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Ce que la morale autorise, l'État peut-il l'interdire?

Publié le 15/01/2005

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morale

• La morale a pour objet les règles de la conduite, que ces règles soient habituelles (les mœurs) ou idéales (ce qu'il est bien de faire). L'État est l'ensemble des institutions politiques, au sens large, d'une communauté nationale.  • Une réflexion sur ce qu'autorise ou interdit la morale ne peut donc être conduite sans que se trouve engagée, explicitement ou non, une réflexion sur les théories et les pratiques politiques qui définissent le rôle de l'État. C'est pourquoi on élargit ici la réflexion en se demandant quels  rapports la politique entretient avec la morale. C'est, en effet, à l'intérieur d'une telle problématique générale qu'on trouvera les perspectives qui donnent les moyens de réfléchir, non seulement sur le sujet précis, mais sur de nombreuses questions analogues.  • Il n'est pas possible de faire la recension de toutes les formes de politique et de morale. Un tel inventaire constituerait un traité, non une réflexion philosophique susceptible d'être exposée dans une dissertation. Il faut, par ailleurs, éviter de multiplier les approches anecdotiques.  

  • 1) morale et politique s'opposent

 a) La morale, critique de la politique  b) Inversement, la politique se moque de la morale

  • 2) morale et politique ne peuvent s'exclure

 a) Le moralisme  b) Le cynisme politique

  • 3) coordonner morale et politique

 a) La thèse d'Aristote  b) Rousseau

morale

« remarques préliminaires • La morale a pour objet les règles de la conduite, que ces règles soient habituelles (les mœurs) ou idéales (ce qu'il est bien de faire).L'État est l'ensemble des institutions politiques, au sens large, d'une communauté nationale.• Une réflexion sur ce qu'autorise ou interdit la morale ne peut donc être conduite sans que se trouve engagée, explicitement ou non, uneréflexion sur les théories et les pratiques politiques qui définissent le rôle de l'État.

C'est pourquoi on élargit ici la réflexion en sedemandant quels rapports la politique entretient avec la morale.

C'est, en effet, à l'intérieur d'une telle problématique générale qu'ontrouvera les perspectives qui donnent les moyens de réfléchir, non seulement sur le sujet précis, mais sur de nombreuses questionsanalogues.• Il n'est pas possible de faire la recension de toutes les formes de politique et de morale.

Un tel inventaire constituerait un traité, nonune réflexion philosophique susceptible d'être exposée dans une dissertation.

Il faut, par ailleurs, éviter de multiplier les approchesanecdotiques. 1 morale et politique s'opposent a) La morale, critique de la politiqueCf.

les «moralistes» qui observent les mœurs des hommes, leurs habitudes, leurs passions, etc.

Dirigée vers le monde politique, cetteréflexion souligne souvent son cynisme, ses contradictions, ses mensonges.

Cf.

Montaigne ou La Fontaine («La raison du plus fort...

»). Pascal est particulièrement violent : « plaisante justice qu'une rivière borne...

» ; «Platon et Aristote (...) : s'ils ont écrit de politique, c'étaitcomme pour régler un hôpital de fous; et s'ils ont fait semblant d'en parler comme d'une grande chose, c'est qu'ils savaient que les fousà qui ils parlaient pensaient être rois et empereurs» (Pensées, éd.

Brunschvicg, 331).

Cette m ise en cause de la politique par la moralenous invite à approfondir la « science des mœurs » qui « consolera toujours de l'ignorance des sciences extérieures », à cultiver la «pensée de derrière la tête», lorsqu'on honore les grands.b) Inversement, la politique se moque de la moraleCf.

le machiavélisme : les considérations morales ne doivent pas être confondues avec les données politiques.

Pour prendre le pouvoir etle conserver, l'homme politique peut être amené à faire usage de la ruse, de la perfidie.

«L'histoire de notre temps enseigne que seulsont accompli de grandes choses les princes qui ont fait peu de cas de leur parole et su adroitement endormir la cervelle des gens; en finde compte, ils ont triomphé des honnêtes et des loyaux» (Machiavel, Le Prince, chap.

