Devoir de Philosophie

LES CONFESSIONS DE ROUSSEAU (ANALYSE DE L'OEUVRE)

Publié le 25/06/2011

Extrait du document

rousseau

C'est l'éditeur Rey, d'Amsterdam (celui qui édita la Nouvelle Héloïse), qui suggéra à Rousseau l'idée de rédiger des Confessions en lui demandant avec insistance une -biographie qu'il publierait en tête d'une collection de ses oeuvres. Rousseau avait d'ailleurs esquissé une courte confession dans quatre Lettres à M. de Malesherbes qu'il lui avait envoyées en janvier 1762. En janvier 1765 il est décidé à composer ses Mémoires (il est alors à Môtiers). En mars ces Mémoires sont commencés. En août 1766 il travaille au cinquième livre (il est à Wootton). En août 1767 une deuxième rédaction est envoyée à son ami Dupeyrou. Quand il est rentré à Paris, en 1771, il fait dans divers salons, des lectures de son oeuvre ou il en communique le manuscrit. Cette publicité inquiète fort Diderot, Mme d'Epinay et leurs amis qui craignent un récit mensonger et calomnieux. Et Mme d'Epinay entreprend de rédiger des Mémoires qui établissent la vérité.

rousseau

« plus complexe (et du génie) son histoire est bien un témoignage unique pour tous ceux qui sont curieux de sonder etd'expliquer les formes les plus déconcertantes des tempéraments humains.

L'occasion est balle ; d'autant plus que,constamment, à travers les Confessions, Rousseau cherche à se comprendre lui-même, à donner des explications.Bonnes ou mauvaises ? On s'applique à en décider.

Par surcroît Jean-Jacques n'a pas craint de descendre dans lesobscurs mystères de ses instincts, dans les perversions de sa sexualité.

Et l'on ne peut pas douter qu'il ait étévictime de troubles mentaux qui touchent à certains moments à la folie.

C'est donc pour les médecins et «psychiatres » un cas exceptionnel qu'ils se sont assidument appliqués à commenter.

Pour ceux qui ne sont pasmédecins et qui ne sont que des lecteurs curieux les Confessions sont le tableau attachant d'une âme tourmentéequi se débat contre ses tourments, dont la vie a trop souvent roulé, si l'on veut, de chute en chute, mais qui, sanscesse a voulu se relever et dont le génie, quoi que l'on pense de ses misères, a dominé les misères.

Je n'ai pas àrevenir sur ce que le réel de s'a vie et l'étude de ses oeuvres suffit à faire comprendre.

C'est à chaque lecteur à sefaire son opinion.

Pour résumer l'intérêt de cette psychologie des Confessions, ce qu'elle a de sans cesse mouvantet dramatique, nous pouvons nous contenter de rappeler ce que Rousseau dit de lui-même :J'ai des passions très ardentes .et tandis qu'elles m'agitent rien n'égale mon impétuosité ; je ne connais plus niménagement, ni respect, ni crainte, ni bienséance ; je suis effronté, violent, cynique, intrépide ; il n'y a ni danger, nihonte qui me retienne ; auprès du seul objet qui m'occupe, l'univers entier disparaît devant moi.

Prenez-moi dans lecalme, je suis l'indolence et la timidité même ; tout m'effarouche, tout me rebute ; une mouche en volant me faitpeur, un mot à dire, un geste à faire épouvantent ma paresse ; la crainte et la honte me subjuguent à tel point queje voudrais m'éclipser aux yeux de tous les mortels.

S'il faut agir je ne sais que faire ; s'il faut parler je ne sais que,dire ; si l'on me regarde, je suis décontenancé.De là tant de contradictions dans les jugements des contemporains qui ont pu l'approcher.

Si persécuté qu'il soit ouse croie, au fond de lui-même il a le cœur tendre, il aime les hommes et parmi eux les Français.Ce penchant s'est trouvé si désintéressé de ma part, si fort, si constant, si invincible que, même depuis ma sortiedu royaume, depuis que le gouvernement, les magistrats, les auteurs se sont à l'envi déchaînés contre moi, depuisqu'il est devenu du bon air de m'accabler d'injustices et d'outrages je n'ai pu me guérir de ma folie.

