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Orient, question d'

Publié le 11/02/2013

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question

1   PRÉSENTATION

Orient, question d', terme utilisé à partir de 1821 pour décrire les crises de la diplomatie internationale liées à la désagrégation de l’Empire ottoman.

2   DES ORIGINES DU CONFLIT AU TRAITÉ DE PARIS DE 1856

La question d’Orient est née de la volonté de trois puissances européennes — l’Autriche-Hongrie, la Russie et le Royaume-Uni — de satisfaire leurs ambitions politiques et territoriales au détriment de l’Empire ottoman.

La dynastie des Habsbourg, tout d’abord, souhaite s’assurer une mainmise sur le Danube, mais également assujettir les Slaves d’Istanbul à son autorité afin de prévenir un soulèvement de leurs frères établis sur les territoires autrichiens. Ces désirs s’opposent à ceux des Russes, lesquels, à l’étroit en mer Noire, envisagent de s’assurer un débouché en Méditerranée en contrôlant les détroits du Bosphore et des Dardanelles. Le Royaume-Uni, enfin, exige de rester seul maître de la Méditerranée, et emploie tous les moyens à sa disposition pour empêcher les Russes d’y pénétrer.

Dans ce contexte, la question d’Orient remonte véritablement au traité de Kutchuk-Kaïnardji entre la Russie et l’Empire ottoman (21 juillet 1774), en vertu duquel le tsar obtient la liberté de navigation sur la mer Noire, le droit de passage par les détroits pour ses navires commerciaux et le droit de représentation de l’Église orthodoxe (religion de la majorité des sujets ottomans chrétiens) : ce traité, qui révèle la faiblesse de l’Empire ottoman, consacre la Russie comme la grande puissance la mieux à même de succéder aux Turcs ottomans en Europe.

Au cours du xixe siècle, inauguré par le soulèvement serbe de 1804, la question d’Orient devient considérablement plus complexe en raison de la montée du nationalisme parmi les sujets ottomans chrétiens et leurs aspirations à l’autonomie (voire à l’indépendance), et son évolution est marquée par une succession de crises internationales. Les guerres russo-turques, conclues par le traité de Bucarest (28 mai 1812), assurent à la Russie des gains territoriaux qui inquiètent le Royaume-Uni.

Ces inquiétudes s’accentuent lorsqu’en 1833 la Russie semble complètement dominer l’Empire ottoman (traité d’Unkiar-Skelessi du 26 juin), mais provoquent finalement, à l’instigation des Britanniques, la signature de la Convention des détroits de juillet 1841 instaurant une règle de droit international pour l’utilisation des détroits. En 1853, la France et le Royaume-Uni s’allient pour soutenir les Turcs contre les Russes lors de la guerre de Crimée. Trois ans plus tard, le traité de Paris (30 mars 1856) oblige la Russie à renoncer à de nombreuses revendications vis-à-vis des Turcs. Les puissances européennes promettent de respecter l’indépendance et l’intégrité de l’Empire ottoman : la question d’Orient devient alors une question totalement internationale.

3   ÉMERGENCE DES NATIONALISMES

Le traité de Paris de 1856 est ébranlé par les aspirations nationalistes des chrétiens des Balkans : la Grèce est indépendante (1832), la Serbie, le Monténégro et les principautés de Moldavie et Valachie (lesquelles formeront la future Roumanie) sont plus ou moins autonomes, mais de nombreux Serbes, Grecs et Bulgares restés dans l’Empire ottoman ne tardent pas à montrer leur mécontentement : tous les éléments sont réunis pour une crise orientale majeure.

Le soulèvement de paysans chrétiens en Bosnie-Herzégovine (1876) se propage en Bulgarie, où les Turcs matent la rébellion en perpétrant d’importants massacres qui provoquent la guerre entre l’Empire ottoman, la Serbie et le Monténégro, un tollé dans toute l’Europe, et une guerre russo-turque. Les Turcs y subissent une cuisante défaite, et le traité de San Stefano (3 mars 1878), proposant la création d’un grand État bulgare dans les Balkans, alarme le Royaume-Uni.

Les Britanniques contraignent alors la Russie à participer au congrès international de Berlin (13 juin-13 juillet 1878), qui révise le traité de San Stefano et sauve de la disparition l’Empire ottoman vaincu : la taille du nouvel État bulgare est considérablement réduite et certains territoires sont rendus aux Turcs. Mais la Serbie, le Monténégro et la Roumanie obtiennent l’indépendance, la Bosnie-Herzégovine est placée sous administration autrichienne et le Royaume-Uni s’octroie Chypre.

4   UNE QUESTION INTERNATIONALE

Après 1878, le concept de question d’Orient s’élargit, et est désormais considéré comme l’un des éléments clés du conflit général opposant la civilisation européenne à l’Orient : occupation française puis italienne (après 1912) en Afrique du Nord ; expansion britannique en Inde, dans le sud du Moyen-Orient et en Égypte ; expansion russe en Asie centrale. Dans une certaine mesure, la construction du canal de Suez (1869), la seconde guerre anglo-afghane (1878-1880), l’occupation britannique de l’Égypte (1882), les massacres arméniens (1895-1896), le projet des chemins de fer de Bagdad (1899) et la montée du pan-islamisme dans l’Empire ottoman découlent de la question d’Orient, qui finit par embraser également les territoires asiatiques de l’Empire ottoman.

Dans les années qui suivent, les États balkaniques continuent de faire valoir leurs revendications, et les soulèvements de 1908 déclenchent les guerres des Balkans (1912-1913), à la suite desquelles l’Empire ottoman, appelé alors l’« homme malade de l’Europe «, perd les territoires qui lui restent en Europe à l’exception de la Thrace. La principauté d’Albanie est créée, et les États balkaniques obtiennent de nouveaux territoires.

La question d’Orient commence à trouver son issue dans la Première Guerre mondiale, dont elle est le détonateur du fait des rivalités entre l’Autriche-Hongrie et la Serbie au sujet de la Bosnie-Herzégovine, annexée par les autrichiens depuis 1908. Les Turcs, qui combattent aux côtés des empires centraux, sont vaincus. Le traité de Sèvres (10 août 1920) leur fait perdre les provinces arabes et la Thessalie orientale, ainsi que certaines parties de l’Anatolie. Le soulèvement national turc qui s’ensuit entraîne une nouvelle guerre gréco-turque, laquelle aboutit à la révision du traité de Sèvres par le traité de Lausanne (24 juillet 1923). Ce traité rend aux Turcs la Thessalie orientale, ainsi que le contrôle total de l’Anatolie et des détroits (dont l’utilisation est définie par une convention internationale), constituant ainsi une Turquie sans minorités nombreuses.

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