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De l'être à l'existence

Publié le 15/01/2004

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L'énigme de l'être * On peut, dans un premier temps, ne pas distinguer l'être et l'existence. Leibniz parle de l'être quand il s'étonne qu'il y ait quelque chose plutôt que rien. Sartre reprend cette interrogation dans La Nausée (1938). L'être ne se justifie pas : « Tout est gratuit, écrit Sartre, ce jardin, cette ville et moi-même ; quand il arrive qu'on s'en rende compte, ça vous tourne le coeur et tout se met à flotter ». La nausée est le sentiment que tout est contingent, que l'être n'est pas nécessaire. J'existe, certes, mais j'aurais tout aussi bien pu ne jamais exister. « Les êtres apparaissent, écrit encore Sartre, se laissent rencontrer, mais on ne peut jamais les déduire. » * Insistons sur le fait que la révélation de la contingence de l'être n'est pas nécessairement liée à des expériences négatives, tristes ou douloureuses. Certes, c'est parfois au sein de l'ennui ou à l'occasion d'un grand désespoir que surgit en nous le sentiment de la déréliction, le sentiment d'avoir été jeté dans le monde sans perspective ni soutien, pour rien. Mais c'est parfois aussi dans la joie, dans l'ivresse d'une passion heureuse ou d'un émerveillement, que nous découvrons la gratuité de toute chose.

« C.

Primauté de l'existence sur l'essence • « L'existence précède l'essence », proclame Sartre dans L'existentialismeest un humanisme (1946).

Comme Kierkegaard, Sartre parle de l'existencehumaine, laquelle diffère radicalement de l'existence des objets fabriqués.Tandis qu'une montre, par exemple, est d'abord une essence, une idée dansl'esprit du fabricant – elle est conçue expressément dans le but de donnerl'heure –, l'homme n'est pas construit sur un modèle dessiné d'avance et pourun but précis.

Il existe, tout simplement, avant de choisir d'être ceci ou cela. Une philosophie existentialiste se définit par le fait qu'elle pose l'existenceavant l'essence et de la sorte définit la condition humaine.

Les objetsmatériels dérivent d'un concept, répondent à une finalité — ce à quoi l'objetva servir — et à un ensemble de règles techniques.

Pour tout ustensile,l'essence précède l'existence, et son existence ne vaut que dans la mesureoù elle réalise l'essence, c'est-à-dire par rapport à l'idée qui a permis de laconcevoir et de la produire.

Dans la théologie traditionnelle, on voit en Dieuune sorte d'artisan supérieur qui a créé le monde et les hommes à partir d'uneidée, d'un projet.

Lorsque Dieu crée, il sait au préalable ce qu'il crée.

Chaqueindividu réalise un certain concept contenu dans l'entendement divin.

Au xviiiesiècle, au concept de Dieu a succédé le concept de nature humaine, chaquehomme étant un exemplaire particulier d'un concept universel : l'Homme.

Dupoint de vue de l'idée ou de l'essence, c'est-à-dire dans le fond, tous leshommes sont semblables, quels que soient leur culture, leur époque ou leur statut social.

Pour l'existentialisme athée tel que l'a pensé Sartre, Dieu n'existe pas, il n'y a pas d'origine unique aumonde, ni de référent suprême.

Il y a un donné d'origine : la réalité humaine, soit des individus qui d'abord existentavant de se définir par concepts.

On surgit dans le monde et l'on se pense ensuite.

Si l'homme est a prioriindéfinissable, c'est qu'a priori il n'est rien tant qu'il ne s'est pas fait lui-même par un engagement dans le monde :"L'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait." • Et il existe, précisément, en se choisissant.

Ajoutons que le choix est de tous les instants.

Nos libres décisionsd'hier n'engagent pas celles de demain.

A tout moment, je peux si je veux changer ma vie et par là modifier le sensmême de mon passé.

On saisit ici un sens très particulier du verbe exister qui l'oppose au verbe être.

Exister, c'estêtre en sursis, pouvoir à tout moment m'inventer un nouvel avenir.

C'est seulement au moment de ma mort – lorsquej'ai cessé d'exister – que ma vie devient être et essence.

Elle est désormais tout entière au passé, métamorphoséeen destin.

L'existence est devenue de l'être, figé, définitif, clos ; l'être, c'est de l'existence au passé.

Hegel avaitdonné ici déjà une admirable formule : « Wesen ist was gewesen ist », «Être c'est avoir été ».. »

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