Je les aime endépit de moi, quoiqu'ils me maltraitent.Dès lors si les uns le tiennent pour un fou ou même, comme Hume, pour un noir scélérat, ceux qui l'ont connu dansses bons moments le peignent comme un causeur aimable et enjoué, un esprit vif, un homme à l'allure aisée etrobuste, un hôte aimable.

Sans parler des amis et des amies fidèles, Moultou, Mme de Verdelin, Bernardin de Saint-Pierre, une bonne douzaine de visiteurs s'accordent.

Rousseau est un homme contradictoire.

Et l'on ne saurait mieuxdire que Guglielmo Ferrero :Rousseau était un philosophe doublé d'un poète [on peut ajouter que le poète a eu beaucoup plus d'influence que lephilosophe].

L'originalité de son génie a consisté dans une extraordinaire combinaison de qualités qui d'habitudes'excluent.

Croyant et critique, lyrique et dialecticien, enthousiaste et raisonneur, poète et juriste, réaliste etrêveur, timide et téméraire, impressionnable et en état permanent de lutte avec le monde, ses institutions, sestraditions, ses préjugés, désireux de tranquillité, de calme, de paix, de protection et agité par un besoin invincible decontradiction qui le pousse continuellement à attaquer.Il faut évidemment quelque application pour suivre la vie psychologique de Rousseau et ses constantescomplications.

Mais il n'en faut aucune pour vivre avec lui toutes les scènes pittoresques et vivantes desConfessions.

Pittoresque des événements puisque la vie y est faite d'aventures sans cesse changeantes, puisqueson humeur instable et son « indomptable esprit de liberté » le poussent hors de Genève, hors de la Savoie, àtravers la Suisse, à travers la vie des « beaux esprits » parisiens ; et que les persécutions dont il est l'objet etcelles dont il se croit l'objet lui imposent une existence errante en Suisse, en Angleterre, à, travers la France,jusqu'au moment où, après une dernière crise de sa manie de persécuté, il retrouve une sorte de paix à Paris.Surtout pittoresque des décors, des émotions qu'il revit, des bonheurs qu'il ressuscite.

Sans doute il a étédialecticien et raisonneur.

Il a écrit la mathématique sociale du Contrat et la démonstration religieuse de laProfession de foi du Vicaire savoyard.

Il a voulu « penser » et il a pensé.

Mais il a répété à dix reprises que rien nelui était plus pénible que de penser..

Non seulement les idées me coûtent à rendre ; elles me coûtent même àrecevoir ».

Mais à l'époque où les Confessions sont commencées, il a renoncé à penser.

Ou, du moins, il n'a plus àpenser qu'à lui-même, à se souvenir.

Et il se souvient avec précision et avec délices : « Je me rappelle le lieu, letemps, le ton, le regard, le geste, la circonstance ; rien ne m'échappe.

» Et ce qui ressuscite ainsi est profondémentoriginal.

Les Confessions complètent la Nouvelle Héloïse et créent vraiment, dans la prose française, la solitude, lapastorale vécue et le rêve.Ce n'est pas que les solitudes manquent dans les lettres françaises.

Il y en a des dizaines à commencer seulementpar cette « Solitude où je trouve une douceur secrète...

» où La Fontaine se souvient autant de Virgile que de lui-même.

Mais ce sont toutes des solitudes moralisantes.

Qu'on est bien dans cette solitude, ou même dans ce désert,pour échapper aux tentations de la vie mondaine, se repentir de ses erreurs et se promettre de n'y plus retomber !Celle de Rousseau est instinctive :Je suis né avec un amour naturel pour la solitude, qui n'a fait qu'augmenter à mesure que j'ai mieux connu leshommes. Dans cette solitude Rousseau trouve d'abord la nature qui l'accueille, ne le déçoit jamais et lui donne cette ivressede bonheur qui n'a presque point de termes pour l'exprimer : Ici [aux Charmettes] commence le court bonheur de ma vie ; ici viennent les paisibles mais rapides moments quim'ont donné le droit de dire que j'ai vécu.

Moments précieux et si regrettés ! ah ! recommencez pour moi votreaimable cours, coulez plus lentement dans mon souvenir, s'il est possible, que vous ne fîtes réellement dans votrefugitive succession.

Comment ferai-je pour prolonger à mon gré ce récit si touchant et si simple, pour redire toujours. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles