Le mythe romantique dans Les Fleurs du Mal

« à dépasser cet apport.

A propos de Baudelaire, Valéry a très bien formulé cette exigence quand il a écrit : « Le problème de Baudelaire pouvait donc se poser ainsi: être un grand poète, mais n'être ni Lamartine, ni Hugo, ni Musset.

Je ne dis pas que ce propos fût conscient, mais il était nécessairement en Baudelaire, et même essentiellement Baudelaire.

» Chaque nouveau venu dans l'histoire de la littérature se trouve confronté au poids écrasant des grands prédécesseurs qui, comme Je père pour l'enfant, deviennent rapidement des obstacles au développement personnel.

En principe, la question paraît simple: tuer ou être tué.

Absorber l'influence d'autrui pour l'éliminer ou perdre sa propre identité par l'assimilation au courant dominant.

Dans Je cas de Baudelaire, il convient d'examiner les deux principaux aspects sous lesquels son œuvre témoigne de ses liens avec le romantisme, le thème du poète maudit et l'aspi­ ration vers un idéal qui se confond avec la patrie perdue, avec le paradis originel.

Les scories du passé La solution la plus facile consiste à écarter dédaigneusement comme des scories du passé les poèmes qui appartiennent le plus directement à cette veine.

On trouve un exemple de cette attitude dans le livre de Léo Bersani sur Baudelaire et Freud, qui a le mérite de résumer avec netteté la thèse consis­ tant à isoler et à rejeter dans Les Fleurs du Mal une partie jugée obsolète : «Les Fleurs du Mal, écrit Léo Bersani, commencent par certains poèmes les plus célèbres et les moins intéres­ sants de Baudelaire: "Bénédiction", "L' Albatros", "Elévation" et "Les Phares".

C'est là que Baudelaire exprime, presque sans ambiguïté une conception idéa­ liste du poète que, dans l'ensemble, Les Fleurs du Mal. »