuil de la mort. Interdit de séjour en Suisse sur pression du gouvernement français, il retourne à Londres où il rédige un ouvrage de réflexion politique, les Idées napoléoniennes, tout en préparant un nouveau coup de force.

En août 1840, il débarque à Boulogne-sur-Mer avec cinquante conjurés. Mais Louis Napoléon est arrêté quelques heures plus tard, condamné à la réclusion perpétuelle et interné au fort de Ham. Il met à profit son incarcération pour rédiger une Histoire de l’artillerie ainsi qu’un essai au titre demeuré fameux : l’Extinction du paupérisme ; il y fait fidèlement référence aux préoccupations sociales du moment.

En mai 1846, après six ans de captivité, Louis Napoléon emprunte les vêtements d’un maçon surnommé Badinguet (nom dont l’affublent ironiquement ses adversaires sous l’Empire) et parvient à s’échapper. Il se rend de nouveau à Londres où il se lie avec miss Howard qui lui apporte une aide financière importante et l’accompagne lorsqu’il rejoint Paris, à la faveur de la Révolution de 1848.

4   LE PRINCE-PRÉSIDENT

Prié de s’éloigner de la capitale sur ordre de Lamartine (membre du gouvernement provisoire), Louis Napoléon est cependant sur son seul nom élu à l’Assemblée constituante par quatre départements. Mais il préfère démissionner pour éviter que ne soit votée une loi d’exil l’éloignant encore du territoire national. Une nouvelle fois élu en septembre par cinq départements à l’Assemblée législative, il ne tarde pas à apparaître comme l’homme de la réconciliation, soutenu à la fois par les notables qui craignent l’installation du désordre et par le peuple pour lequel il incarne la promesse d’un retour à la gloire passée.

Soutenu enfin par le parti de l’Ordre, notamment par Thiers, et bénéficiant de la peur du péril rouge qui paralyse les campagnes depuis les journées de juin 1848, Louis Napoléon est élu président de la République le 10 décembre 1848, devançant largement Cavaignac, Ledru-Rollin et Lamartine. Ce triomphe est pourtant assombri par la victoire des royalistes à l’Assemblée législative en 1849, puis par la promulgation de la Constitution de la IIe République limitant son mandat à quatre ans.

Habile tacticien politique, il réduit d’abord à néant l’opposition républicaine puis laisse les conservateurs se discréditer par une politique réactionnaire et impopulaire (expédition de Rome en 1849, loi Falloux sur l’éducation en 1850 et suppression du suffrage universel en 1850), tout en se présentant comme le défenseur de la démocratie et du suffrage universel, et en travaillant à s’attirer le soutien du monde ouvrier.

5   LA RESTAURATION DE L’EMPIRE
5.1   Le coup d’État de décembre 1851

Pour autant, Louis Napoléon ne réussit pas à faire modifier la Constitution, à dessein de se faire réélire en 1852. Jouissant cependant d’une grande popularité, il décide, avec l’aide de son frère utérin Morny et d’hommes tels que Persigny, Maupas et Saint-Arnaud, de perpétrer un coup d’État, le 2 décembre 1851, date anniversaire du sacre de Napoléon Ier et de la victoire d’Austerlitz. Au matin du 2 décembre, Louis Napoléon fait afficher une proclamation annonçant la dissolution de l’Assemblée, le rétablissement du suffrage universel et l’organisation prochaine d’un plébiscite sur les nouvelles institutions.

Malgré des mouvements de contestation, qui provoquent l’arrestation de quelque 27 000 personnes et l’exil de nombreux opposants, le plébiscite du 21 décembre 1851 donne une majorité écrasante aux partisans du coup d’État. Dès le 14 janvier 1852, une nouvelle Constitution est promulguée. Elle accorde à celui que Victor Hugo a surnommé « Napoléon le Petit « dix ans de pouvoirs étendus, qui en font à la fois le chef de l’État et le chef du gouvernement. Le pouvoir législatif, partagé entre le Conseil d’État et le Corps législatif, se réduit en fait à un pouvoir d’approbation. Quant au Sénat, composé sur une base exclusivement honorifique, il est le gardien de la Constitution.

Du reste, dans l’esprit de son initiateur, cette Constitution n’est pas destinée à durer. Après avoir préparé l’opinion durant l’année 1852 et fait lever l’état de siège en mars, Louis Napoléon organise un nouveau plébiscite (21 novembre) et proclame l’Empire le 2 décembre 1852, prenant le titre de Napoléon III. Dépourvu d’héritier, il fait de la branche cadette de la maison Bonaparte, celle de Jérôme, l’héritière de la Couronne impériale.

