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Une liberté sans limite est-elle souhaitable?

Publié le 24/01/2005

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En effet, ne peut être heureux que celui qui vît conformément à la justice ; or, l'absence de limite est aussi l'absence de justice. Telle sont les implications de la thèse socratique que développe Hobbes aux chapitres 13 et 14 du Léviathan.   b)     la liberté illimitée est un des fondements de la guerre de chacun contre chacun : Selon Hobbes, c'est volontairement que les hommes se sont soumis à l'autorité d'un état. En effet, à l'état de nature, la vie est « malheureuse, pénible, bestiale et brève », et cela, en raison d'un droit de nature absolu (Cf. note page 1) : l'état de nature, la condition où vivent les hommes « sans qu'une puissance commune les tiennent tous en respect », ne tombe sous le coup d'aucun jugement : rien ne peut être injuste puisque « là où il n'y a pas de puissance commune, il n'y a pas de lois ; là où il n'y a pas de lois, pas de justice ». Dès lors, la fraude et la force sont les vertus cardinales. Conséquence : les hommes renoncent à leur droit naturel en échange de la paix et de la sécurité assuré par l'état (qui est la somme des pouvoirs de tous).   Transition : -          On vient d'examiner les enjeux politiques du sujet : une liberté sans limite rend toute forme de justice impraticable : illimitée, la liberté est un des ressorts de la guerre, c'est-à-dire qu'elle ne peut qu'être source de conflits -          Cependant, Hobbes tire argument de ce constat pour justifier une obéissance absolue aux lois établies par l'état. De même, on sait que Platon critique violemment la démocratie (République, livre 8). Comment alors parler encore de liberté ?

·  Le sujet invite à s’interroger sur un certain type de liberté et non sur la liberté en général ; il conviendra donc de définir soigneusement cette liberté dite « sans limite «.

·  Ensuite, on nous demande de lui attribuer une valeur : est-elle « souhaitable « ?

·  Il s’agit là d’une valeur positive : souhaiter une chose, c’est penser l’existence de cette chose comme bonne, mais surtout, la souhaiter, c’est la vouloir (souhait = vœux).

·  Du coup, se dégage ici le présupposé du sujet : la liberté dont il est question n’est pas effective ou réelle, (sinon, comment pourrait-elle être l’objet d’un souhait ? étant déjà là, on ne saurait la désirer), mais elle est possible, une sorte de virtualité absente.

·  Il faudra donc aussi dégager ce qui l’empêche a priori d’exister.

                                                                                                  

Conséquences problématiques : Il faut se demander si cette possibilité doit ou non être actualisée : faut-il souhaiter, avec les anarchistes, la destruction de toute forme d’ordre, de hiérarchie et de pouvoir contraignants, au nom d’une liberté authentique, c’est-à-dire totale ? Ou au contraire, n’est-ce pas là un projet à peine viable, compte tenu des inévitables conflits que pourrait engendrer une liberté illimitée[1] ? N’est-ce pas le propre d’une liberté réelle d’ignorer les compromis ou bien une telle absence de limites ne conduirait-elle pas à la destruction même de toute liberté ?


[1] Sur ce point, on peut citer Hobbes ; les passions humaines sont telles qu’en l’absence d’un pouvoir contraignant qui tiennent tous les hommes en respect, chacun est une menace pour chacun, et cela, précisément parce que chacun est libre « d’user de sa propre puissance comme il le veut lui-même pour la préservation de sa propre vie « = définition du droit naturel, c’est-à-dire du droit sur toute chose, y compris sur le corps des autres, tant qu’on en est pas empêché. Droit naturel (ou liberté sans limite) = condition de la guerre qu’il s’agira d’annuler lors du pacte social. La liberté civile procède d’un renoncement à la liberté naturelle.

« «On ne fait pas ce que l'on veut et cependant on est responsable de ce qu'onest».Cette affirmation paradoxale est au centre de la philosophie sartrienne quis'efforce de concilier deux approches partielles de la réalité humaine quel'opinion commune juxtapose sans en dégager la portée véritable : consciencede toutes les déterminations auxquelles il est difficile, voire impossibled'échapper, et affirmation pourtant de la responsabilité pleine et entière de ceque l'on est.Il ne faut pas interpréter cette formule dans un sens stoïcien.

Pour lestoïcisme, l'esclave peut être beaucoup plus libre que le maître ; certes, il nefait rien de ce qu'il veut, mais il connaît la plénitude de la liberté intérieure ; ilest maître des choses par le jugement qu'il pose sur elles.

Or ce n'est pasainsi que Sartre pose le problème ; d'abord, il refuse à l'existence humainetout fondement métaphysique (Dieu, les Idées, l'Inconditionné) ; il se placed'emblée au niveau de la conscience dans sa réalité subjective.

