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La morale des "Femmes Savantes" de Molière (bilan de la pièce)

Publié le 07/03/2011

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morale

   La morale de cette comédie est semblable de tout point à celle qui se dégage des grandes œuvres de Molière.    Il croit à la force de la nature, des dispositions que Ton apporte en venant au monde. C'est sur un ton de badinage qu'Henriette déclare à Armande :    Le Ciel, dont nous voyons que l'ordre est tout-puissant,    Pour différents emplois nous fabrique en naissant.

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« est devenu progressivement un impatient besoin de domination ; sa fierté légitime est devenue un orgueilintolérable, un désir ardent de s'élever.

Elle a recherché la suprématie intellectuelle, mais elle s'est proposé un idéaltrop haut, et ce qu'elle a surtout tiré de son effort, c'est le dédain des choses matérielles et aussi des préventionsqui ont altéré son jugement.

L'ignorance est un mal (on l'a vu dans l'Ecole des Femmes), le pédantisme orgueilleuxen est un autre, peut-être pire : la sagesse est entre les deux, et c'est probablement Henriette qui la représentedans cette comédie. Chrysale est venu au monde avec une nature aimable et douce : on a toujours de la sympathie pour les gens facilesà vivre.

Mais il a été trop débonnaire : sa mollesse de caractère s'est aggravée depuis son mariage ; elle a fini pardevenir de la lâcheté.

Ainsi il est, lui aussi, sorti de l'ordre.

— Sans doute il n'a jamais eu beaucoup de goût pourl'étude ; mais la spiritualité de sa femme et de sa fille aînée l'a jeté dans une.

exagération contraire : il s'estrabaissé volontairement aux plus médiocres soucis.

Sur ce point-là encore il a, comme dit Molière, « passé les limites». Ainsi le défaut de mesure a pour résultat de fausser les caractères et de les corrompre ; il a des conséquences plusgraves encore.

Celui qui n'a pas su se régler, non seulement il se nuit à lui-même, mais il fait aussi du tort à ceux quil'entourent. Lorsqu'il est chef de famille, il trouble la tranquillité du ménage, il en compromet souvent le bonheur. Voyez Philaminte, qui a usurpé le pouvoir et qui a, par suite, la plus grande part des responsabilités : égarée dansses hautes spéculations, elle néglige tous les soins domestiques, elle dédaigne et tyrannise son mari ; elle a gâtéArmande par son exemple et par ses leçons.

Si elle l'avait mieux dirigée, Armande n'aurait pas manqué, par sa faute,un bon mariage et n'en serait pas venue par conséquent à détester sa sœur et à la persécuter.

C'est par la fautede sa mère qu'Henriette vit isolée, comprimée ; c'est sa mère qui la menace dans son amour, qui veut lui imposerTrissotin, comme Orgon veut imposer Tartuffe à Mariane.

Et l'on voit bien que dans ce mariage, quoi qu'elle en dise,Philaminte pense à elle plutôt qu'à sa fille : elle veut un gendre poète et philosophe, qui soit l'ornement durable deson salon, de même qu'Argan voudra pour gendre un médecin.

En toutes ces âmes viciées il y a un fond d'égoïsme. Assurément Chrysale est moins coupable qu'elle, mais il l'est certainement.

S'il n'a pas fait le mal, il l'a laissé faire.Par l'exagération de sa complaisance pour elle il a encouragé les défauts de sa femme, il lui a permis d'engager safille aînée dans une voie qu'il jugeait détestable ; il a permis à Trissotin de s'implanter chez lui ; sans le secoursd'Ariste, il aurait fini par lui accorder Henriette : et tout cela pour avoir la paix.

Car maintenant le grand souci de sonexistence c'est de vivre en repos, sans querelle qui retarde son dîner ou abrège son sommeil.

Il est devenu, luiaussi, un égoïste. Dans le théâtre de Molière beaucoup de parents sont dans le même cas : esclaves de la passion ou de l'intérêt, ilssont toujours prêts à sacrifier ceux que la nature leur commande d'aimer.

Ainsi il y a dans leur manie une force dedésorganisation qui, après avoir déformé l'individu, menace tout son groupe. Regardez dans les Femmes Savantes les conséquences de défauts qui pourtant ne semblent pas des plusredoutables.

Quel spectacle que cette réunion de famille, à l'heure où l'on va signer le contrat ! Ailleurs, la douceémotion, les sourires, la joie : ici, devant la table du notaire, deux partis ennemis qui se mesurent des yeux, unejeune fille qui attend son destin avec une inquiétude mortelle, deux volontés qui s'opposent : celle du père et cellede la mère, — et deux prétendants, grande nouveauté qui déconcerte le tabellion, manifestation symbolique duprofond désaccord qui s'est établi dans cette maison. La morale de Molière, fondée sur l'observation et sur le bon sens, est parfaitement accommodée à la faiblessehumaine.

Elle ne nous demande pas de grands sacrifices ; elle ne vise pas très haut ; la théorie du juste milieu et dela mesure la retient loin des sommets. Elle tend à écarter toutes les formes de l'idéalisme.

Nous sommes un peu peinés aujourd'hui de voir Armandedéfigurer par ses grimaces la belle doctrine du platonisme qui avait tant fait, pendant près d'un siècle, pour ennoblirl'amour. On ne peut pas ne pas aimer Henriette, en qui l'auteur a voulu nous montrer le modèle d'une fille parfaitementéquilibrée.

Il faudrait être bien difficile pour ne pas apprécier ses qualités et ses vertus.

Cependant nous ne serionspas fâchés de rencontrer en elle quelque chose qui l'élève davantage, qui pare et poétise sa sagesse.. »

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