Rapallo, traités de

Rapallo, traités de, nom de deux traités signés après la Première Guerre mondiale dans la ville italienne du même nom, située au sud-est de Gênes ; le premier entre la Yougoslavie et l'Italie (12 novembre 1920), le second entre l'Allemagne et l'Union des républiques socialistes soviétiques (16 avril 1922).

Ce traité régla le problème de la revendication de la Dalmatie par l'Italie et la Yougoslavie au sortir de la Première Guerre mondiale. Cette dernière se vit attribuer la région à l'exception de la ville portuaire de Zara (aujourd'hui Zadar) ainsi que plusieurs îles dalmates de l'Adriatique, les îles Kvarner, qui revinrent à l'Italie. Le port de Fiume (aujourd'hui Rijeka), également objet de convoitise entre les deux pays, et pour qui le poète Gabriele D'Annunzio se rendit célèbre en septembre 1919 par son occupation de la ville, fut déclaré ville indépendante.

Par ce traité, signé lors de la conférence économique internationale de Gênes qui se tint d'avril à mai 1922, l'Allemagne reconnaissait le nouvel État soviétique. Ce traité bilatéral fut signé, à la surprise des puissances victorieuses en 1918, par deux pays que la guerre avait isolés : les Allemands avaient été vaincus et s'étaient vus imposer le « diktat « de Versailles le 28 juin 1919. Les Soviétiques avaient conclu, en dépit de leur appartenance à la Triple-Entente, une paix séparée avec les Allemands en mars 1918 (traité de Brest-Litovsk) ; lors de la guerre civile, Britanniques et Français avaient largement contribué à l'effort de guerre des « blancs « contre les « rouges «. Les Français étaient particulièrement hostiles à ces deux pays : l'Allemagne regimbait à payer les dommages de guerre et les Soviétiques avaient purement et simplement annulé les remboursements dus par l'État russe au 1,6 million d'épargnants Français qui avaient acheté avant 1914 des emprunts pour plus de 11 milliards de francs-or. Par le traité de Rapallo, Gueorgui Tchitcherine et Walter Rathenau rétablirent des relations diplomatiques et consulaires entre l'État soviétique et l'Allemagne ; ainsi, celle-ci devenait le premier État à reconnaître la nouvelle puissance orientale. Côté soviétique, on célébra la rupture du front des puissances capitalistes. De plus, Rapallo annulait les cessions territoriales consenties à Brest-Litovsk, ce qui confirmait la victoire finale des rouges dans la guerre civile. Parallèlement, des négociations secrètes, dont même Rathenau ne fut pas, semble-t-il, bien informé, établissaient des relations militaires entre les deux pays : l'Allemagne put, jusqu'en 1933, entraîner ce qui restait de la Wehrmacht, expérimenter de nouveaux armements en URSS et y implanter des usines d'armement.

Le traité de Rapallo apparut ainsi à la fois comme un espoir pour les Allemands et les Soviétiques et comme une menace contre l'ordre établi par les vainqueurs entre 1919 et 1921.