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Exposition d'étranges images populaires au Musée de l'Homme, à Paris

Publié le 07/12/2011

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Le « Musée de l'Homme « présente depuis le 17 septembre une très curieuse collection d'images populaires en provenance des frontières de l'Inde et du Népal, une région située entre le Gange et l'Himalaya appelée le Mithila. Ces dessins, ces peintures, aux raffinements subtils et aux maladresses charmeuses, sont oeuvres de femmes, mais il serait erroné d'y voir un simple passe-temps destiné à aider les heures à couler. Ici, dessiner et peindre sont des gestes d'ordre religieux, apparentés à la prière, et sans lien avec la création esthétique que cela semble apparemment supposer. Ce qui est intéressant, c'est que les oeuvres, inspirées de la grande geste du Ramayana, où se trouvent rassemblés toutes les divinités du panthéon hindou, sont une véritable spécialité féminine dont les secrets, si tant est qu'il y en ait, sont transmis de mère à fille, de génération en génération.

« Qu'est-ce qu'une fête ? C'est la question que pose le sociologue Jean DuviGNAUD au terme d'une extraordinaire évo­ cation de rituels célébrés en tous temps et en tous lieux par les hommes, quand ils décident de briser subitement la trame serrée des jours.

En écrivant Fêtes et civilisations (Editions We­ ber, collection Terra Universalis, 204 pages, 55 francs), Jean Duvignaud a évoqué, à travers un grand nombre de pages descriptives souvent extraordinaires, les multiples aspects de cette sorte de transgression à l'emploi du temps, au travail ou à la morale, qu'on dénomme une fête.

La sociologie classique voulait voir dans les fêtes une véritable institution destinée à socialiser, en quelque sorte, ce qui risquait d'en­ traver la bonne marche de la société.

La fête, dans cette optique, aurait été une opération de récupération.

La soupape d'échappement aurait fait partie des conditions mêmes de la vie so­ ciale, qu'on aurait ainsi su garder, sans trop y paraître, dans les limites étroites de la rigueur sociale.

Or, pour Jean Duvignaud, la fête est justement en contradiction avec les normes sociales.

La fête est une révolte, sinon une révolution et les exemples qu'il donne par­ fois, de la Saint-Jean nazie de Munich, en 1937, à l'effervescence de mai 1968, sembleraient en témoigner.

La fête est un dégagement soc1 qui fait entrer une société donnée, pour un certain temps, dans un espace imaginaire où il lui est loisible de se repenser librement, c'est-à­ dire peut-être de se retrouver, ou, tout simple­ ment, de se trouver.

On voit très bien cela avec les débridements des carnavals, qui sont une révolte contre le réel quotidien, ou avec les étonnantes fêtes de la Renaissance, qu'elles fussent populaires ou princières, qui avaient pour but d'installer l'homme dans un univers de rêve.

La tradition, qui fixe le retour régulier de la fête, est un recours sans valeur : « L'homme, dit le sociologue, se couvre du mas­ que du passé pour entrer dans le futur ».

On s'aperçoit que le goût de la fête n'est pas mort, malgré l'écrasement imposé à l'imagination par la culture industrielle à laquelle nous sommes soumis.

Pourtant, la fête semble d'abord être un phénomène de crise.

Les Indiens péruviens dansent pour essayer de récupérer l'âme perdue dn peuple inca; la Renaissance a accordé une place privilégiée à la fête pour la raison que le xve siècle était, avec les guerres, les ravages de la peste, les famines, une période de grande misère et de grand désarroi moral.

La fête réalise peut-être l'impossible.

Mais cet entracte est aussi une sorte de répétition, dans le sens théâtral du mot, d'exercice grâce à quoi une histoire complète et précise prend forme et se concrétise.

L'homme est-il un animal social ? Dans un essai appelé à faire date dans l'his­ toire des relations sociales entre les hommes d'un même groupe ou de groupes différents, le sociologue américain Erving GOFFMAN étabht que l'art de vivre en société, c'est d'abord l'art du théâtre.

Le titre de son ouvrage : La mise en scène de la vie quotidienne (I : La présen­ tation de soi; II : Les relations en public, Editions de Minuit, collection Le sens commun, 256 et 375 pages) en témoigne suffisamment.

On le savait peut-être quand il s'agit, par exemple, de toilette, de vie en commun, de repas, etc., mais on le devinait moins quanl~ il s'agit du comportement inconscient.

Ainsi, le piéton qui circule dans une rue émet-il, à son insu la plupart du temps, une multitude de signaux destinés aux autres, qui sont autant destinés à faciliter sa marche au milieu de la foule qu'à faire apparaître sa personnalité.

La mise en ~.cène est partout et Goffman cite des milliers de cas qu'il a recensés dans tous les domaines, qui en disent long sur le compor­ tement humain.

On sait que la vie sociale exige des règles et qu'il vaut mieux leur obéir, même inconsciemment.

Mais voilà, il y a ceux qui brisent le pacte et se mettent à jouer faux dans un spectacle où tout le monde se donne du mal pour respecter la mise en scène.

On dit qu'ils sont fous.

Le fou joue une autre pièce.

L'intérêt de l'enquête menée par l'auteur de La mise en scène de la vie quotidienne, c'est de mettre en évidence la rupture qui s'est produite depuis quelques années dans le do­ maine des sciences de l'homme.

Ce n'est plus à la physique que les chercheurs se réfèrent désormais, mais à la biologie, en particulier.

L'ethnologie s'est avisée qu'elle avait beaucoup à gagner à l'étude du règne animal pour con­ fronter celui-ci à l'homme.

Dans la comédie humaine évoquée ici, on ne peut s'empêcher de penser au rôle maintenant bien connu de la parure ou de la parade dans la plupart des espèces animales.. »

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