Mais ilconsidère que la conscience n'existe pas en soi : « Toute conscience estconscience de quelque chose » et « l'existence pour l'homme précèdel'essence » ; le terme même d'existence révélant ce mouvement de sortie desoi (de l'intériorité).Il n'y a pas d'âme, pas d'essence qui tantôt imagine, tantôt veut, tantôt agit,tantôt perçoit : l'homme n'est pas son âme (sa pensée), il n'est que ce qu'ilfait.

Ce n'est pas dans le rapport de l'être et de la volonté que se situe laliberté humaine, puisque l'être peut se définir comme projet.

Si l'on n'est que ce que l'on veut, ce que l'on projetted'être, comment ne pas faire ce que l'on veut? L'esclave, pour Sartre, est libre mais pas du tout au sens où l'entendent les Stoïciens, car il est absurde d'opposerla liberté intérieure et la liberté de l'action.

L'esclave a dans l'action même, un choix à effectuer : il peut se lancerdans la révolte, il peut choisir de se donner la mort, tenter l'évasion.

Il peut aussi choisir la servitude.Pourtant, l'objection paraît évidente ; l'esclave ne choisit pas sa condition d'esclave.

«On ne fait pas ce que l'onveut».

C'est-à-dire que nous sommes contingents ou que la vie est absurde.

Nous sommes en effet façonnés par unmonde historique que nous ne choisissons pas ; nous sommes nés à une époque donnée dans un contexte socialdonné, et nous n'y pouvons rien.

S'il a 20 ans quand la mobilisation générale l'envoie au front combattre l'ennemi,pèse sur lui une série de contingences : c'est un homme, on ne mobilise pas les femmes dans son pays, il estcitoyen d'un pays en guerre, donc mobilisable et à ce titre, tous ses projets sont suspendus, et il court même lerisque absolu : celui de sa mort. Si tu avais été juif en 1936 en Allemagne, c'est en tant que juif que tu aurais été, que tu le veuilles ou non,déterminé au pire sens du terme, objet de menaces, de pressions...

là aussi jusqu'à la mort.

D'une manière plusprofonde, plus insidieuse parce que plus intérieure, je ne me choisis pas : je suis petit ou grand, laid ou beau,intelligent ou stupide, je ne peux rien changer dans mon hérédité, de mon passé, de mon enfance. « On ne fait pas ce que l'on veut » signifie simplement que l'on ne choisit ni le monde dans lequel on se trouve jeté,ni sa propre personne.

C'est ici que s'ouvre le champ de la liberté, la faculté de se choisir non « dans son être» maisdans «sa manière d'être», c'est-à-dire dans la façon dont « j'assume » mon être.

La liberté n'est pas le privilège dequelques-uns, ce n'est pas une conquête, on ne peut pas ne pas être libre : on «est condamné à être libre».Rappelons l'exemple précédent : celui qui a 20 ans quand survient l'ordre de mobilisation est libre de déserter, de sesuicider, donc de proclamer que cette guerre n'est pas la sienne et qu'il ne la veut pas. C'est «la bonne conscience», le conformisme, la peur de l'engagement personnel qui se masquent sous les mots dedevoir, de légalité et de nécessité.

Dans une guerre, si l'on excepte les enfants, « il n'y a pas de victimesinnocentes ».

Selon une même logique, Simone de Beauvoir a écrit : « on ne naît pas femme, on le devient ».

Ce quine signifie pas, bien sûr, qu'une femme est biologiquement semblable à un homme, mais que des millénaires decivilisation l'ont persuadée qu'elle devait se soumettre, qu'elle était inférieure.La détermination qui limite notre liberté n'a pas de sens en elle-même, elle n'a que le sens que nous lui conférons.

Lanotion d'obstacle à la volonté est purement subjective : de même qu'un rocher peut être (selon ce que je compteen faire) un obstacle sur mon chemin, un refuge derrière lequel je puis me cacher ou un moyen d'observation dupaysage, de même le fait que je sois né à telle époque, dans tel milieu, petit ou grand, laid ou beau...

peut paralyserou stimuler mon effort.

L'inauthenticité serait de ne pas choisir, de se «laisser choisir» par les valeurs de son milieu,par une inclination du caractère, par ses passions. En un certain sens, la liberté de l'homme est absolue, mais elle n'existe «qu'en situation», c'est-à-dire face à toutesles déterminations qui peuvent jouer tant de l'extérieur que de l'intérieur. Transition : - On vient de donner un sens à l'expression « liberté sans limite » et on a vu qu'elle pouvait être souhaitable (elle fait de nous des être méritant et nous rend maître de nos vies). - Cependant , cette liberté est donc aussi capacité de tout pouvoir : étant sans limite, tout devient. »

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