5.2   Un empereur autoritaire

En 1853, Napoléon III épouse une jeune fille de la grande noblesse espagnole, Eugénie de Montijo, fille du comte de Teba. Ensemble, ils ont un fils : Eugène Louis Napoléon, « prince impérial « né en 1856 et tué en Afrique australe par les Zoulou en 1879. L’impératrice, à laquelle Napoléon III n’est pas fidèle tout en lui témoignant du respect, exerce une influence importante sur les affaires politiques. Très catholique, favorable à une politique conservatrice, elle contribue sans doute à favoriser la pratique autoritaire du pouvoir napoléonien jusqu’aux années 1860. Nourri d’influences contradictoires et bien qu’il a cultivé dans sa jeunesse des aspirations romantiques et un amour sincère de la liberté, Napoléon III est en effet convaincu qu’un régime autoritaire doit favoriser le développement économique et social du pays. Par ailleurs, le bonapartisme, mélange de paternalisme et d’autorité, s’appuie sur la conviction que tous les corps intermédiaires ne font que déformer la voix du peuple et que ce dernier, épris d’ordre et de paix, s’exprime de manière authentique par le biais du plébiscite.

Pour autant, Napoléon III ne gouverne pas avec le peuple. Favorable, dans son principe même, aux notables et aux grands capitalistes, sa politique ambiguë est menée en grande partie avec un personnel politique issu de l’opposition dynastique à la monarchie de Juillet (tel Eugène Rouher, avocat républicain qui compte parmi les pères de la Constitution). Il s’appuie également sur les préfets, l’armée et la police pour museler toute velléité d’opposition, exigeant des fonctionnaires un serment de fidélité, supprimant la liberté de la presse et, de fait, la liberté d’opinion.

5.3   L’expansion économique

Au delà de cet autoritarisme, le régime de Napoléon III accomplit en quelques années une œuvre économique considérable. L’industrie et le commerce connaissent un développement important, fruit d’une politique volontariste, largement teintée de saint-simonisme. Durant cette période, le réseau ferroviaire passe de 3 000 km (1852) à 18 000 km (1870) — les axes essentiels du réseau actuel sont déjà mis en place. L’expansion de certains secteurs industriels (textile, chimie, sidérurgie, métallurgie), la rationalisation et la modernisation de l’agriculture, la création des structures du capitalisme moderne (notamment de grandes banques capables de financer l’industrie grâce au crédit) permettent un fort essor économique et industriel, bien qu’il ne concerne pas l’ensemble du territoire. On assiste au passage progressif du protectionnisme au libre-échange, consacré par le traité de commerce du 23 janvier 1860 avec la Grande-Bretagne.

L’État lui-même donne une impulsion considérable aux travaux publics. Exemple emblématique, le programme d’aménagement de Paris, confié au baron Haussmann, transforme la physionomie de la capitale, tout en doublant la ségrégation sociale d’une ségrégation spatiale. Période d’expansion économique, et donc d’argent facile, d’affairisme, la première partie du règne de Napoléon III laisse donc le souvenir d’une « fête impériale « dont la cour, aux Tuileries comme à Compiègne, donne bien le ton. Pour le reste, l’expansion ne profite pas également à tous les Français. Ainsi, les années 1852-1870 ne marquent pas une amélioration du niveau de vie des ouvriers, contrairement à celui des notables, soutiens du régime impérial.

5.4   La politique étrangère

En politique étrangère, Napoléon III est confronté à l’hostilité des grandes puissances européennes en raison de la tradition belliciste, voire expansionniste, dont on l’imagine dépositaire. Mais Napoléon III se révèle être un fin tacticien de l’arme diplomatique et militaire. Avec la guerre de Crimée, engagée en 1854 pour contrer l’expansionnisme russe vers la Méditerranée, il voit le moyen de se rapprocher de la Grande-Bretagne et de séparer la Russie de l’Autriche (alliées depuis 1815). La chute de Sébastopol et le traité de Paris de 1856 réintroduisent la France dans le concert des nations européennes tout en consacrant, avec l’autonomie accordée à la Serbie et au Monténégro, une ébauche de reconnaissance du principe des nationalités.

C’est au nom de ce principe que Napoléon III, peu après l’attentat d’Orsini (janvier 1858) — attentat qui débouche sur l’instauration momentanée de la « loi de sûreté générale « et sur un durcissement du régime —, se penche sur la question de l’unification italienne. Favorable à une confédération italienne, il promet à Cavour son soutien lors de l’entrevue de Plombières (juillet 1858), en échange du rattachement de Nice et de la Savoie à la France. Peu après la défaite des Autrichiens au terme de la campagne d’Italie, la France annexe les deux territoires convoités, mais elle voit se créer à sa porte un puissant royaume qui ne cesse de s’agrandir aux dépens des anciens États italiens. En outre, la question de Rome, dont beaucoup d’Italiens veulent faire leur capitale, est en France une cause de dissensions politiques : les catholiques, attachés à la stabilité du statut de la papauté, reprochent en effet à l’empereur son manque de fermeté à ce sujet (Rome est définitivement évacuée en 1866).

5.5   Vers l’Empire libéral

Pour l’Empire, le début des années 1860 marque un double tournant. Un tournant politique d’abord, puisque l’opposition républicaine fait son entrée au Corps législatif, de façon timide en 1857 puis plus franchement aux élections de 1863 ; d’autre part, l’hostilité d’une partie des catholiques à la politique romaine de l’empereur crée une opposition sur sa droite. Un tournant économique ensuite, symbolisé par le mécontentement d’une partie du monde industriel après la conclusion du traité de libre-échange de 1860.

