Devoir de Philosophie

La majorité a-t-elle toujours raison ?

Publié le 27/02/2008

Extrait du document

La majorité est un concept quantitatif tandis que la raison exprime un concept qualitatif. Dès lors nous pouvons observer que la question se situe au carrefour de champ de réflexion concomitant : la politique et la science. Plus exactement la question de savoir si la majorité a toujours raison nous interroge sur la norme de cette raison que l'on peut comprendre comme critère de vérité. Or c'est bien là que se pose le problème puisque la vérité n'est pas choisie, elle est évidente par elle-même et dispose d'une clarté tandis que la majorité a pour principe la discussion et l'élection. Cependant, s'il apparaît que la majorité devrait avoir toujours raison dans le domaine politique au risque sinon de conduire la cité à sa propre destruction, la formulation du sujet nous invite justement, par la radicalité du « toujours », à nous interroger sur le fondement d'une telle assertion. Or il nous suffit de jeter un regard sur l'histoire pour comprendre l'enjeu même de ce questionnement. En effet, il semble que l'on fasse à un paradoxe propre à la démocratie : elle suppose la prise de décision en commun, et l'on doit obéir à la majorité pourtant comment faire si elle est dans l'erreur. Il semble que l'on soit face à une aporie ou au moins face à un paradoxe.             Dès lors s'il apparaît que la majorité doit être comprise comme ayant toujours raison en vue du maintien de la cité et en vertu du pacte social (1ère partie), il faut bien remarquer de façon réaliste que celle-ci ne saurait avoir raison notamment dans les domaines scientifiques mais peut-être aussi dans le champ de la politique (2nd partie), mais ce serait la possibilité d'une démocratie qui serait alors remis en cause, il conviendra alors peut-être de chercher à trouver une solution pouvant éclairer ce problème et le résoudre (3ème partie).

« tenter de rendre onéreux pour autrui le pacte social et risquer de détruire la communauté politique.

Il faut doncobéir à la volonté générale car la majorité a toujours raison.

Et obéir à la loi qu'on s'est prescrite est faire preuve deliberté.

Pourtant, la majorité peut être aveuglée par la passion ou séduite : l'histoire nous montre effectivement desdécisions prise à la majorité dont les conséquences n'ont pas montré la raison ou le critère de vérité.

En effet, sidéjà dans le domaine politique on peut s'interroger sur la pertinence de la majorité qu'en est-il alors dans lesdomaines scientifiques ou dans les domaines supposant des connaissances et une spécialisation ? II – Conflit entre le quantitatif et le qualitatif a) En effet la question de la valeur de la majorité relativement à la raison est essentielle.

La majorité esteffectivement un concept quantitatif alors que la raison est un critère de vérité c'est-à-dire qu'elle a une valeurqualitative.

Or il arrive, comme nous le montre l'histoire que la majorité n'est pas toujours raison.

Le règne del'opinion est celui de la majorité or on peut remarquer que si la majorité avait toujours raison alors la question de ladésobéissance serait un faux problème dans la mesure où on devrait la réduire à une simple volonté de ne pas obéiret d'agir en vue du bien de la communauté.

Or comme le montre John Rawls dans sa Théorie de la justice : La désobéissance civil peut être définie comme « un acte public, non violent, décidé en conscience, mais politiquecontraire à la loi et accompli le plus souvent pour amener à un changement dans la loi ou bien dans la politique dugouvernement.

» Et elle prend place seulement dans le cadre d'une démocratie, c'est-à-dire là où le rôle de lamajorité a un sens.

Par là, on s'adresse au sens de la justice de la majorité de la communauté, à leur consciencemorale relativement à la question de la coopération sociale.

Ainsi, la désobéissance civile doit être limiter auxinfractions graves au principe de la justice, le principe de la liberté égale pour tous, et aux violations flagrantes de laseconde partie du seconde principe : le principe de la juste égalité des chances.

Autrement dit, cet appel faitréférence à une norme qualitative et non quantitative comme on peut le voir avec Thoreau justement dans son traité De la désobéissance car pour lui il est parfois de son devoir ne pas obéir à une loi c'est-à-dire d'agir comme l'a dicté la majorité, au risque sinon « de devenir un agent de l'injustice exercée à l'égard d'autrui.

» Il s'agitexplicitement d'un problème de conscience morale et c'est en ce sens qu'« il faut violer la loi » c'est-à-dire montreren quoi la majorité n'a pas raison.

Et c'est bien ce que feront dans un autre registre tous les « justes » de laSeconde Guerre mondiale.

