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SÉANCE 6  Marceline Desbordes-Valmore, Pauvres fleurs (1839) Victor Hugo, Les Châtiments (1853)

Publié le 12/06/2015

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hugo

SÉANCE 6  Marceline Desbordes-Valmore,

Pauvres fleurs (1839)

Victor Hugo, Les Châtiments (1853)

Cette dernière séance fait le lien entre le sentiment de deuil et celui de la colère, et rejoint les contenus de la séance consacrée à la peinture.

· Objectifs :

— Prolonger l'étude de la tonalité lyrique.

— Produire une argumentation structurée (écrit ou oral).

Réponses aux questions [LIVRE ÉLÈVE, P. 140]

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1. Le titre du recueil fait attendre une plainte élégiaque. Lyrique par le choix de l'énonciation, le poème a une tonalité épique, repérable dès la première lecture au système des rimes majoritairement suivies, et au caractère narratif du contenu (scène vue). Il s'agit d'un épisode historique relaté dans une forme violemment subjective. La structure prosodique recoupe la structure du récit, rythmé par les anaphores qui découpent le récit de l'émeute en quatre séquences temporelles. Le récit est interrompu par un quatrain dont les rimes embrassées rompent la régularité du système (1. 25-28). À cet effet sonore s'ajoute l'effet de la multiplication des accents rendant compte de l'émotion et le choc de l'image du soldat « farouche « tuant un nour¬risson. Ce quatrain bouleverse la structure du récit qui change alors d'énonciation tout en reprenant le système prosodique des rimes sui¬vies, mais sur un ton plus véhément, la colère ayant fait place à l'in¬dignation. Le dernier distique sert de conclusion justificatrice ; l'émotion est telle qu'elle rend les mots impossibles (« Nous n'avions

 

plus d'accents pour lamenter nos deuils «) et le dernier mot, accen¬tué à la rime, au bout d'une intonation ascendante (exclamation) donne sa couleur au poème : noir (deuil) et rouge (comme le sang, l'incendie et la colère).

2. La structure du poème l'apparente au genre épique : Les Tragiques, A. d'Aubigné ; La Légende des siècles, V. Hugo.

3. La structure anaphorique du poème met en relief les pronoms, répétés, symétriques et accentués par leur place dans le vers. La pre¬mière série de « je « souligne l'authenticité du témoignage (1. 7, 13 et 23) ; la seconde série de « je « est relayée par les possessifs et une ten¬tative de mise à distance du spectacle insupportable (« mon vol «, 1. 30 ; « mon âme «, « mon corps «, 1. 33), et s'adresse aux autres spec¬tateurs (ou lecteurs) potentiels : « devinez ! «, 1. 31 ; « savez-vous ! «, 1. 35-36. Les « nous « de la fin englobent «je et vous« dans une même fraternité de la révolte.

4. Une allégorie de la guerre civile se construit progressivement avec la personnification du « sang «, de la « bombe «, du « plomb «, de l'« incendie« (1. 1 à 4), tous « sujets « de phrases, dont les «complé¬ments d'objet« (c'est-à-dire les victimes passives) sont la «ville «, la « rue «, les « enfants « et les « pères «. Toutes les images de l'emphase amplifient l'allégorie initiale et donnent force à l'indignation du poète qui montre que tonalités épique et lyrique ne sont pas néces¬sairement inconciliables.

5. On pourra, avant de préparer la recherche d'arguments pour et contre la poésie engagée, écouter de nouveau quelques chansons. L'un des exemples les plus pertinents de chansons engagées est l'al¬bum « Motivés « enregistré par le groupe Zebda, qui réinterprète Le Chant des partisans, Le Temps des cerises et La Butte rouge, pour ne

 

parler que des chansons de lutte en français. Le plus classique est celui de Léo Ferré chantant Aragon (L'Affiche rouge).

Réponses aux questions [LIVRE ÉLÈVE, P. 157]

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1. Le titre « Chanson « peut être rapproché de la « Chanson de folie« de Blake. Le recueil des Châtiments en compte plusieurs de struc¬tures variables. Au xixe siècle, la chanson connaît un essor spectacu¬laire. Hugo s'inscrit dans la tradition d'Eugène Pottier, auteur de L'Internationale, de Jean-Baptiste Clément (Le Temps des cerises), et de Béranger, auteur de chansons satiriques. La disposition typogra¬phique confirme l'existence de refrains entre les strophes comme dans la chanson chantée. Le titre «La Société est sauvée« est celui de la première section des Châtiments. Chaque section porte un titre qui rappelle ironiquement l'un des principes du Second Empire : ici, le retour à l'ordre social. « Chanson « est la dixième pièce de la pre¬mière section. Les Châtiments, initialement intitulé Les Vengeresses, reprend sous forme poétique un pamphlet intitulé Napoléon le Petit.

2. Les changements de mètres suffisent à repérer le refrain, composé de 2 vers de 6 syllabes, et les couplets (5 alexandrins). Les refrains commencent tous par l'anaphore : «Mangez, moi je préfère... « et comportent le même nombre de syllabes.

3. Le 1" couplet commence par l'invective accusatrice au «courti¬san «. L'invective se développe avec l'image de l'« orgie« caricaturale, qui associe le rire à la débauche et la débauche à la trahison. Ce mélange de registres lexicaux et de tonalités se poursuivra, avec des variantes, dans chaque couplet. Le ton est celui du pamphlet : anti¬phrase (« César, très-bon, très-grand, très-pur «), trait appuyé (« bouche [...] élargie «), insulte (« apostats «) ; le contenu celui de la

 

satire politique (contestation des jeux du prince). Le refrain s'oppose donc à tous points de vue au couplet par le rythme (vers plus courts) et l'affirmation orgueilleuse de la singularité du poète.

4. Selon des procédés identiques, Hugo s'en prend successivement aux financiers, à l'armée, et au peuple (hypocrite), donnant de la société du Second Empire l'image d'une société corrompue, à laquelle s'oppose l'austérité du poète incorruptible.

5. et 6. Le refrain esquisse une image du poète imprécateur, juge moral et guide du peuple : « phare « de l'humanité aveugle, qu'on pourra rapprocher du poète « soldat « de Heine.

PROLONGEMENTS  Évaluation de fin de séquence

On choisira ou bien la production d'un texte poétique, poème à forme fixe ou libre, versifié ou en prose, ou bien un commentaire com¬posé du poème de Nerval « El Desdichado « : les questions 1 à 5 peu¬vent être envisagées comme une préparation à faire à la maison.

 

 

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