XVlli).

Cf.

le sujet-texte n° 138, pour préciser laposition de Machiavel.Mais chacune de ces deux attitudes, dont on pourrait trouver d'autres exemples, pose problème. 2 morale et politique ne peuvent s'exclure a) Le moralismeLa critique morale de la politique est menacée par un certain moralisme, c'est-à-dire un souci exclusif de l'excellence de sa consciencemorale qui interdit tout engagement, toute transformation effective du réel.

A la « belle âme, écrit Hegel, il manque la force pour s'aliéner» ; elle « vit dans l'angoisse de souiller la splendeur de son intériorité» et peu à peu elle s'évanouit comme une vapeur sans forme qui sedissout dans l'air» (Phénoménologie de l'esprit, tII, p.

189).

Certes, «les grands hommes sont suivis par un cortège jaloux qui dénonceleurs passions comme des fautes » ; mais ces moralistes ne comprennent pas qu'une «grande figure écrase nécessairement mainte fleurinnocente», lorsqu'elle transforme le monde (La Raison dans l'Histoire, coll.

10-18, pp.

124 et 129). b) Le cynisme politiqueMais le machiavélisme, ou cette dernière proposition de Hegel, pourrait être compris comme la justification politique de n'importe quelimmoralisme, sacrifiant les hommes au nom «d'intérêts supérieurs».

N'est-il donc pas possible de coordonner morale et politique, afind'éviter cynisme brutal ou moralisme stérile ? 3 coordonner morale et politique a) La thèse d'AristotePour Aristote, morale et politique ont une même finalité, le bien, et « c'est nécessairement la même vertu qui appartient à l'homme et aucitoyen de la cité la meilleure.

Il est donc évident que c'est de la même manière et par les mêmes moyens qu'on devient homme de bienet qu'on peut donner à une cité une bonne constitution (...); de sorte que c'est la même éducation et les mêmes habitudes, à peu près,qui serviront».

(Politique, III, chap.

12).b) RousseauRousseau tente également de lier morale idéale et politique idéale.

Sa réflexion politique ne peut être isolée de sa réflexion m orale : «ceux qui voudront traiter séparément la politique et la morale n'entendront jamais rien à aucune des deux» (Emile, IV, éd.

Garnier,p.279).

Par exemple, le passage de l'état de nature à l'état de société conduit à perdre la liberté naturelle «qui n'a pour bornes que lesforces de l'individu».

Il faut, dès lors, parvenir à donner aux hommes une liberté civile qui compense cette perte, sur le plan politique.C'est ce que le pacte social établira; «le peuple, soumis aux lois, en doit être l'auteur».

L'homme peut donc être libre (obéir à la loi qu'ilse prescrit) et vivre en société.

Mais cette solution politique que nous nommerions en simplifiant beaucoup et sans respecter levocabulaire de Rousseau, une solution « démocratique », consacre le changement moral qui s'accomplit lorsqu'on accède à l'état desociété : « La voix du devoir succédant à l'impulsion physique et le droit à l'appétit, Thomme (...) se voit forcé (...) de consulter sa raisonavant d'écouter ses penchants».

(Contrat social, 1,8). Ainsi, chez Rousseau, la politique réalise la morale.

Inversement, la morale, c'est-à-dire «les mœurs, les coutumes, l'opinion» et lesentiment qui nous pousse à vouloir le bien, doit soutenir et animer une volonté politique droite. conclusion Morale et politique peuvent donc, dans des perspectives différentes, s'opposer ou s'accorder.

On remarque que l'accord des deux conceptspeut être constaté sur le plan des faits (telles mœurs enveloppent telle politique), ou posé sur le plan de ce qui doit être (telle politique ettelle morale idéales s'impliquent réciproquement).

L'existence d'un tel accord invite à espérer que pharisaïsme ou réalisme cynique nesont pas les seules attitudes morale et politique possibles.

Si la morale inclut une réflexion critique sur les règles de l'action, laconvergence de la morale et de la politique présuppose qu'elles puissent d'abord s'opposer, c'est-à-dire que la réflexion morale interrogel'action et l'idéal politiques.. »

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