À ces difficultés s’ajoutent certains revers, notamment en Algérie où la politique arabe, favorable aux indigènes, provoque l’incompréhension des colons mais aussi au Mexique où l’expédition envoyée pour soutenir l’empereur Maximilien, en 1862, se termine tragiquement en 1867.

Confronté à ce réveil des oppositions, Napoléon III, soutenu par Morny et Walewski, entreprend de libéraliser le régime par une politique de concession, cherchant en particulier à gagner le soutien du monde ouvrier, dont il encourage le courant réformiste, dominé par les ouvriers les plus qualifiés, et dont il favorise l’expression collective en faisant abolir en mai 1864 le délit de coalition (droit de grève). Enfin, malgré l’opposition manifestée par les bonapartistes autoritaires, il assouplit en 1868 le régime de la liberté de la presse (mai), et introduit le droit d’interpellation au Corps législatif.

6   LA CHUTE DE NAPOLÉON III

Au terme des élections de 1869, la réduction de représentation à l’Assemblée entre bonapartistes et républicains fait comprendre à Napoléon III qu’il est temps de modifier radicalement l’orientation du régime. Ne pas tenir compte du reclassement politique équivaudrait à un suicide. Napoléon III décide alors de former « un cabinet homogène, représentant fidèlement la majorité du Corps législatif «. Le 2 janvier 1870, Émile Ollivier forme un cabinet comprenant bien sûr de fervent bonapartistes mais également des représentants du centre droit et du centre gauche. Au mois de mai, une nouvelle modification des institutions transforme l’Empire en une monarchie constitutionnelle — même si les ministres restent exclusivement responsables devant l’empereur. La victoire écrasante du « oui « (7,3 millions contre 1,5 million de « non «) lors du plébiscite du 8 mai 1870 semble conforter définitivement le camp de la réforme. Il ne s’agit pourtant pas d’un virement démocrate ; le ministère Ollivier est dirigé par un homme d’abord préoccupé de satisfaire les milieux conservateurs, d’affaire et les milieux cléricaux. Il s’affirme d’emblée prêt à réprimer tout mouvement social d’opposition au régime. Lors des manifestations hostiles à ce dernier, il n’hésite pas à faire donner la troupe et à emprisonner des figures de l’opposition, tel Rochefort. À ce facteur de déstabilisation du régime dans un contexte intérieur tendu s’ajoute la maladie de l’empereur.

Fatigué, de plus en plus souffrant (il est atteint de la maladie de la pierre), l’empereur ne sait pas distinguer les dangers qui menacent la sécurité du pays. En particulier, il commet l’erreur de sous-estimer la puissance prussienne et le fait que, pour des raisons de politique intérieure, le chancelier Bismarck souhaite ardemment la guerre contre la France. En 1866 pourtant, la victoire de la Prusse sur l’Autriche à Sadowa a fait apparaître les ambitions des Hohenzollern, qui depuis longtemps aspirent à être les artisans de l’unification allemande. Bien que mis en garde par ses conseillers les plus proches et malgré l’opposition de la gauche républicaine, Napoléon III cède donc à la provocation contenue dans la dépêche d’Ems et déclare la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870 (voir guerre franco-allemande de 1870).

Mal préparée et moins nombreuse en effectifs que les Prussiens, l’armée française accumule les défaites. Dès le 2 septembre 1870, Napoléon III, retranché à Sedan, doit capituler. Le 4 septembre, la République est proclamée à Paris, comme si le régime était finalement trop fragile pour supporter l’absence de son chef. Napoléon III est interné au château de Wilhelmshöhe, près de Kassel, puis il s’exile à Chislehurst (Grande-Bretagne) où il meurt des suites d’une intervention chirurgicale.

7   LE BILAN D’UN RÈGNE

La défaite de 1870 a contribué à discréditer la figure de Napoléon III, déjà en proie de son vivant aux sarcasmes féroces de Victor Hugo, aux critiques de Marx et d’Engels, et au mépris de l’opposition républicaine, qui l’ont considéré comme un fossoyeur des libertés. Pourtant, l’historiographie contemporaine a fini par reconnaître le rôle décisif qu’il a joué dans le développement de la révolution industrielle en France, même s’il n’a pas su, simultanément, donner une réponse satisfaisante à la question sociale.

Prince secret, en proie à des aspirations contradictoires, Napoléon III a été, bien involontairement, celui qui a contribué à définitivement tourner la page du modèle impérial en France : si, entre la monarchie réactionnaire et la république radicale, le bonapartisme — version rénovée du despotisme éclairé — a pu s’interposer, il est apparu après 1870 que seule la République pouvait réconcilier les Français et fonder un régime durable. Avec la fin du second Empire, la France a quitté le siècle de la recherche du meilleur régime possible pour entrer dans celui de la stabilité institutionnelle et républicaine (voir IIIe république).

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