Ainsi ce n'est pas toujours un devoir que de respecter la loi.b) Effectivement, le problème essentiel est de voir que l'on ne peut pas définir le fait d'avoir raison c'est-à-diredétenir la vérité par la norme quantitative du nombre donc celui de majorité.

En effet, bien souvent, la majorité estdu côté de l'opinion.

Elle n'est pas éclairée.

Or cela est d'autant plus voyant pour les sujets spécialisés, c'est-à-direles sujets techniques comme on peut le voir avec Platon dans la République .

Socrate pose effectivement la question de savoir qui sera le plus à même de bien conduire un navire ou de bien décider ce qu'il faut faire dans laguerre.

La réponse n'est pas la majorité mais bien le technicien c'est-à-dire le pilote et le stratège.

La majorité n'estjamais suffisamment spécialisée.

Mais plus radicalement c'est disqualifier l'opinion de la majorité.

Or c'est bien pourcela que Platon disqualifie la valeur de l'opinion et la valeur de la majorité pour ce qui concerne la vérité et sa recherche dans la mesure où elle n'est pas sujette à la réflexion.

L'opinion est en effet soumise à la séduction dudiscours, à la rhétorique comme on peut le voir dans le Gorgias .

L'opinion se courtise tandis que la vérité doit être connue de manière irréprochable.

Et c'est pour cela dans le Théétète l'opinion ne sera pas la définition adéquate de la science.

La vérité et l'opinion de la majorité sont donc radicalement différentes.

Et c'est bien ce que l'on peut voirchez Platon avec le cas de la ligne dans La République VI, 509d - 511 e.

L'enjeu général de ce passage est de classifier les différents niveaux ontologiques de l'être ou de la réalité et de les faire correspondre avec différentsmodes de connaissance.

La « parabole » de la ligne permet de schématiser cet argument et de nous orienter(comme une sorte de vecteur) vers la connaissance la plus claire, à savoir celle qui nous fait remonter à l'Idée.L'opinion est une croyance et en ce sens elle est de l'ordre du visible tandis que la science est de l'ordre del'intelligible.

Et cette distinction entre la science et l'opinion se retrouve dans le mythe de la caverne.

En effet, lespersonnes enchaînées et voyant les ombres portées sur la paroi de la caverne sont dans l'ordre de l'opinion et cen'est qu'après s'être sorti de ces chaînes afin de remonter à la surface donc métaphoriquement vers l'Idée que lascience peut advenir.

Science et opinion sont donc dans deux ordres de réalité différente l'une le monde del'apparence et l'autre le monde de l'Idée, des intelligibles, celui de la pensée.

En ce sens, puisque la raison ou lavérité est un long chemin, il apparaît difficile de croire que la majorité puisse y advenir facilement.

Ainsi la majoritéest bien souvent comme l'ensemble de ces hommes enchaînés dans la caverne.

La majorité n'a donc pas toujoursraison et elle est encore moins un critère de vérité.

On élit pas la vérité, elle doit advenir avec clarté et évidence.c) Plus simplement, si la majorité a une valeur dans les questions concernant la cité il n'en reste pas moins quel'opinion de la majorité n'est pas gage de sagesse notamment en ce qui concerne les domaines de spécialités commela science ou les questions techniques relevant d'autorité sanitaire et éthique par exemple.

Plus simplement, commele dit Bachelard dans La Formation de l'esprit scientifique : « l'opinion pense mal, elle ne pense pas, elle traduit des besoins en connaissances.

» Ce que signifie Bachelard pour nous c'est le divorce ou la distinction qu'il faut établirentre la raison et l'opinion de la majorité.

Ces sont deux sphères radicalement différentes dont les objets n'ont pasle même point de vue.

L'opinion n'est donc pas un produit de la pensée elle ne peut donc pas avoir raison, c'est-à-dire être un critère de vérité, ou alors de manière fortuite, c'est-à-dire par chance.

La majorité véhicule en effet unensemble de croyances, du préconçu et des préjugés c'est-à-dire un ensemble de dogme.

Or c'est peut-être pourça que Tocqueville dans De l'Amérique nous met en garde justement sur la dérive possible de la démocratie en tant que tyrannie de l'opinion.

Le problème en effet est celui de l'éducation de la majorité or à l'époque de Tocqueville, ilfaut remarquer que l'ensemble de la population donc la majorité n'a pas reçu la moindre éducation et le tauxd'analphabétisme est si élevé que pour lui les élections n'ont aucun sens dans la mesure où les personnes necomprennent pas ni ne saisissent pourquoi et quelles sont les conséquences de leurs votes.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles